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Fucked up's never been sexier

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21/03/2017

Chris J. Attacks
Chris J. Attacks
Chris J. Attacks
Mar 21 Mar - 14:33


Chris J. Attacks

And all I care ‘bout is sex and violence, and a heavy bass line is my kind of silence
Généralités

   Nom ;; Attacks.
   Prénoms ;; Chris, Julian.
   Âge ;; 33 ans (juin 2081).
   Genre ;; Connard.
   Origines ;; Bâtard britannique et croate.
   Activité ;; Ingénieur son & DJ producer.
   Sexualité ;; Active.
   Avatar ;; Chris fait maison.
   Règlement ;; Code validé, black.   
  Chemin ;; ( ͡° ͜ʖ ͡°)
   Commentaire ;; Les conversations sms entre Chris et ses potes sont tirées/inspirées de ce site (c'est tellement n'importe quoi, j'ai pas pu résister.)
   
The story


But it was not your fault but mine, and it was your heart on the line; I really fucked it up this time, didn't I, my dear?
T’es né d’un père anglais et d’une mère sans nation.
Tu sais que t’as une maman parce que ton père t’en a parlé une fois. Tu sais pas trop ce que ça veut dire ce mot, mais il a dit qu’elle était intelligente et drôle et que t’avais les dents un peu de travers, tout comme elle. Il a dit que ça rendait son sourire plus beau que tous les autres. Tu lui as demandé si ça rendait le tien beau pareil et il a dit oui. Du coup tu souris tout le temps, comme ta maman.
Des fois, tu t’imagines qu’elle était française. C’est logique, c’est pas loin. Des fois, tu te dis qu’elle venait d’Amérique du sud, puis tu te rappelles que t’es pas bronzé tout le temps comme les frangins Diaz de l’appart d’en face, donc que ça peut pas être ça. Des fois, tu traines une chaise jusque dans la salle de bain, pour grimper dessus et pouvoir te voir dans le miroir, parce que sinon t’es trop petit, et tu tires sur le coin de tes yeux, pour ressembler à madame Chow qu’habite au rez-de-chaussée. Tu te dis que peut-être ta mère elle vient d’un de ces endroits où ils ont des yeux qu’à moitié ouverts. Tu te demandes si ça arrive d'un seul coup quand ils grandissent. Ton père t’a surpris comme ça une fois, en sortant de la douche. Tout concentré sur le miroir, à froncer le nez alors que t’appuyais le bout de tes doigts aux coins de tes yeux pour voir à quoi tu ressemblerais quand tu serais comme madame Chow. Il t’a demandé ce que tu faisais. Quand tu lui as dit, il a explosé de rire, de son gros rire un peu moche que t’adores, et il t’a expliqué que les gens naissaient avec les yeux comme ça, que ça n’arrivait pas une fois grand. Pour tout dire, t’étais soulagé. Parce que ça devait quand même faire vachement mal aux yeux s’ils s’étiraient tous seuls.
*
Des fois, tu demandes à ton père si t’as vraiment une maman. De plus en plus souvent depuis que t’as commencé l’école et que tu vois toutes celles des autres mais jamais la tienne. Avant l’école, tu t’en fichais un peu. T’avais ton père avec toi. Mais maintenant tu te dis que t’aimerais bien avoir ta mère aussi. Pour que les autres arrêtent de te poser des questions auxquelles t’as pas les réponses et qui te font croire que c’est pas normal d’avoir qu’un papa. Que normalement c’est un papa avec une maman, ou un papa avec un papa, ou une maman avec une maman, toujours par deux, jamais par un. Tu leur dis bien que t’en as une toi aussi, de mère, t’as vu des photos d’elle sur l’ordinateur de ton père quand il se met en veille, tu sais que c’était elle parce qu’elle était en train de rire et qu’elle avait les mêmes dents un peu de travers que toi. Sauf qu’ils te croient pas, parce qu’ils l’ont jamais vue venir te chercher à la sortie de l’école. Ils disent que t’es un menteur. La première fois, ça t’a fait pleurer et ils ont eus des ennuis avec la maîtresse. Ils t’ont laissé tranquille après, un peu. Puis Mary a recommencé à t’embêter avec cette histoire, avec Sebastian et Jeremy, et cette fois ça t’a mis en colère.
Le soir quand vous êtes rentrés, après que ton père ait été convoqué par la maîtresse, t’as cru qu’il te gronderait aussi, qu’il serait pas content comme la maîtresse et comme les parents des trois autres gosses à qui t’avais fait des misères. Mais à la place, il a commandé des pizzas et vous avez regardé des vieux films du 21ème siècle comme tous les vendredis soir, ceux qu’il fallait regarder sur un écran tout plat plutôt qu’avec le système d’immersion surround. Et après il t’a expliqué des choses. Il t’a expliqué que tu avais eu raison de faire quelque chose quand les autres enfants t’avaient embêté et fait du mal, mais que tu avais eu tort de leur faire du mal en retour, parce que faire du mal quand on est en colère, c’est comme de planter un clou dans une planche. On peut se rendre compte qu’on s’est trompé, enlever le clou, mais ça laissera toujours une marque dans la planche et on pourra jamais la réparer comme avant.
Et après, il t’a parlé de ta mère, jusqu’à c’que tu t’endormes sur le canapé.
*
Ton père il est gentil. C’est ton univers tout entier, ou presque. Mais t’as vite compris que pour lui, t’es qu’un corps céleste parmi tant d’autres qui errent dans sa galaxie. Il est distrait ton père. Surtout par les femmes.
Y’a eu Sharlene et Mathilde et Polly et Yasna et Fleur. Y’a eu Yina et Jade et Carol et Val et Clémentine. Tu te souviens de leurs prénoms parce que ton père t’a jamais dit comment elle s’appelait ta mère. Alors peut-être que si tu retiens beaucoup de prénoms de filles tu tomberas sur le bon.
Elles sont toujours plus jeunes que ton père, souvent étudiantes de la fac où il travaille, parfois elles ne sont pas anglaises mais t’aimes bien leurs accents. Elles sont toujours gentilles avec toi, même si tu parles pas beaucoup et que tu leur fais pas trop confiance. Mais t’aimes quand même bien quand elles viennent, les amoureuses de ton père, parce que c’est un peu comme si t’avais une maman. Elles font des gâteaux avec toi l’après midi, elles passent te chercher à l’école, elles t’aident pour tes devoirs, elles viennent au cinéma avec toi et ton père, et même que quand elles restent dormir vous prenez des gros petits déjeuner au lit le lendemain matin, mais que quand c’est le week end. Elles finissent toujours par arrêter de venir chez vous un jour. Ton père te dit que c’est parce que c’était compliqué, ou que c’est plus simple comme ça. C’est comme les comètes que vous avez vues en cours cette année, qui passent près de la Terre puis qui s’en vont ailleurs. Ca dure jamais longtemps mais c’est pas grave, parce que ton père et toi vous vous en sortez très bien à deux.
*
La nouvelle amoureuse de ton père s’appelle Eleanore. Elle, elle vient d’un pays avec un nom, mais t’as oublié lequel. Au début elle était gentille avec toi, Eleanore, même si toi tu lui rendais souvent que des silences et des froncements de sourcils inquisiteurs. Elle est jolie, plus jolie que ta mère sur les photos, mais t’aimes pas ses dents trop blanches. Et t’aimes pas qu’elle soit âgée comme ton père. T’as l’impression qu’elle est là plus souvent que les autres et qu’elle prend plus de place que les autres, aussi. Puis tu t’es rendu compte qu’elle restait beaucoup plus longtemps que les autres. Puis quand t’as eu six ans et que ton père t’a dit qu’elle allait vivre avec vous, t’as compris qu’elle allait rester pour de bon.
Parce que pour elle aussi, ton père, c’était le centre de l’univers.





The disconnect is welling up, and good intentions are not enough.
Elle a commencé par des trucs discrets, si discrets que tu t’en rendais pas compte. Quand tu riais elle te disait de faire moins de bruit, mon chéri, tu me déranges. Quand tu souriais, elle te demandait gentiment pourquoi t’avais un air d’idiot sur le visage et puis, tu devrais arrêter de montrer tes dents de travers, mon grand, ce n’est pas très joli. Même quand tu t’occupais tout seul dans ton coin dans le salon, avec ta tablette ou tes devoirs, elle te regardait jusqu’à ce que tu la regardes à ton tour puis elle soupirait et secouait la tête, comme si t’avais fait quelque chose de mal. T’as fini par sentir le poids de son regard partout, puis par l’imaginer partout. Au début, si ton père était là aussi, tu te sentais en sécurité. Tu te disais que ça irait mieux s’il était là, que peut-être elle arrêterait au moins ses gentilles remarques. Et au début, c’était le cas. Puis avec le temps, les mois, l’assurance, elle a continué, que ton père soit là ou pas. Tu te sentais gêné, même quand ton père te serrait contre son flanc devant votre film rigolo du vendredi, même quand il te demandait pourquoi tu ne riais pas aussi, comme lui. Eleanore te regardait, alors tu ne disais rien. Puis elle soupirait encore, comme si cette fois, t’avais eu tort de ne pas rire. « Laisse tomber Eliott, il doit pas comprendre. » « Laisse tomber Eliott, on dirait qu’il n’aime pas ça. » Mais tu comprends, Chris, pas vrai ? T’es loin d’être con. Et tu les aimes, ces soirées films qu’étaient rien qu’à vous deux. T’as envie de rire toi aussi, de ce rire bruyant et moche que t’as hérité de ton père. Mais tu sais plus si t’as le droit de le faire et si tu le fais, t’as peur de te faire réprimander, encore, et tu te dis que ça finira sûrement par agacer tout le monde. Alors t’as arrêté de rire.
Quand tu souris, tu ne montres plus tes dents.
*
Ca a duré un an, puis deux, sournoisement, te minant de l’intérieur sans que tu te rendes compte de rien.
Quand t’as commencé à comprendre ce qui se passait, c’était déjà trop tard. T’as commencé à piquer des crises, plus souvent, plus qu’avant. Ton père a été surpris, et quand il venait te voir plus tard dans ta chambre, tu n’as pas su lui expliquer. Il t’a dit que c’était le changement, que tu t’habituerais à ce rythme à trois, qu’Eleanore faisait des efforts elle aussi et qu’il fallait que tu en fasses également. T’as pas osé lui dire. T’as pas osé dire que t’en faisais déjà, des efforts, parce que tu voulais avoir l’impression d’avoir une maman, comme avec les autres, les filles d’avant. Mais que c’était elle qui t’envoyait bouler d’un revers de la main, d’un haussement de sourcil qui te coupait la voix, d’un beau sourire qui te donnait l’impression qu’elle se moquait de toi. Ces trucs là, elle les faisait toujours dans le dos de ton père. C’était pas comme ses remarques du début, ses remarques qui semblaient gentilles et prévenantes mais qui ne l’étaient pas du tout. Non, ces trucs là, ça te foutait la boule au ventre et froid dans le dos et si seulement ton père pouvait les voir lui aussi. Mais t’as rien dit. Parce que quelque part dans ta tête t’entendais déjà la voix d’Eleanore, tu l’entendais déjà, avec son ton contrit et faussement inquiet, à te dire que tu te trompais, que tu t’imaginais des choses, mon chéri, allons. Et puis elle dirait à ton père qu’elle ne t’en voulait pas, de ces petits énervements,  d’inventer des petits mensonges méchants, qu’elle comprenait, qu’il te fallait un peu plus de temps. Et puis après, tu verrais ce rictus disant qu’elle est plus forte que toi, t’entendrais son claquement de langue et tu sentirais le poids de son regard, et tu savais ce qu’elle dirait, dans le dos de ton père, rien qu’à toi, en te regardant dans les yeux sans ciller, comme si elle s’ennuyait déjà trop de toi. Que t’étais vraiment qu’un mioche abruti, un gêneur, bon à rien sinon à s’accrocher aux jambes de son père.
Alors t’as rien dit. Et t’as continué à t’énerver. Et t’as bridé ton cœur de gosse parce que si c’était ça, la récompense pour naïvement vouloir une mère, alors t’en voulais plus. Non, t’en voulais plus.
*
Un jour, tu sais plus trop quand, t’as craqué.
T’en avais plus rien à faire, si tu plantais des clous dans Eleanore que tu pourrais plus enlever après. Tu voulais pas de ça, tu voulais pas qu’elle t’envenime mais tu savais pas comment te défendre. Alors tu t’irritais. Tu répondais ou tu laissais planer des silences quand elle te parlait, même gentiment ; tu l’évitais ; tu refusais d’être seul avec elle. Et cette oppression qui te vrillait l’esprit est devenue de plus en plus pesante. Tes résultats ont chutés et ton père a été convoqué par le directeur de l’école.
La première fois, ton père a demandé à Eleanore de vous laisser discuter, seul à seul. Tu l’as regardée partir, un maigre sentiment de victoire aux tripes. Ton père t’a posé des questions, pour essayer de comprendre ce qui n’allait pas. Il t’a demandé si tu avais des problèmes à l’école, si tu t’étais battu avec d’autres enfants ou s’ils te faisaient des crasses. Mais c’était pas ça. Il t’a demandé s’il avait fait quelque chose qui t’avait mis en colère, tu lui as dit que non. Il t’a demandé si tu avais un problème avec Eleanore, avec leur nouvelle famille. T’as pas dit oui. Mais t’as pas dit non, non plus. Il n’a pas insisté.
La deuxième fois, il t’a parlé après t’avoir bordé, un soir. Il t’a dit qu’il allait discuter avec Eleanore, peut-être voir avec elle si elle pouvait vivre ailleurs quelques temps. Qu’ils continuent de se voir mais que toi et lui vous récupériez un espace à vous deux. Pendant un moment, tu t’es senti plus léger. T’as cru que les choses iraient mieux. T’y as vraiment cru, mon pauvre.
*
Puis ton père a fini par t’engueuler.
Il ne t’a pas crié dessus, il le faisait rarement. La dernière fois que t’y avais eu droit, c’était un peu avant Eleanore, parce qu’en jouant avec les frangins Diaz en bas de l’immeuble t’avais fait le pari débile que tu pouvais sauter de la rampe de l’escalier de secours jusqu’aux branches du gros arbre du square qui poussait juste à côté. T’étais pas passé loin de la chute de deux étages. Et ton père t’avais engueulé comme rarement mais t’avais compris que c’est parce qu’il avait eu peur lui aussi.
Alors que là, il parlait normalement, presque gentiment, pour que tu comprennes. Mais t’y arrivais pas. Il disait que c’était ta faute, qu’Eleanore faisait tout pour toi, pour que tu te sentes bien avec elle, qu’elle se sentait mal que tu la rejettes comme ça, que tu devrais arrêter de penser qu’à toi dans cette histoire, qu’il aimait vraiment Eleanore. Que c’était difficile pour lui aussi, qu’il ne voulait pas vivre entre vous deux mais avec vous deux, qu’il ne voulait pas souffrir en devant choisir, et que tu devais arrêter de jouer à l’enfant. Que tu devais arrêter de jouer à l’enfant. Que tu devais arrêter de jouer à l’enfant. Il utilisait les mêmes mots qu’elle.
Et t’as compris, cette fois. T’as compris que tu pourrais plus lui dire que t’étais que ça, toi, un enfant. Un gosse qu’avait peur d’être remplacé et peur de perdre des choses importantes pour lesquelles il avait pas encore de noms. Mais t’étais que ça, un gosse. Un gosse qu’aimait son père. Donc pour lui, t’as recommencé à faire des efforts et t’as appris trop tôt à tout cacher, à tout garder pour ta gueule.
Ton père s’est jamais rendu compte de rien.
Il est distrait, ton père.
Surtout par les femmes.





Attack. Free run. Wake up session, baby; pick up the shotgun.
T’as douze ans quand Eleanore parvient à terme, après deux fausses couches. T’en étais presque à lui souhaiter la troisième, et qu’elle en crève cette fois. Presque. Mais t’avais pas envie d’être aux premières loges du deuil sincère de ton père, ni envie de devoir mentir et faire comme si ça t’attristait, toi. Et t’allais certainement pas t’abaisser à feindre la joie et crier au miracle devant l’espèce d’alien rouge, hurlant et fripé qu’elle finit par mettre au monde, pas quand chaque cri de la bestiole te rappelait la douloureuse réalité qui ne manquerait pas de s’abattre sur le coin de ta gueule.
*
Trois ans plus tôt, t’as cru que ça irait mieux avec Eleanore parce que pendant sa première grossesse elle t’avait laissé l’approcher quelque fois, pour que tu poses tes mains sur son ventre tout rond ou que t’y colles ton oreille. C’était pas souvent, perdu au milieu de toute les fois où elle te poussait gentiment pour que tu restes loin. Mais c’était déjà bien assez pour toi. T’arrivais pas à te calmer. T’allais être grand frère, ça t’excitait comme une puce, t’en venais même à oublier d’être morose parce que tu te disais que si Eleanore s’adoucissait comme ça, peut-être que les choses iraient mieux une fois que le bébé serait né.
T’as très vite déchanté le jour où elle t’a dit, en te regardant bien en face, qu’une fois que sa fille serait née, t’aurais plus rien à faire ici. Ton père était encore au travail, tu venais de rentrer de l’école, t’avais passé dix minutes dans la salle de bain pour te mettre des pansements sur les genoux et les paumes et un sur la joue, à essayer de te rendre plus présentable et d’atténuer les traces de bagarre pour que ton père remarque rien, comme souvent. Eleanore avait soudain frappé à la porte en s’énervant et en te disant de sortir. Y’avait cette urgence dans sa voix, comme à chaque fois qu’elle allait vomir, donc t’as pas rechigné pour lui laisser la place et te faufiler dehors. Comme un con, tu t’étais dit que tu pouvais bien lui apporter un verre d’eau et son médicament censé faire en sorte que tout se passe bien. Et là, assise par terre, avachie au dessus de la cuvette, elle t’avait regardé bien en face et t’avait expliqué avec une lenteur cruelle que sa fille prendrait ta place. Qu’elle n’aurait bientôt plus à supporter ta présence ; que ton père aurait enfin une vraie famille plutôt qu’un vulgaire bâtard ingrat vivant accroché à ses basques en permanence ; plutôt qu’un déchet dont même la chienne de mère n’avait pas voulu. Et encore, et encore.
Tu te souviens encore de chaque mot et de l’indifférence avec laquelle ils tombaient de ses lèvres. C’est marqué au fer rouge sous ta peau. Tu te contentes de ne pas trop y penser, et de savourer en silence les souvenirs de ses fausses couches à la place. Si t’avais eu de la peine c’était uniquement pour les mort-nés, et encore, si t’étais honnête, tu dirais qu’il s’agissait plutôt de pitié mais après tout les morts se foutent bien de vos états d’âme. Par contre, pour la douleur et l’anéantissement d’Eleanore, rien d’autre qu’une satisfaction perverse dont tu ne lui cachais rien et qui la mettait dans une rage folle. Elle avait été jusqu’à hurler à ton père que c’était ta faute, que tu lui avais donné les mauvais médicaments sciemment. Ton père a mis ça sur le compte du chagrin et de l’épreuve, même s’il a pris ta défense sans une hésitation sur le moment, malgré sa propre peine.
Autant dire que s’il y avait eu un semblant de trêve entre Eleanore et toi jusqu’ici, celle-ci vola en éclat. Vous ne jouiez le jeu de l’entente que lorsque ton père était là, elle moins bien qu’avant, toi avec un désintérêt grandissant.
*
Alors non, ce pseudo demi-frère qui s’accroche enfin à la vie après deux ratages, ce chiard qui vient foutre en l’air l’équation, t’en veux pas plus que sa salope de génitrice.
A cause de lui, vous avez déjà dû déménager à Brighton. Pas que ça t’ait grandement attristé, tu pourras toujours parler avec tes potes en un tour de main via vos ordis et vos projecteurs holographiques, comme vous le faites déjà pendant les vacances, mais t’y voyais la première trace de son influence avant même sa naissance. La première étape de ta mise à l’écart inévitable dans un nouvel endroit qui verrait s’établir leur nouvelle famille et leur nouveau bonheur. T’avais beau faire le fier ; t’avais beau te faire une raison ; t’avais beau croire que t’avais grandi, que ça t’atteignait plus et essayer d’être au dessus de tout ça ; t’en crevais d’angoisse la nuit. A tremper ton oreiller de pleurs et à t’y enfoncer face la première pour que personne n’entende rien, surtout pas elle.
*
Les premiers mois n’ont pas été faciles mais, au final, la transition a été moins difficile que ce que tu t’imaginais.
Eleanore était trop prise par son mioche pour se soucier de toi. Pour la putain de première fois depuis des années elle n’était plus en permanence sur ton dos, et les bleus qui parsemaient ta peau n’étaient plus que le résultat de tes accroches avec tes semblables, les teignes du coin. Finies les claques mesquines, finis les pincements vicieux sur tes bras et tes épaules, finis tous ces trucs qui se perdaient dans ce que tu ramenais de l’extérieur et la laissait s’en tirer avec impunité. C’était comme si t’existais déjà plus pour elle et t’allais pas t’en plaindre. Les seuls moments où elle semblait te remettre, c’était quand tu t’approchais de trop près de Matthew. T’avais essayé, au début. De t’approcher, de le porter, de lui parler. Parce qu’au fond, t’arrivais pas à te détacher de ce sentiment d’appartenance, de cette sensation que ce chiard braillard tenait un peu de ta responsabilité et que t’avais ta place près de lui, toi aussi, que t’avais le droit de l’aimer. Tu t’es dit que c’était ça qu’on ressentait quand on devenait grand frère : qu’on se sentait plus fort et capable d’affronter le monde entier pour que cette espèce de gnome puisse grandir en paix sans connaître les saloperies les plus viles que lui réservait l’existence. Du moins les retarder, un peu. Mais Eleanore veillait au grain, pire qu’un rapace, le prenant dans ses bras pour le mettre hors de ta portée, te disant sèchement de le laisser tranquille pendant qu’il dormait. Alors t’as gardé tes distances, tu t’es désintéressé et, lui aussi, il a fini par faire partie du décor pour toi.
Ton père pouvait plus faire semblant de ne rien voir, désormais. Fallait bien qu’il remarque qu’un truc n’allait pas, que la mécanique de sa petite famille parfaite avait explosé un boulon en cours de route. Tu te sentais coupable au début. C’était probablement ta faute, t’aurais pu faire plus d’efforts, t’aurais pu essayer, pour de vrai, pour que ça fonctionne. Ca t’es vite passé quand t’as vu à quel point il était heureux avec Matthew et t’as pris son manque d’attention envers toi comme un juste retour des choses.
De toute façon, t’avais de quoi t’occuper. Une nouvelle ville, un nouveau collège, des nouvelles gueules. Tu t’es vite fait quelques potes dans le quartier, et quelques rivaux aussi, encore plus vite. Y’a eu ce déclic propre à l’adolescence dans tout ça, ce regain d’énergie, de soif de tout débordante, coïncidant avec tout le reste et surtout avec le début de négligence de ton père et de la harpie. D’un seul coup, t’étais libre. Libre de vagabonder alentour, de découvrir ton nouveau terrain de jeu, d’aller faire chier les mouettes sur la plage et de courir sur la jetée tard le soir après les cours. Tu pouvais être aussi casse cou que tu voulais, crier aussi fort que les vagues et passer des aprems entiers à try hard le dernier jeu vidéo du moment chez Leo ou Amithy sans que personne te fasse de remarques quand tu rentrais, si tu rentrais. Tu rentrais avec plein de sable dans tes pompes. Tu rentrais couvert de terre et de poussière. Tu rentrais orné de bleus et de coups fièrement gagnés – mais pas au visage, du moins pas trop voyants, pour pas avoir d’emmerdes à l’école ou avec vos parents : c’était une de vos règles tacites.
Tu rentrais avec des sourires tellement grands que t’en avais mal aux joues putain.
Cette année là, grâce à la naissance de Matthew, t’es devenu le centre de ton propre univers et tu choisissais enfin les constellations qui allaient en éclairer le ciel.
C’est aussi cette année là que t’as rencontré Lullaby.




They're acting like they want a riot, it's a riot I'll give ‘em as the sound climbs higher on this violent rhythm; for you snakes in the grass, supplying the venom, I ain't scared of your teeth, I admire what's in ‘em.
« Putain, Lulla ! »
T’attrapes sa capuche au vol quand la balançoire revient à portée et tu tires dessus comme une brute pour l’en faire tomber.
« Qu’est-ce que t’as encore été dire à Miss Brown, merde. Elle a failli convoquer mon père et le conseil de discipline du lycée. Du lycée, putain. »
Miss Brown, c’était votre professeur de chant, à la chorale. Elle connaissait Lullaby depuis qu’elle était toute gosse et toi depuis que t’étais arrivé à Brighton. C’était aussi une des professeurs de musique à ton bahut et elle avait cette fâcheuse tendance de considérer ses cours de chants comme une extension de la vie lycéenne pour les quelques membres qui l’avaient aussi à West High. Et elle adorait Lullaby. Donc quand Lullaby avait soit disant des emmerdes à cause de toi, miss Brown elle se foutait bien de la séparation du privé et du public. Même si Lullaby était à la fac, même si toi t’étais au lycée, même si vous étiez dans sa chorale pour le fun en dehors de votre vie scolaire, miss Brown elle s’en foutait. Elle avait fait un scandale en salle des profs et ça t’était retombé sur la gueule.
Et bordel, tu lui en voulais, à Lulla. Si y’avait bien un truc que tu voulais éviter, c’était le renvoi. Tu te contentais du strict minimum, de garder des notes à peine en dessous de la moyenne. Juste assez pour que les profs te haranguent et te disent de te mettre au boulot et voyons, Chris, t’es un garçon intelligent pourtant, pourquoi tu gâches ton potentiel comme ça ; juste assez pour que ton père n’y trouve rien à redire sinon à soupirer et t’obliger à quelques séances de révisions avec lui avant les contrôles importants. Mais si t’étais renvoyé, putain, adieu la belle vie. Eleanore se ferait une joie de te foutre en internat, loin d’ici, si tu lui en laissais la chance.
Lulla te jette un coup d’œil hargneux depuis le sol et tu vois enfin le sale œil au beurre noir qui lui bouffe la partie gauche du visage, encore plus visible sous la couche de maquille hâtif.
« J’ai juste dit qu’on s’était battus pour un truc débile, » qu’elle te dit en se relevant, replaçant mèches et capuche pour cacher la marque violacée, « et que ça avait un peu dérapé. Je pensais pas qu’ils t’emmerderaient trop avec ça, pardon. »
Ta petite rage s’éteint aussi vite qu’elle est arrivée et tu te penches pour essayer de mieux voir, un air inquiet plissant tes sourcils. Elle te jette un regard noir, mais tu vois bien que le cœur n’y est pas. Elle a ce petit tremblement au coin des lèvres, celui des mauvais jours. Tu connais déjà la réponse mais tu peux pas t’empêcher de demander, un autre genre de colère dans la voix :
« C’est encore ton p- »
« Je me suis juste mangé un mur en glissant dans les escaliers, c’est rien. »
Bien sûr, t’y crois pas une seconde, et elle non plus. C’était votre routine, depuis cinq ans.
Tu préfères ne pas insister. T’as pas envie que ça dérape en dispute et tu veux pas la faire pleurer quand elle fait autant d’efforts pour paraître forte. Tu lui files un petit coup dans le talon et tu prends sa place sur l’assise de la balançoire en râlant.
« Ouais, bah la prochaine fois soit plus convaincante. »
« T’inquiète va. Les profs savent qu’on se tape dessus pour se montrer notre affection. C’est comme ça qu’on s’aime, pas vrai ? »
C’était un mensonge, bien sûr. Jamais tu lèverais la main sur Lulla pour autre chose qu’une taloche quand cette abrutie d’asperge trop grande se moque de ta petite taille, et encore. Mais c’était la fiction que vous vendiez. C’était votre arrangement pour qu’elle puisse sauver la face.
*
Lullaby avait deux ans de plus que toi et habitait dans le quartier. Elle avait les cheveux bleus, d’un joli turquoise sur les pointes qui cascadait depuis le bleu nuit des racines. Y’avait pas que ça de bleu chez elle. Comme toi, elle en avait plein sa peau de porcelaine. Malgré son maquillage, tu les repérais vite. Tu connaissais la musique, après tout. Parfois c’était sur la joue ou sur la pommette, parfois des traces reconnaissables autour de ses poignets, et quand elle était en t-shirt tu pouvais en deviner qui s’effaçaient sous ses clavicules et ses épaules et ses bras. Ils ressemblaient à ceux qu’Eleanore te faisait, avant, mais en plus nets et en plus sombres. En plus fort.
T’étais tombé sur elle un jour, dans un square pas loin de chez toi à mi-chemin du lycée, celui avec les grandes balançoires. Il faisait beau mais trop froid et le square était quasiment vide. T’avais reconnu ses cheveux. Tout le monde les connaissait ici, elle et ses cheveux bleus.
T’étais au début de ta deuxième année de collège, parfois encore appelé « le nouveau » en dépit des dix mois passés depuis que t’étais arrivé à Brighton, et toi aussi tu connaissais Lullaby, de loin. C’était une ‘grande’, et une nana populaire au bahut. Leo était intarissable à son sujet quand il était lancé, c’était d’un casse pied pas possible. Du coup, t’en savais un peu sur elle. Elle venait d’une bonne famille impliquée en politique, elle sentait les agrumes en été, elle chantait, bien, avec une voix d’ange, dans la chorale de miss Brown. Elle était forte aussi, elle faisait du kickboxing avec les filles de sa classe, puis Lullaby ceci, puis Lullaby cela, et Lullaby toujours souriante et gentille, et Lulla qui aimait bien la table tout au fond dans l’alcôve à la bibliothèque quand elle étudiait. Sérieux, à ce stade, c’en devenait gênant, le nombre de choses anodines que tu savais sur elle sans jamais lui avoir parlé. C’est à cause de ça que tu t’es approché, d’ailleurs. T’avais l’impression de mentir par omission, d’un mauvais équilibre. De lui avoir pris un petit bout d’elle sans lui avoir proposé de toi en échange, c’était pas correct. Tu t’es approché et t’as dit :
« Hey. »
Quand elle a levé son visage, t’as vu une trace sur sa joue. Ce jour là tu l’as sûrement repérée plus vite que d’habitude parce que t’avais la même, ou quasi, sur la joue opposée. Cadeau d’Eleanore pour avoir fait pleurer Matthew. T’as vu son regard faire comme le tien, passer du bleu à tes yeux en silence. Elle a dit :
« Hey. »
« Tu t’es fait quoi, à la joue ? »
« Rien, j’ai loupé mon saut en balançoire. Et toi ? »
T’as eu un petit sourire, parce que tu la croyais pas. Tu savais qu’elle te croirait pas non plus quand t’as dit :
« Pareil. »
Vous êtes devenus amis lentement. Mais petit à petit, ça se faisait. T’as appris qu’elle sentait effectivement les agrumes en été à cause de son shampoing et du soleil ; et qu’elle était loin d’être aussi gentille et souriante qu’on le disait, pas avec toi du moins. Elle s’est servie de ta réputation de mauvais élève bagarreur pour couvrir les coups de son père qui étaient trop visibles et tu l’as laissée faire sans ciller. Les profs s’en sont inquiétés, au début, ils avaient même convoqué ton père. Mais au final, c’était clair que vous vous entendiez bien, de mieux en mieux, puis Lullaby était une bonne élève bien élevée d’une famille respectable donc ils ont arrêté de faire plus que vous réprimander de temps en temps. Uniquement quand c’était avec Lulla par contre, tu prenais toujours aussi cher quand tu te frittais avec d’autres élèves, faut pas rêver.
Avec le temps, elle est devenue un peu moins gentille et un peu plus elle-même avec tout le monde. Tu te demandais si c’était pas un peu de ta faute, vu que tu l’engueulais souvent en lui disant d’arrêter de faire semblant, que si elle aimait pas un truc, elle ferait mieux de le dire, qu’on s’en foutait si bidule ou machin voulait plus trainer avec elle depuis qu’elle trainait avec toi. Tu penses pas que c’ait été une mauvaise chose pour elle. Et puis toi elle t’apprenait à être plus patient et un peu plus compatissant, à te servir de maquillage aussi, pour pas que t’aies l’air d’une patate difforme après un coup sur le nez. Mine de rien, elle te tirait avec elle vers le haut.
*
Tu sautes de la balançoire quand il commence à pleuvoir et tu jettes un sale regard au ciel, mais les nuages s’en foutent. Les mains enfoncées dans vos poches, Lulla et toi vous quittez le square en discutant de tout et de rien, surtout de rien, jusqu’à ce que tu sentes ton portable vibrer. Tu décroches sans faire attention à l’ID qui s’affiche sur l’écran.
« Hey, Panic, my man ! »
Ah, c’est Murat. Y’a que lui pour t’appeler par ce surnom débile. Parce que panic attacks, voyez ? Et vu le son de sa voix, il est pas loin de la crise cardiaque lui-même.
« Dis, y’a cet enfoiré de Londres là, Bartho ? Celui qui devait s’occuper du son pour La Soirée (on entendait les majuscules dans sa voix), ouais, il vient d’annuler ce con, j’t’en foutrai moi des ‘c’est un pote de la petite copine de Fred et il fait fureur à la capitale en ce moment, tu vas voir, vous serez refaits’, mon CUL ouais, j’te jure déjà que personne peut piffer Julie, après ce coup c’est mort, j’vais la-
« ‘tain, ferme-la deux secondes pour voir, que j’puisse en placer une ? »
Un bref silence, puis :
« Non. Parce qu’en prime, en voyant que Bartho décarrait, le type qui devait prendre la suite, la deuxième partie de soirée ? Il se tire aussi, parce qu’il avait une autre proposition pour le même soir et selon lui on ferait mieux d’annuler, donc autant qu’il aille se faire du fric ailleurs et PUTAIN ce genre de rapace me fout en rage. Donc, ouais, on se retrouve sans rien pour La Soirée, comment on fait ? Parce que c’est hors de question qu’on annule, gars, c’est trop tard, y’a pas moyen, on a trimé comme des dingues pour ça depuis six mois et puis… »
Tu laisses Murat parler tout seul, déjà perdu dans sa diatribe amère contre Bartho et « ces putains de DJs à deux balles sans principes, même pas foutus de tenir leurs engagements, tous des enfoirés –sauf toi Panic, bien sûr, et tes potes sont réglo aussi, je dis pas– mais alors lui là par contre, si je l’avais en face j’te le… »
*
T’es entré dans la chorale de Lulla quelques mois après votre première rencontre, sans trop te souvenir comment t’avais fini par lui dire oui, là aussi. Tu finissais toujours par lui dire oui.
T’étais pas le pire du choeur, mais putain, t’étais loin d’être le meilleur. Le seul truc qui te sauvait c’est que t’avais pas encore mué donc que ça s’entendait pas trop.
Ouais, c’est Lulla qui t’a entrainé avec elle dans la musique. Après, y’a eu ses potes, et tous ces gens avec qui t’as commencé à discuter sur des forums, du monde entier, toujours là pour partager la dernière perle, le dernier EP, la dernière collab entre X et Y ; dépoussiérant des concertos entiers ; découvrant des petits talents partout sur la toile ; répondant à toutes tes questions et te filant des sons, des sons, des sons. Des sons et de la musique à pouvoir t’y noyer. Ca a fini par prendre toute ton attention. Tes bleus avaient le temps de disparaître et de s’effacer, tes aprems chez Leo et Amithy s’étaient vues remplacées par des squat de répétitions de chorales ou dans des studios pour voir les potes de Lulla, puis d’untel et de machin, répéter avec leurs groupes inconnus, se défouler avec passion et espoir. A treize piges, ça impressionne.
T’as plongé dans la musique avec autant de facilité que ton indifférence croissante envers ta famille. Plus facilement encore. Ca donnait une dimension nouvelle à tes jours et à tes pensées. Tu comprenais rien au solfège mais t’avais une oreille certaine pour le rythme ; t’aimais le ronflement grave et chaud d’une ligne de basse et la puissance primale d’une grosse caisse ; t’aimais écouter des chants en langues étrangères justement pour ne pas comprendre les mots et pouvoir entendre toutes les modulations et les tons des voix.
T’as commencé à mixer dans ta chambre pas très longtemps après avoir rejoint la chorale et commencé à traîner avec la clique de musiciens autour de Lulla. C’était tout simplement une question d’outils et de moyens. Tu te voyais mal demander à ton père de te payer des cours sachant que l’instrument que tu préférais c’était la batterie. Avec Matthew et Eleanore dans le coin, aucune chance. Tu te voyais mal supporter des cours aussi, de toute façon. T’as toujours plutôt été du genre à comprendre les choses de ton côté, sans personne et à ton rythme, à la mesure de ton intérêt et de ta curiosité. En plus, devenir potes avec des types et des nanas plus âgés que toi ça te donnait des personnes sur qui compter si t’avais des questions, ils te laissaient même toucher un peu à leurs instruments pour te filer les bases ici et là.
Du coup, chez toi, t’avais que ton ordi. Ton ordi et des forums et tous ces logiciels libres pour créer de la musique. C’était simple, pratique, et il te suffisait de brancher un casque pour faire chier personne et te perdre dans tes premiers bégaiements électroniques. C’était pas grand-chose, au début. Tu t’essayais à quelques mash ups sans trop de succès, t’écoutais des heures et des heures de musique que tu découpais en différentes playlists selon leurs atmosphères et le ressenti que t’en avais, essayant de trouver dans quel ordre les enchainer pour ne pas briser la ligne de rythme tout en préservant l’ambiance que tu voulais mettre en avant. Des trucs simples, les bases. Ecouter, comprendre, écouter, écouter, décomposer, écouter, reproduire, écouter encore. T’as fait ça pendant un moment avant de vraiment avoir le déclic.
T’as jamais été très bon pour t’exprimer. Petit, peut-être, avant Eleanore. Mais depuis, t’avais perdu ça, cette capacité de dire ce que tu ressentais quand tu le ressentais, que ce soit de le dire aux autres ou à toi-même. Lulla aidait, mais ça suffisait pas. Et un soir que t’avais eu le malheur de jeter un regard à Matthew en rentrant, coincé qu’il était entre ton père et sa mère sur le canapé, et qu’il t’avait regardé avec ses grands yeux chocolat, des grands yeux curieux, comme s’il se demandait qui t’était et c’que tu foutais chez lui, t’avais été pris d’une colère noire. Dans ta chambre, t’avais eu envie d’abattre les murs à coups de chaise. A la place, t’avais allumé ton ordi, branché ton casque, et créé une piste courte à te passer en boucle, aussi violente que possible pour noyer tout le reste. Tu l’as encore d’ailleurs, perdue dans tes fichiers. Tu la ressors de temps en temps pour voir tout le chemin que t’as accompli, depuis ce cri laid et inarticulé jusqu’aux phrases et aux véritables histoires que t’arrives à mettre en son aujourd’hui.
*
Au téléphone, Murat part en tangente. A coups d’insinuations maladroites, il demande si tu connaitrais pas quelqu’un pour remplacer Bartho et Deuxième Partie de Soirée. Il sait que tu fais déjà des sets ici et là dans les soirées ou les raves étudiantes. Il sait que ce que tu fais plait. Puis au dernier moment, comme ça, t’es vraiment sa dernière option : un type qui accepte de sortir un set de six heures sans broncher d’ici trois jours, ça court pas les rues. Encore moins des types qui paieraient pour le faire, comme toi.
« Okay, je le ferai. »
« C’est vrai ? »
« Ouais. Mais t’as intérêt à aligner le même fric que pour Bartho et ton autre type réunis. »
« Quoi ?! T’es taré. Panic, on est potes non ? Tu pourrais pas voir ça comme une faveur ? Puis personne te connait bordel, tu peux pas demander- »
« Si t’avais assez pour eux, t’auras assez pour moi, rien à foutre qu’on soit potes ou que personne me connaisse à Londres. J’te parle pas comme un pote, Murat. J’te parle comme le mec que tu veux employer pour sauver ta soirée de lancement du désastre. A ta place, j’fermerais ma gueule et j’dirais oui monsieur. »
Du coin de l’œil tu vois Lulla lever les yeux au ciel mais tu t’en cognes. Quitte à saisir une occasion, autant le faire sans détour. Que t’aies que dix-sept ans et Murat vingt-cinq importait peu. C’est lui qu’avait besoin de toi, pas l’inverse.
« T’es vraiment qu’un connard. »
« Un connard qui sait ce qu’il fait. Crois-moi, quand mon set sera fini et que les gens en redemanderont, tu seras content qu’on associe ton collectif à mon nom. Hell, tu pourras passer pour le mec qui m’a lancé si ça te fait plaisir, ça te fera une pub d’enfer quand j’débarquerai sur la scène internationale. »
« Un connard doublé d’un p’tit con vaniteux. »
« C’mon babe. » Tu te retiens d’ajouter qu’il n’a pas le choix, il en est sûrement déjà trop conscient et tu veux pas qu’il se braque. Tu veux pas qu’il dise non et qu’il cherche quelqu’un d’autre. Tu le veux, ce set.
T’attends, ignorant les petits coups de coude de Lulla dans tes côtes et ses chuchotements inquisiteurs pour savoir ce qui se passe. Le pire dans tout ça, c’est que tu pensais chaque mot que tu venais de dire à Murat. T’étais jeune, tu savais ce que tu faisais et tu savais que tes productions trouveraient un public. Tu savais aussi que tout ça était loin d’être parfait et que t’avais encore beaucoup à apprendre, que c’était que le début. Mais tu doutais de rien. D’y penser ça te foutait un frisson d’impatience. Mais plus le silence s’étire et plus tu crains d’avoir trop poussé ta chance. Tu retiens in extremis un cri de joie quand il finit par répondre, balançant ton poing en l’air et faisant sursauter Lulla :
« Okay. Putain, okay, mais compte pas sur moi pour te payer quoi que ce soit d’autre. Si tu veux boire ou te tirer un rail t’aligneras ton propre pognon. »
« Aw, tu brises mon petit cœur d’alcoolique là. »
« Va crever. »
Il raccroche avant que tu puisses ajouter quoi que ce soit et tu te tournes vers Lulla avec un sourire jusqu’aux oreilles.
« Devine qui occupe tout le line up samedi soir à l’Enceinte ? »
*
Morceaux choisis, archives sms 2097 - 2099 (15-17 ans):





There's a hole in your soul, like an animal with no conscience, repentance unknown. Close your eyes, pay the price for your paradise; devils feed on the seeds that are sown.
Lulla est partie à Sidney quelques mois plus tard, un peu avant l’été. Le sale secret en huis clos qui avait lieu chez elle avait été éventé après qu’elle ait fini à l’hôpital, un soir. A mesure que l’histoire se déroulait dans les journaux et à la télé, t’avais appris que sa mère et elle étaient logées à la même enseigne ; simplement que sa mère avait plus d’expérience pour cacher les choses. Un cousin en Australie leur avait proposé de venir chez lui pour s’éloigner de la tempête médiatique. La mère de Lulla a refusé, il fallait que quelqu’un reste pour s’occuper du procès et de la procédure de divorce et de tout ce bordel. Lulla a pensé à elle, à son bonheur, à ce qu’elle voulait, et elle a dit oui. Tu lui en as jamais voulu. A vrai dire, t’es plutôt fier d’elle.
Elle te raconte sa nouvelle vie à Sidney, qu’elle va mieux, qu’elle va bien, alors tu lui dis la même chose, parce que sur le moment c’est vrai, sur le moment, quand tu lui parles, tu vas bien. Vous vous parlez constamment, tous les jours, en facetime ou par sms, mais dès que c’est fini et que tu reprends conscience de ce qu’il y a autour de toi, d’où tu es, où elle est partie, tu te rends compte que c’est pas la même chose. Que c’est pas assez.
Depuis que Lulla est partie, tout est devenu pire. Les soirées, pire. L’alcool, pire. Les rails, plus nombreux. Ta violence, pire. La découche, tous les soirs. Tes fréquentations, dangereuses. Ton peu de sommeil, pire.
Le seul truc qui ne semble pas partir en vrille et qui te garde les pieds sur terre, c’est la musique. Constante, remplissant les silences laissés là par l’absence. Et faut croire que ça plait aux autres, le désespoir. Après cette première soirée à l’Enceinte, tes sons et tes mixs ont jamais autant été écoutés et téléchargés ; t’as reçu un mail d’un petit label du centre de Brighton auquel tu ne comptes pas répondre ; tu passes tous tes week end à t’épuiser en dernière partie de line-up, derrière ton matos, pendant que de plus en plus de monde débarque aux soirées organisées par le collectif de Murat. Ils viennent voir et entendre des groupes ou des Djs de plus en plus connus, appréciant l’atmosphère underground que Murat veut pour ses soirées : des lieux changeants, annoncés au dernier moment, des minis festivals de deux jours, ce genre de chose. T’avais même réussi à convaincre Murat de te faire confiance un soir, et t’avais fait venir la chorale, la putain de chorale, pour une partie de mix d’une demi-heure, le mélange des voix et de tes platines s’associant juste comme tu l’avais voulu, juste comme il avait fallu pour surprendre et exalter. T’aurais aimé qu’elle soit là pour l’entendre. Tu sais que ça lui aurait plu.
A la place, t’as commencé à craindre le silence. Et depuis qu’elle est partie, voir du bleu te fait mal.
*
T’étais déjà pas un saint quand elle était là, c’était un secret pour personne. Une vieille âme dans un corps vieilli, abîmé trop tôt par tous les mauvais choix passant à ta portée et sur lesquels tu te jetais avec l’avidité d’un type qui veut être distrait, qui veut échapper à quelque chose sans regarder en arrière. Y’avait tes petites bastons des rues, bien sûr, et les bières que vous faisiez tourner après pour tout pardonner, mais pas que. T’avais reçu ta première pipe à quatorze piges, dans les chiottes du bahut, et couché avec Daliah de la 3ème C deux jours après. A seize ans, l’ivresse était déjà une camarade fidèle. Et insuffisante. Alors t’as essayé ce qu’il y avait au-delà de la bouteille : les parachutes, la poudreuse, les cachets estampillés de smileys et de peace signs, t’en passes. Des trucs qui te permettaient de tenir des nuits entières. Sans excès, pour le fun, juste pour t’éclater parce que c’était libérateur et qu’on se sentait bien, hors du temps, hors de son corps et hors de ses pensées. Mais avec Lulla partie, c’était comme si tu venais de perdre un garde fou invisible, quelque chose qui t’empêchait d’être plus con que tu ne l’étais déjà. Du coup, t’as commencé à jouer au con.
*
Tes bagarres de gosse se sont muées en un monstre sans muselière et tous crocs dehors. Tu te battais moins souvent, ça doit être ce qu’on appelle mûrir, mais quand tu le faisais, c’était pas à moitié. C’était plus le temps des disputes d’enfants à propos de qui en a des plus grosses que qui, non. Maintenant, quand vous partiez en couille, c’était incendiaire, c’était pour répondre à des insultes, pour affirmer vos valeurs et pour défendre des idéaux, ce qui rendait les choses encore pire. Tu te chamaillais plus : tu défonçais des gueules et tu te prenais des raclées. Les pansements ne suffisaient pas, fallait des poches de glace, de la gaze et des bandages, parfois les trois en même temps, parfois un passage à l’hosto pour suturer le tout. T’as même perdu une molaire un jour, ça a fait un mal de chien, et depuis t’as pris cette habitude de passer le bout de ta langue dans le trou laissé là quand tu vois une situation tourner au vinaigre.
Tu t’es essayé à la boxe avec Carmen, une de tes ex, en te disant que ça te canaliserait peut-être, mais t’as pas tenu trois séances. Trop de règles, trop clean, et la sensation de la peau de ton adversaire claquant contre tes phalanges te manquait. Te battre de manière contrôlée c’était pas ton truc. Toi tu préférais les coups bas et les coups de putes, aucune règle sinon le bon sens et le peu de décence vous empêchant d’aller trop loin.
Le sexe est devenu un moyen comme un autre d’échapper à la vraie vie, celle qui attendait sur le pas de la porte. Sans Lulla pour inconsciemment retenir ton attention, t’as commencé à regarder autour de toi, et t’as aimé la vue. Le fait que tu traînes souvent avec une clique d’étudiants plutôt qu’avec des gens de ton âge était un avantage certain. Tu finissais avec des filles plus patientes, plus expérimentées. Ca n’évitait en rien les drames et les jalousies mais tu t’en foutais un peu, de leurs états d’âmes, quand elles comprenaient que tu ne cherchais pas plus qu’un corps chaud où t’oublier. Que concrètement, elles ou une autre, ça t’importait peu. Puis après, c’est ça qu’elles ont fini par chercher chez toi. Certaines étaient dans le même état d’esprit, t’étais là, ouvert aux propositions, l’assurance d’un coup rapide le temps d’un week end ou d’un soir et elles ne cherchaient pas plus elles non plus. Celles là, c’était celles que tu préférais, celles chez qui ça te dérangeait pas de rester pour le petit dej’ ou pour l’aprem et discuter un peu de tout et de rien. Chez d’autres, y avait ce complexe du héros inversé. T’étais un jeune clairement perdu, sur le mauvais chemin, mauvais garçon dans tous les sens du terme et ça devait les exciter de se dire qu’elles pourraient te sauver de toi-même et révéler le Chris sensible et aimant qui devait forcément se cacher sous cet extérieur faux et construit. Elles se vexaient souvent quand elles réalisaient que ta réputation n’était ni exagérée, ni fabriquée. Elles, ça devenait un jeu de les faire pleurer ou de les blesser à coup de mots incisifs.
*
Murat a essayé d’intervenir. Vous vous étiez rapprochés depuis que vous bossiez ensemble pour son collectif et il était aux premières loges pour te voir foncer droit dans le mur. Seulement, Murat n’était pas Lulla, il n’habitait pas ton quartier, il pouvait difficilement te fliquer et la plupart du temps il était plutôt pour t’accompagner dans tes conneries, parce que ça lui plaisait. On ne fonde pas un collectif se basant sur les raves, l’alcool, la musique et les soirées sans en aimer l’ambiance après tout.
Sans Lulla, t’es vraiment devenu dangereux, aussi bien pour les autres que pour toi-même, et le peu de retenue morale et de principes qu’il te restait a foutu le camp.
*
Morceaux choisis, archives sms 2099 - 2101 (17-19ans):


- la suite plus bas askip -

   
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Bon courage pour la suite ! :b05:

▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬ ◆ ▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬

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Merci Lucci, Zach (notamment pour le vava dessiné avec Kiyo ♥) et Lucas pour les avatars et kits CJA  1647638966

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Mar 21 Mar - 15:00
Bienvenue étrangement j'ai la même sensation que mon VDD mais comme mes intuitions sont généralement pourries, j'vais en rester au simple bienvenue XD

Bon courage pour ta fiche ! x)

▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬ ◆ ▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬

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Mar 21 Mar - 15:11
(Re-)Bienvenue ( ͡° ͜ʖ ͡°)
Même "sensation-plus-que-ça" que mes VDD !
L'avatar est magnifique ** ♥
Bon courage pour la rédaction de la fiche ~
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Mar 21 Mar - 15:18
J'voulais un gif de Kaamelott pour faire un jeu d'mot avec ton nom. Mais j'ai rien trouvé. Mais ton début de fiche est quand même super cool. Mais c'est quand même dommage. Du coup j'te pose quand même ça là pour le dessin :
cébo c'que tu dessines:

Re bienvenue ( ͡° ͜ʖ ͡°)
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Mar 21 Mar - 15:22
Avatar ;; Chris fait maison.

PARDON SERIEUX?? cétoikiàfaitl'illu?
C'est trop stylé!

Ah, bienvenue btw!
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Mar 21 Mar - 15:54
Bah alors. Poste donc. Fais partager azy. CJA  901032552
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Mar 21 Mar - 16:57
Rebienvenue !
Je fais le perroquet mais osef : putain l'avatar il déchire ! Tu gères !
J'ai hâte de lire la fiche **
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Mar 21 Mar - 17:11
Bienvenue -blablabla-, nouvelle tête? -blablabla-, avat de la mort qui tue, blablabla...
Oui, je fais dans l'original aussi!
Bonne rédaction!

▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬ ◆ ▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬▬

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Mar 21 Mar - 17:25
Merde, faites chier les gens, j'ai l'air encore moins originale que vous x)

Moi aussi mon flair exceptionnel et ce curieux petit personnage ( ͡° ͜ʖ ͡°) me disent que nous avons peut-être affaire à un DC mais quand à savoir qui...

Akay. J'ai... j'ai même pas envie de m'exprimer sur le vava. Je me sens comme un bout de pâte à modeler à côté du David.

(Re ?)Bienvenue parmi nous ! Vivement qu'on puisse en savoir un peu plus et continuer de faire les groupies, ce perso a l'air trop classe ! *w*
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Mar 21 Mar - 17:43
Re-bienvenue ( ͡° ͜ʖ ͡°) Je plussoie mes voisins du dessus, je flaire comme un odeur de DC, je n'en suis que plus curieuse *^*. Pourquoi tant de cachotteries ? Et puis. Cet avatar, mes aïeux. Owhlalala. Et ce tatouage, mes aïeux. Owhlalala. Ceybow. J'aime. Je sur-aime. Viens me faire de bébés ♥

Oui, tout ceci n'est pas original mais, eh D: J'arrive après le coup d'envoi je suis tristesse ;w;

Tout ça pour dire que.
Bon courage / Bonne chance / Méconium / et tout ce qui s'ensuit pour la rédaction de ta fiche. J'ai hâte de lire ce qui suit cette amorce fort intéressante. 8D

:yukina01:
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Mar 21 Mar - 18:01
Vous êtes bien trop au taquet bordel.
Merci à vous. ♥




   

   
The story bis


Your little brother never tells you but he loves you so. You said your mother only smiled on her TV show. You're only happy when your sorry head is filled with dope; I hope you make it to the day you're 28 years old.
« Chris…? Chris, tu t’es encore fait mal ? »
La voix est fluette, incertaine, ayant peur de parler trop fort. Ayant peur de te parler tout court.
La chose est tellement improbable, tellement bizarre, que tu t’arrêtes à mi chemin d’enlever ton t-shirt pour te retourner, en équilibre précaire dans ce monde vacillant et embrumé par l’alcool. Matthew se tient dans l’embrasure de la porte de ta piaule, éclairé par la lumière diffuse de la lune et des lampadaires filtrant dans la baraque, levant des yeux presque craintifs vers toi. Mais y’a une résolution inébranlable dans sa posture et dans la façon qu’il a de tenir la trousse à pharmacie entre ses petites mains, tout contre sa poitrine.
« Pardon ? »
Il sursaute. T’avais pas prévu de prendre un ton aussi cassant, mais t’avais mal au crâne et certainement pas la patience de dealer avec un mioche maintenant. Tu voulais juste te coucher et avoir quelques heures d’inconscience tranquille avant d’aller en cours.
T’as l’impression de voir ses yeux se mettre à briller et t’espères qu’il compte pas se mettre à chialer. Ca manquerait pas de réveiller ton père et Eleanore et t’avais vraiment pas besoin de ça. Mais le mioche semble les retenir obstinément.
« Tu… Je t’ai entendu rentrer et-et j’ai vu que tu avais saigné du nez, et tes mains aussi, alors je… Je-je me suis dit que tu aurais b-besoin de ça… ? »
Sa voix prend l’intonation d’une demi-question, s’éteignant faiblement sous ton regard impassible. Il doit s’imaginer que t’es en colère contre lui, tu le vois à son expression qui se défait peu à peu, tu devais ressembler à ça toi aussi, plus jeune. Mais non. Tu te demandes juste quel âge il peut bien avoir maintenant. T’as passé tellement d’années à l’ignorer et à essayer d’oublier son existence que l’information a fini par disparaître en même temps que tout le reste de ton intérêt pour les trois autres personnes vivant avec toi. C’est quasiment la première fois que tu lui adresses un regard, la première fois que tu le vois vraiment. Son petit nez fin, l’angle délicat de son menton et sa bouche ressemblaient à ceux d’Eleanore, pas de doute la dessus, mais il serait impossible de nier que vous étiez frères. Il avait les mêmes cheveux blonds ébouriffés que toi, même si les siens semblaient plus doux et boucler un peu là où les tiens n’étaient qu’un amas d’épis, et il y avait quelques éclats ambrés dans ses prunelles chocolat, rappelant la couleur de tes propres yeux.
Si t’avais été sobre, il n’y a aucun doute que tu lui aurais pris la trousse des mains sans un mot avant de lui claquer la porte au nez. Dans ton état pourtant, tu te sentais une étrange curiosité de comprendre ce qui avait bien pu le motiver à venir t’adresser la parole, et tu te sentais trop fatigué pour luter contre la légère curiosité disputant soudain la place à ton agacement.
Vacillant un peu, tu termines de tirer ton t-shirt au dessus de ta tête, grimaçant quand les douleurs de ta soirée mouvementée parviennent à passer le brouillard insensible de l’ivresse, et le laisse tomber au sol avant de t’asseoir au bord de ton lit. Avec un soupir, tu lui fais un signe de la main pour lui dire d’entrer. Une fois encore, sa réaction te surprend. Son visage s’illumine d’un sourire timide mais heureux et tu ne peux que froncer les sourcils de confusion. Y’avait un truc pas net chez ce gosse.
Il fronce le nez en s’approchant. C’est vrai que l’odeur de la clope et de l’alcool doit être dérangeante pour lui. Mais il vient quand même te donner la trousse de soins, grimpant sur ton lit quand tu tapotes la couverture à côté de toi. Il t’observe en silence alors que tu nettoies ta figure et tes phalanges sommairement, que tu désinfectes les petites plaies et coupures.
T’as l’impression de devoir dire quelque chose. De devoir faire un effort toi aussi.
« Ca t’arrive souvent de te réveiller quand je rentre ? »
A vrai dire, tu dormais plus souvent chez des potes ou coups d’un soir que chez toi. Tu passais moins d’un jour sur deux dans cette baraque. Matthew attrape le bas de son t-shirt, le tordant entre ses mains alors qu’il secoue la tête, ses boucles virevoltant gentiment.
« Non… Mais là c’est parce que j’ai fait un cauchemar, alors j’étais déjà réveillé et… »
« Et ? »
Il fronce les sourcils, triturant son pauvre t-shirt, et te jette un coup d’œil furtif.
« Ca faisait peur de rester tout seul. »
Sa réponse t’adoucit malgré toi. Les cauchemars, tu connais. Alors plutôt que de lui demander de quoi parlait le sien, tu sors une petite boite de pansements et tu la lui donnes, lui montrant l’une de tes mains.
« Tu m’aides à les mettre ? »
Son humeur maussade disparaît aussitôt et il hoche la tête vigoureusement, avec ce même sourire pincé pour éviter de montrer à quel point il était content. Et c’est là que ça te frappe, sans douceur, sans préavis, comme un mur de brique.
Matthew agissait comme toi gamin, avec Eleanore, au tout début. Avec le même entêtement incertain, les mêmes maladresses. Quand tu voulais désespérément qu’elle te remarque, qu’elle te parle, qu’elle te voit. Qu’elle te dise des mots gentils et qu’elle soit contente de toi. Quand tu voulais qu’elle t’aime un peu, toi aussi.
La réalisation te perturbe et tu sens un truc se casser quelque part. Tu regardes ce gamin haut comme trois pommes se concentrer à fond pour te mettre des pansements fluo pour enfant autour des doigts. Ce gamin qui n’avait connu que ton indifférence hostile depuis sa naissance mais qui venait quand même te voir au milieu de la nuit parce qu’il avait fait un cauchemar, qui prenait même le temps de s’inquiéter pour toi et tes bleus et t’apporter de quoi te soigner.
Tu sens un nœud dans ta gorge et t’as l’impression que tu vas te mettre à pleurer. Tu mets ça sur le compte de l’alcool et des autres trucs peu nets circulant dans tes veines et foutant tes pensées en vrac.
Tu laisses Matthew s’occuper de ta deuxième main en silence, jusqu’à ce que tu t’entendes parler après qu’il ait mis le dernier pansement à ton petit doigt, comme si t’étais soudain spectateur de la scène.
« Tu peux rester dormir ici, si tu veux. »
Il lève de grands yeux vers toi et le soulagement mêlé de joie toute simple que tu y lis finissent d’abattre un pan entier de toi-même.
« D’accord ! »
Vous ne mettez pas longtemps à vous glisser sous les draps et tu te places le plus au bord possible, dos à ton frère, aussi bien pour lui laisser de la place qu’en mettre le plus possible entre vous, encore complètement abasourdi par ce qui vient d’arriver. T’entends Matthew bouger et se tortiller jusqu’à toi pour se pelotonner contre ton dos et il s’endort presque aussitôt. Toi, t’y arrives pas. Mais malgré la fatigue et le mal de crâne qui continue de vriller tes tempes, ça fait longtemps que tu t’es pas senti aussi apaisé ; le cœur gonflé de gratitude, d’un espoir si fragile et incertain que tu te refuses d’y penser pour l’instant.
Evidemment, le lendemain, t’as tout raconté à Lulla et elle était tellement contente pour toi qu’elle a pleurniché et morvé de joie à ta place. T’as pris des tas de screenshots parce qu’elle était vraiment moche et que ça te ferait des munitions pour lui foutre la honte plus tard.
*
A partir de l’instant où Matthew a réussi à t’atteindre et à obtenir ton attention, les choses ont changées pour le mieux entre vous. Faut dire que t’avais six ans de négligence à te faire pardonner.
Tes sorties et découches se sont réduites aux weekends. Le reste de la semaine, tu revenais chez toi pour passer la soirée avec Matthew et il venait souvent squatter ton lit quand il se réveillait la nuit. T’émergeais le matin avec un vrai poulpe accroché à toi, voire avec un pied dans la joue, dormant du sommeil du juste, te bavant allègrement sur l’épaule ou le torse. C’était pas croyable ce que ce mioche bougeait, tournait et virait quand il pionçait. Pour un peu il te pousserait hors du lit, s’il n’avait pas été aussi petit.
Tu ne t’étais même pas posé la question de savoir comment réagirait Eleanore face à votre soudaine entente. Elle te semblait étrangement insignifiante et inoffensive désormais. Vieillie. Tu te foutais de ce qu’elle te dirait, elle n’oserait certainement pas lever la main sur toi maintenant qu’un simple regard haineux de ta part la réduisait au silence face à la possibilité très réelle de s’en prendre une en retour, et ses tentatives pour éloigner Matthew restaient infructueuses. Ton frère ne comprenait pas pourquoi il ne pourrait pas rester avec toi pour regarder un film ou lire un livre et il n’hésitait pas à le lui dire innocemment, quelque peu curieux du comportement de sa mère vu qu’il ne faisait rien de mal et toi non plus.
Tu voyais que ton père, lui, se réjouissait. T’étais loin de lui avoir pardonné, il était devenu un étranger et tu sentais que tu ne lui devais rien, pas comme avec Matthew. Il comprenait. Mais de temps en temps, ça ne te dérangeait pas qu’il vous rejoigne tous les deux pour regarder un film ou vous voir jouer à la console, lui sur le canapé, toi dans un fauteuil et Matthew assis en tailleur sur tes genoux ; ou encore qu’il vienne s’ajouter à votre discussion après avoir entendu Matthew parler fort et avec excitation du dernier truc qui l’avait passionné à l’école.
Matthew aimait bien l’école. Son intérêt a fini par déteindre sur toi et tu t’es mis à l’aider pour ses devoirs. Si les cours ne t’ennuyaient pas autant et que les circonstances avaient été différentes, t’aurais pu être dans les premiers de ton lycée, après tout. Alors aider Matthew ne t’embêtait pas. En fait, ça t’a même poussé à faire un effort de ton côté, ne serait-ce que pour ne pas foirer ton bac et tes concours d’entrée. Ca aussi, c’était nouveau. T’avais décidé de postuler pour des formations en ingénierie du son après une discussion avec Matthew, quand tu lui avais montré comment tu faisais de la musique. Il n’aimait pas spécialement ce que tu faisais, trop jeune pour ça, et ne prenait pas de pincettes pour le dire, mais il avait bien compris que tu adorais la musique, le son, et l’idée avait germé tranquillement. Ton père t’avait encouragé aussi, à sa manière. En une conversation toute simple un matin, chacun devant votre café respectif : Matthew lui avait tout répété. Il trouvait que c’était une bonne idée, que tu t’engages dans un truc qui te faisait vraiment vibrer. Qu’une fois que tu serais décidé, tu n’aurais pas à t’inquiéter pour les frais de scolarité, « donc choisis simplement l’école qui te semble la plus adapté, fils, sans te soucier du prix. » C’était une façon comme une autre de s’acheter un peu de ton pardon mais tu savais que le sentiment qui l’animait était honnête.
C’était vivifiant, d’avoir enfin un semblant d’objectif. Un but. Quelque chose pour te pousser de l’avant. Matthew était trop jeune pour comprendre qu’il venait de te tirer d’une phase de ta vie risquée et destructrice, que, sans lui, t’aurais sûrement fini par crever d’une overdose ou d’un mot de trop face à des personnes vraiment dangereuses. Il t’a pas fallu longtemps pour l’aimer corps et âme, ton frère. T’aurais pu partir en guerre contre le monde entier pour lui.
*
Mais t’as pas eu besoin de partir bien loin. Non, il a juste fallu te battre contre Eleanore et t’as perdu.
Encore aujourd’hui t’ignores comment elle s’y est prise. T’ignores comment elle a fait, qui elle a corrompu, quel putain de rite sacrificiel elle a dû faire pour parvenir à t’empêcher de voir Matthew. Mais elle l’a fait. Elle pouvait peut-être plus te menacer de quoi que ce soit, elle t’intimidait peut-être plus, mais elle était toujours prête à tout pour te foutre à l’écart. Après t’avoir pris ton père, elle t’a pris ton frère.
Ca t’est tombé sur le coin de la gueule sans que tu t’y attendes, comme souvent. C’était l’été, tu venais de finir le lycée, les résultats allaient tomber dans quelques jours. D’ici une semaine ou deux, tu saurais si t’avais été accepté quelque part en ingé son, si tu devrais repasser des examens en deuxième session en septembre, peut-être. T’allais à Sidney pendant les grandes vacances rendre visite à Lulla, ton sac était prêt, tu partais le lendemain. Les choses allaient bien.
T’as reçu un appel de ton père alors que t’étais sur la plage, à traîner avec des potes du lycée. Ca aurait dû te mettre la puce à l’oreille. Ton père ne t’appelait jamais.
T’as pas compris tout de suite, t’as cru à une blague. Eleanore comptait amener Matthew ailleurs ? Une ordonnance de protection contre toi ? C’était quoi cette douille ? Mais le ton urgent de ton père, sa détresse évidente, ont fini par te faire craindre le pire.
Le reste s’est déroulé à toute vitesse. T’es rentré chez toi, chez un père agité, qui tentait de t’expliquer que tu ne pourrais plus approcher Eleanore ou Matthew à moins de cinq cents mètres, que la restriction était tombée ce matin au tribunal et qu’un policier venait de la lui apporter, qu’il ignorait complètement qu’elle avait entamé la procédure, qu’elle avait pris Matthew pour l’amener chez ses grands-parents en banlieue de la ville pour le moment, le temps que la situation se tasse, que tu ne devais rien faire d’irréfléchi, Chris, s’il te plait, reste calme, Chris, tu m’entends ?
T’as fait une crise de panique. Sur le moment, tu t’es dis que ça ferait sûrement beaucoup rire Murat quand tu lui raconterais.
Forcément, t’es allé voir Matthew juste après t’en être remis. Il fallait absolument que tu le vois. T’es allé jusque chez les parents d’Eleanore et t’es entré sans plus te soucier de rien. Y’avait eu des cris, des menaces, la police au bout du téléphone dans la minute, qui serait là dans cinq. Et au milieu de ça y’avait ton frère, perdu, regardant ces adultes s’enrager après toi pour la simple raison que tu les dérangeais et qu’il aurait mieux fallu pour eux que tu ne sois jamais né. Tu les avais bousculés sans ménagement pour choper Matthew et l’amener dans la salle de bain, fermant la porte à clef. T’as pris le temps de lui expliquer que vous ne pourriez plus vous voir pendant un moment. Que tu partais en Australie pour deux mois mais que tu l’appellerais tous les soirs. Mais ça il le savait déjà. Lui, il avait d’autres questions, des questions comme des lames, mais t’avais pas le temps pour y répondre. Demain, tu lui disais. Il faudrait qu’il appelle votre père demain et vous pourriez discuter un peu plus. Tu te doutais qu’Eleanore ne laisserait aucuns de tes appels passer, mais peut-être qu’avec un tiers, ton père, Lulla, peut-être que ça irait.
T’as ouvert la porte après une minute de plus à le tenir contre toi et vous êtes sortis sous d’autres cris et sous les voix agacées de policiers demandant à Eleanore et ses parents de se calmer. T’as pas résisté quand ils t’ont accompagnés dehors et tu te souviens du trajet du retour chez toi comme d’un rêve. T’avais cru qu’ils t’amèneraient à la station mais ils t’ont dit qu’ils laisseraient passer pour cette fois, que ton père avait appelé lui aussi, dès que t’avais passé la porte. T’avais eu quelques accrochages avec la police plus jeune, ils savaient que t’étaient pas un mauvais gars. Juste un jeune paumé, comme beaucoup d’autres. Que par contre, à la prochaine violation de la restriction, ce serait le tribunal et possiblement l’incarcération pour quelques mois. Peut-être plus.
Le lendemain, t’étais dans l’avion pour l’Australie. Tu n’as pas revu Matthew depuis, sinon sur tes écrans pendant vos appels réguliers ou sur les photos et vidéos que ton père t’envoie de temps en temps.





Do you remember your coming down, forced to take sides? Your taunted charm and your broken smile touched me unexpectedly; so long, so long you've waited in line: desire is a gift in life; so long, so long you've left and arrived, it's time for you to stay a while.
T’as été pris dans une école à Londres. Pas pour tes notes, ni pour ton dossier, mais parce qu’une ingénieure son dans le crew de Murat y était ancienne élève et avait plaidé en ta faveur après que Murat le lui ait demandé. Il savait pour ton frère. Il avait été là quand t’étais parti en vrille après Lulla et il savait que revenir de Sidney pour rester à Brighton sans rien faire finirait mal pour toi.
Du coup, le moins qu’on puisse dire, c’est que l’administration t’avait à l’œil et que les profs exigeaient deux fois plus de travail de ta part. Eux et certains étudiants attendaient le moindre faux pas pour pouvoir te tomber sur le dos. « Vous voyez bien qu’il vaut que dalle. » « Encore un mec pistonné qui se croit meilleur que les autres. » Mais tu leur as jamais donné satisfaction. T’étais à deux doigts de t’effondrer et de tout foutre en l’air mais il te suffisait de penser à Matthew, de penser à quel point il avait été content de la nouvelle, à quel point il t’encourageait tous les soirs dans vos appels, pour décider que non. Que cette fois-ci, ce serait différent. Que tu répèterais pas le fiasco qu’avait été ta vie après le départ de Lulla. Que t’étais plus fort que ça, maintenant. Tu te disais que tes objectifs en valaient la peine, et aujourd’hui tu n’en doutes plus.
*
A Londres, tu t’es retrouvé en colloc avec un couple de deux nanas.
C’est arrivé par hasard, parce que tu t’es battu avec l’une d’elle en sortant d’un bar, à peine une semaine après ton arrivée à la capitale. Y’a des choses qui changeront jamais, hein ?
Ryan était à la tête d’un gang sévissant dans le monde underground de Londres. A vrai dire, elle était plutôt le bras droit du type qui avait créé leur bande mais il avait disparu du jour au lendemain, la laissant seule pour gérer le bordel. La laissant seule. Ryan était une nana impulsive et vivant l’instant présent, une vraie louve, aussi violente que toi et plus entraînée que toi aux combats de rue. Après votre accrochage, elle n’a pas mis longtemps à comprendre qu’elle et toi, vous étiez pas si différents. Fais du même moule de rage sourde de vivre et d’un vide béant au creux du bide que vous tâchiez tous les deux d’oublier. Elle t’a demandé si t’avais un endroit où crécher pour la nuit et quand tu lui as dit le nom de l’auberge miteuse où t’avais trouvé tes quartiers elle t’avait trainé chez elle par le col de la veste. En arrivant, elle a réveillé Riley pour qu’elle vous remette les gueules en bon état à coups de poches de glace.
Riley était la plus âgée des deux, étudiante en médecine, à quelques années de finir son internat. T’imagines que c’est parce qu’elle avait déjà l’habitude de Ryan qu’elle a pu s’habituer à toi aussi vite : vivre avec Ryan depuis quatre ans aurait rendu n’importe qui capable de tout supporter, même l’apocalypse.
Elles t’ont distrait de ton deuil muet, de ta perte qui n’en était pas une. C’était comme d’avoir soudainement deux grandes sœurs.
Une comme toi, qui comprenait ton besoin de te perdre dans le son et l’action pour ne pas laisser le temps ralentir, pour ne pas laisser les peurs glacées prendre racine ; qui t’initiait à tous les bons plans, qui t’incrustait à toutes les soirées les plus dingues, qui partageait cachets et pochons quand vos épaules faiblissaient de trop supporter le poids de vos vies. C'est elle qui t'a aidé à trouver le bon tatoueur pour ton projet, celui pour lequel t'économisais depuis la rentrée et, quand elle a appris que tu mixais, elle t’a même eu quelques gigs qui avaient foutu ton nom sur les lèvres d’un public plus large et dans les oreilles de quelques producteurs. Comme à Brighton, t’avais refusé les offres, mais tu lui en avais été tellement reconnaissant que tu lui avais offert deux jours d’initiation à la F1 en circuit. Ryan raffolait de vitesse.
Et puis y’avait l’autre, Riley, la vraie grande sœur, avec sa patience infinie, qui vous remettait à vos places sans douceur quand vous dépassiez les bornes, qui s’occupait de vos mains et de vos côtes et de vos gueules d’abrutis quand vous rentriez couverts de bleus mais riant comme des cons. Que prenait garde à vos cœurs fragiles pour qu’ils ne tombent pas en miettes.
T’as dormi sur le canapé cette nuit là. Et du temps que t’es resté à Londres, t’y es revenu tous les soirs.
*
T’as fini par signer avec un label en début de ta deuxième année : celui de Murat. Comme quoi, y’avait pas que toi qui avançais dans la vie. T’avais même accepté sa proposition stupide de te trouver un nom, quelque chose qui fasse ta marque parce que « Panic, no offense, mais ‘y’a Chris Attacks qui mix ce soir’ ça fera pas bander à l’international mec, il te faut un truc plus percutant, simple, efficace ! »
Après un moment, t’avais donné ton accord pour CJA. C’était le truc le plus simple et le moins stupide qu’il avait trouvé.
*
Quand t’es sorti de ta formation à vingt-et-un an, tu t’es envolé aussi sec pour les US pour rendre la tentation d’aller voir Matthew moins forte. A la place, t’es allé retrouver Andy.
Andy c’était un ingénieur lumière devenu sourd douze ans plus tôt, à dix-huit piges, après un accident de moto. Il était un peu barge, à cette époque. Il avait décidé de faire la course contre un avion sur le tarmac et ça c’était mal fini. Avec les progrès en médecine, il avait pu obtenir des appareils lui permettant de retrouver partiellement l’ouïe mais c’était un processus peu agréable et parfois douloureux pour ses tympans au bord de la destruction complète, donc il en usait rarement. Juste pour s’autoriser une session de musique une fois par mois, qu’il t’avait dit. Vous vous étiez rencontrés sur l’un des premiers forums de musique que t’as fréquenté et vous étiez en correspondance depuis. Quand tu lui avais parlé de tes études toutes neuves, il t’avait invité à New York si jamais t’avais besoin d’un job. Il avait bossé pour quelques grands noms du ciné indépendant, dans la pub, beaucoup dans le théâtre. Il t’avait assuré qu’il aurait pas de mal à te trouver un poste quelque part derrière une console son et il a tenu parole.
T’es resté six mois là-bas, à l’accompagner sur des tournages et des plateaux. Puis t’as fini par te trouver quelques petits boulots à côté, sans son aide, en radio ou pour des concerts parce que t’arrivais jamais à rester loin de l’énergie inimitable des instruments et des voix. T’as été technicien pour des petits groupes inconnus, t’as été assistant pour une chanteuse pop qui faisait fureur, t’as appris, appris, appris. T’as été embauché pour une tournée avec un groupe a capela. Capables, à voix nues, de passer du gospel à la techno et au rap le plus mélodieux, d’aller si bas dans les basses que les murs et les sols vibraient sous la puissance des enceintes. C’était magique. Et ça a ravivé l’envie de produire plus de ta propre musique. Mais tu voulais faire quelque chose de différent, cette fois. Tu voulais pas te cantonner à toi-même. T’exprimer par tes platines, tu savais faire. Non, tu t’es dit que t’allais commencer à faire parler les autres, aussi. A les aider à raconter leurs histoires à eux.
*
Les cinq années qui ont suivi, t’as voyagé un peu partout dans le monde, dans les endroits les plus reculés, les plus oubliés, même par la technologie. Tu t’es associés avec des universités, des linguistes et des sociologues pour aller enregistrer des gens dont les langages disparaissaient, oubliés, sauvés de justesse par internet alors même qu’il était la raison de leur effacement ; pour enregistrer les langues indigènes et tribales, sauvegardées dans des données et des archives comme des pièces de musée, destinées à prendre la poussière à mesure que les anciens s’éteignaient et avec eux la pratique orale.
T’es allé en Amazonie, au Brésil, dans le Sahara et en Sibérie. T’es passé par les steppes de Mongolie, par le cœur de l’Afrique pendant un an, par l’Inde, l’Indonésie et plusieurs fois par l’Australie. Et à mesure que tu récoltais des histoires, que tu enregistrais des voix et des sons et des héritages, tu t’es pris d’une affection soudaine pour ces personnes de trois, quatre fois ton âge, pour tous ses corps fatigués et las qui renfermaient des esprits à couper le souffle. Avec leurs autorisations, tu t’es mis à intégrer leurs histoires, leurs passés, dans tes musiques. Avec l’aide de traducteurs, parfois même avec l’aide des familles de ces anciens qui te fascinaient tant, t’attachais aux morceaux la signification de leurs mots dans un fichier à part, compris dans les téléchargements de tes EPs.
Grâce à Murat, t’as pu avoir une liberté quasi-totale dans la façon dont tu gérais tes productions et les sets réguliers que tu faisais. Ton projet t’obligeait à courir le monde et tu comptais bien en tirer parti, mixant dans les clubs et salles des grandes villes des pays que tu visitais. Tu n’étais peut-être pas noyé dans la célébrité mais tu commençais à avoir une certaine envergure dans le milieu, et la façon dont tu liais l’électro à ton travail peu commun avec les peuples oubliés du monde te valait une curiosité grandissante. Quand ton emploi du temps et tes destinations le permettaient, il t’arrivait de participer à des festivals hétéroclites, mêlant concerts, cirques, projections cinématographiques, débats en tout genre. Putain, tu t’éclatais.
T’avais toujours l’impression d’avoir laissé un bout de toi en Angleterre, avec Matthew, mais t’avais appris à vivre avec, à te contenter de sa présence interposée par un écran. Et puis dans quatre ans, Matthew sera majeur, et il pourra faire en sorte d’annuler cette ordonnance à la con. Plus que quatre ans, c’était pas si long.
Et puis t’as repris ton matos, tes micros et tes platines et cette fois tu t’es dit que t’allais partir pour l’Asie de l’Est. Pour la Chine, pour la Corée. Pour le Japon.
*
Morceaux choisis, archives sms 2101- 2108 (19-26 ans):





Give me the sound, to see another world outside that’s full of all the broken things that I made. Just give me a life to bleed, another world outside that’s full of all the awful things that I made.
T’avais hâte d’arriver au Japon. T’avais hâte d’aller à la rencontre des anciens qui se souvenaient encore de ce qu’étaient leurs vies et leur pays avant que l’Incontestable n’ait été mis en place, dernières générations aux jeunesses libres encore là pour en témoigner. Ca ne faisait que cinquante ans, après tout, un peu plus. Et pourtant, la face du pays en étant déjà si transformée, si loin de ce que t’avais pu glaner dans les documentaires du début du siècle dernier. C’ était aussi effrayant que fascinant, de venir voir le système de tes propres yeux, après en avoir tant entendu parler en Europe. Et encore plus depuis la période houleuse et récente où la Chine avait laissé entendre s’intéresser à un processus identique pour sa population, en manque de jeunes travailleurs pour supporter la transition des générations. Le concept même de la chose te paraissait improbable, toi qui changeais d’amants comme de chemise et qui n’avait aucun problème à envisager des relations multiples si les conditions étaient réunies. Les autres, le sexe, l’intimité, c’était des choses trop importantes pour toi, trop vitales. Tu tiendrais pas deux jours si tu devais vivre ici.
T’avais déjà discuté avec une demi-dizaine de couples japonais de tous horizons pour préparer les interviews, et te coordonner avec l’équipe du projet une fois sur place. Murat t’avait aussi arrangé une dizaine de sets et de concert dans tout l’archipel pendant les quelques mois que t’autorisait ton visa là-bas. Tu comptais profiter de l’occasion pour rencontrer en personne la poignée de DJs japonais que t’avais eu la chance de croiser de part le monde et avec qui le contact était bien passé, pour leur proposer de participer en feat aux trois soirées que tu ferais sur Tokyo pour ta dernière  semaine avant ton retour en Europe.
Tes gigs à Tokyo, t’en as fait que deux. Pendant la troisième, et pendant ton vol de retour le lendemain, et pendant l’expiration de ton visa de travail quelques jours après, t’étais inconscient à l’hosto.
*
Un bête accident de moto, une route glissante, un casque foireux.
Quand t’as vu le camion partir en vrille sur le carrefour que tu traversais, bizarrement, t’as pensé à Andy. Juste Andy et son accident et le hasard qui faisait que maintenant c’était ton tour. T’as pas eu peur, t’en as pas eu le temps.  
Quand t’as émergé de l’inconscience la première fois, des tubes perfusés de partout et un tuyau dans la gorge, dire que t’étais dans les vapes serait un euphémisme. T’as à peine ouvert les yeux que t’as sombré de nouveau en entendant la voix d’une infirmière baragouiner quelque chose. T’avais jamais pris le temps d’apprendre le japonais, pas le temps ni l’envie, et avec les technologies de traduction en temps réel t’en avais pas ressenti le besoin.
La deuxième fois, y’avait une autre personne avec l’infirmière dans la chambre mais ils sont sortis pendant que ton cerveau déconnectait une nouvelle fois.
La fois d’après, tu te sentais plus alerte et on t’a enlevé l’assistance respiratoire. Les choses étaient encore floues, y’avait cette brume de douleur constante à moitié engluée dans les antidouleurs et tous les autres trucs qu’ils te filaient, et quand des gens en blouse te parlaient tu comprenais rien mais tu te sentais mieux. T’avais bien essayé de croasser quelque chose en anglais mais t’avais la gorge encore trop sèche et irritée par l’intubation. Heureusement, l’infirmière parlait un anglais avec un accent si prononcé que tu comprenais qu’un mot sur deux dans ton état. T’as pu comprendre que t’étais toujours dans la région de Tokyo, que la personne à contacter en cas d’urgence avait été appelée et qu’elle était arrivée. Une jolie fille aux cheveux bleus, qu’elle t’a dit.
Le lendemain, Lulla est venue te rendre visite. Elle t’a insulté et frappé faiblement et derrière tout ça t’as senti son soulagement et à quel point elle avait flippé en recevant l’appel. Elle a parlé un moment, te disant que t’étais qu’un con, que t’étais taré de faire peur aux gens comme ça, que Matthew et ton père avait été dans tous leurs états et que si t’avais pas l’air aussi cabossé elle t’aurait rossé le cul sans une hésitation. Elle est restée encore quelque jours, jusqu'à ce que tu te remettes complètement au moins de ton coma à défaut des fractures puis elle est retournée à Sidney.
Ta guérison se passait bien, même si t'étais pas encore en état pour quitter l'hosto et prendre l'avion pour rentrer, seulement deux semaines après l'accident. T'avais sympathisé avec ton infirmière. Une jeune nana charmante, qui t'apprenait les bases du japonais quand elle avait cinq minutes à te consacrer. Pour l'évolution de ton état, c'est le docteur Kogane qui t'en parlait. Il n'a rien fait pour nourrir tes espoirs quant à retrouver l'utilisation totale de ton bras gauche, encore trop abîmé pour l'instant, mais, selon lui, il y avait encore des possibilités pour toi d'en garder l'usage.
T’avais déjà de la chance de t’en être sorti quasiment indemne. Ouais, y’avait eu de la casse. Des os fracturés au niveau du torse et d'une jambe, un bras en charpie, un traumatisme crânien léger et un coma d’une dizaine de jours. Mais t’aurais pu crever. T’aurais pu disparaître, sur une bête route de banlieue, à l’autre bout du monde sans que ta famille et amis n’en sachent rien.
Le gouvernement japonais par contre, lui, il savait tout. Où c’était passé l’accident, dans quel ambulance t’avais été transféré, où t’avais été admis, le numéro de ta chambre. Ton poids, ton âge, ton sexe, ton groupe sanguin, ta masse graisseuse, tout.
Et surtout l’heure et la minute exactes à laquelle t’avais cessé d’être en règle sur leur territoire.
*
La douleur t'a réveillé, une putain de lame chauffée à blanc irradiant de ton épaule gauche. L'infirmière charmante est venue voir ce qu'il se passait, a eu un air inquiet, puis est repartie chercher le docteur de garde, qui est venu t'examiner avec le même air inquiet avant de sortir précipitamment. Il est revenu quelques minutes après. Sauf qu'avec le docteur, y'avait un autre mec, à l'air officiel, et ta mémoire a fait tilt quelque part sans que tu saches pourquoi.
L'homme en costard s'est assis à côté de ton lit et a commencé à sortir des papiers, un stylo, tranquillement, lentement, alors que tu sentais les muscles déchirés de ton bras prendre feu sous ta peau. Il a alors ouvert la bouche, parlant dans un anglais guindé et formel.
« Mr Attacks, je me présente, Kanamazu Jirô. Je travaille au service d'immigration du gouvernement. »
Il t'a expliqué des choses que tu ne savais déjà que trop bien. Que ta situation était irrégulière, bien que cela incombe à la malchance, et que maintenant que tu étais en état, il allait falloir qu'on te renvoie hors du territoire, à moins que tu ne désires rester et devenir un résident permanent, auquel cas les papiers étaient juste là, avec une copie anglaise que dont tu pouvais prendre connaissance. Ca a duré une dizaine de minutes puis le docteur a fini par l'interrompre, parlant vite, et l'employé du gouvernement a fait mine de hausser un sourcil avant de revenir vers toi avec un air compatissant tellement faux que t'aurais pu éclater de rire.
« Je suis navré, je vous pensais remis mais votre médecin vient de m'apprendre que votre bras était en besoin de chirurgie reconstructive intensive immédiate... Mais je ne peux autoriser l'opération maintenant que vous avez été officiellement mis au courant de votre transgression, cela causerait de nombreux problèmes légaux pour l'hôpital et j'imagine que personne ici ne souhaite cela. Nous pouvons vous arranger un transfert vers un hôpital en Angleterre sur le champ, si cela vous convient. »
T'avais l'impression que ton bras allait se détacher de lui-même, en pugilat contre ton corps, et t'as regardé ce type comme s'il se foutait de toi. Non, un vol de plus de douze heures ça te convenait pas. Et au médecin non plus, qui est passé à l'anglais cette fois pour t'inclure dans la conversation.
« Le temps du vol il sera trop tard. Si on n'opère pas dans l'heure, il faudra amputer. »
Une peur panique a percé à travers la douleur.
« J'en conviens, mais tant que sa situation n'est pas régulière, je ne peux autoriser l'opération. Il conviendra aux médecins anglais de faire ce qu'il faut une fois là-bas ou pendant le transport. »
Le médecin intègre a repris la parole pour protester mais t'entendais plus rien.
Tu ne pourrais plus mixer avec un bras en moins. Tu ne pourrais plus toucher à un instrument de ta vie. T'as fait un rapide calcul et le résultat était trop foireux et t'arrivais pas à penser correctement. Même avec une prothèse, ce serait plus pareil, ce serait pas assez et de toute façon...
Le Costard a tapoté doucement la liasse de papier et ton attention s'y est posée d'un bloc.
« A moins, bien sûr, que vous n'acceptiez de prendre la nationalité japonaise. En ce cas, je ne verrais plus d'objection à ce que vous soyez admis en soins intensifs sans délais et je reviendrai vous voir lorsque vous serez remis après l'opération, pour que nous puissions finaliser ensemble les procédures de naturalisation. »
Ah les enfoirés.
Tu t'es vaguement demandé si c'était une coïncidence. Que ton bras qui allait bien se soit soudainement mis à te donner l'impression qu'on le passait au chalumeau. Que le docteur de garde n'ait pas été celui qui s'occupait de ton cas d'habitude. Que ce type soit là pile à cet instant, comme par hasard. Qu'on vienne te proposer un ultimatum quand t'avais trop mal pour penser à autre chose que la façon la plus rapide de faire que la douleur cesse.
Ta paranoïa brumeuse a atteint un nouveau cran quand les lèvres du Sir Kanamazu se sont relevées en un sourire satisfait.
« Je vous laisse quelques instants pour y réfléchir. »
Ah les putain de fils de chiennes.
*
T'as rien dit à personne, après coup.
Les mois qui ont suivi, pendant ta rééducation et les séances pour apprendre à utiliser et vivre avec l'exosquelette soutenant ton bras foireux, t’as tenté d’annuler ta naturalisation et de te faire enlever cette putain de puce du crâne. Ton cas a fini comme les nombreux autres cas d’étrangers devenus japonais par erreur ou par coercition impossible à prouver de la dictature en place : t’as dû renoncer. T’avais signé en pleine possession de tes moyens, en sachant dans quoi tu t'engageais même si le choix n'en avait pas été un. Légalement, tout avait été fait comme il fallait.
En sortant de l'hosto, t'as hésité à faire envoyer ton dossier médical à Riley pour qu'elle l'examine et qu'elle te dise que oui, t'avais été dupé, que ton bras était parti en vrille pour une raison autre que naturelle, que tes soupçons étaient fondés. Au final, tu n'en as rien fait. T'avais encore plus peur d'apprendre que le gars du gouvernement ait effectivement été réglo, que t'avais effectivement été à deux doigts de perdre ton bras. Que t'avais personne à blâmer sinon ta chance inexistante.
T’es retourné en Angleterre pour tenter de t’éloigner de tout ça et de reprendre tes esprits et de comprendre ce qui allait changer dans ta vie mais tu faisais que fuir l’inévitable. T’as fini par retourner au Japon quelques semaines après, cette fois tu t’es trouvé un appart définitif et c'est seulement une fois installé pour de bon que t'as envoyé un message à Lulla, à ton père et à Matthew, puis t'as déconnecté ton téléphone pour ne pas avoir à voir leurs réponses avant quelques jours.
T’as commencé le lent processus des five stages of grief, comme on dit. Tu sais pas trop à quel stade t’en es aujourd’hui. Sûrement les cinq en même temps. Tu continues la musique. Tu continues tes enregistrements des vies et des passés de générations en train de disparaître quand tu le peux et tu voyages encore, un peu moins qu'avant. Tu continues de trop sortir et de trop te défoncer et de nourrir ta colère en sourdine, en attente du moindre prétexte pour la balancer à la gueule du monde. Et en même temps, t’apprends à apprécier Tokyo, chose qui t’a agréablement surpris. Maintenant, t’arrives à passer des jours entiers sans trop te morfondre, t’arrives à éclipser la menace qui irradie h24 sous ta peau, à la base de ton crâne et à apprécier ton sort, un peu.
T’as appris les rudiments du japonais par nécessité quand t’étais à l’hosto mais quand on t’aborde, tu fais semblant de rien comprendre, te contentant des oreillettes de traduction en temps réel. Et si ça leur plait pas, tu les emmerdes.
T’as rencontré d’autres personnes qui ont été dans ton cas, piégées ici par les procédures administratives, par leur ignorance ou le chantage. Pour que vous puissiez discuter, pour qu’elles puissent te rassurer ou te conforter dans tes craintes. T’as discuté avec des natifs endoctrinés jusqu’à la moelle se réjouissant pour toi, parce que rien n’était mieux que l’Incontestable, assurément. A ton étonnement, t’as rencontré plus d’insatisfaits que tu ne l’imaginais, aussi.
T’as commencé à aimer jouer pour la vie nocturne du Japon. Une fois par mois, tu publies un nouveau son sur ton site, comportant une clef cryptée dans les notes et les fréquences pour donner le lieu de ton prochain set. Puis t’as commencé à aimer te servir de ta musique pour dénoncer le système, discrètement, en jouant de plus en plus de morceaux mixant les paroles récoltées des anciens du Japon, offrant à la jeunesse la possibilité d’entendre et d’entrevoir un monde qu’ils n’avaient jamais connu mais qui pourrait peut-être redevenir le leur. Le tien. Prendre position politiquement c’est pas un chemin que t’avais prévu dans ta carrière, mais la nécessité et le besoin d’échapper à la fatalité ont fait que. Tu préfères encore te battre contre des moulins à vent que de courber l’échine sans rien dire.


   
The myth

From: Murat To: Panic – you are possibly the most enthusiastic, likable bad influence I've ever met.

From: Chris To: MOM (Riley) – What would you say is a healthy ratio of sex vs. being called a fucking asshole in a relationship?


T’es de ce genre de personne qui pourrait servir de définition ambulante, un avertissement silencieux étalé sur la face, tâchant le bout de tes doigts et laissant des traces sur le bitume que tu foules. Suffirait de foutre ta gueule à côté du mot pour qu’on comprenne l’essentiel.

Connard, n. m. s. : Chris.
T’as depuis longtemps perdu la patience de te perdre en civilité et en ronds de jambes avec autrui et ça fait de toi un enfoiré. Si on te confronte à ce sujet, tu ne nieras pas. Tu diras que oui, c’est vrai, et alors ?
Le pire, c’est qu’on a envie de te trouver des excuses. On a envie de t’aimer malgré tes torts et tes travers ; malgré ta grande gueule et tes grands airs et ce putain de haussement de sourcil peu impressionné qui suinte d’une indifférence hostile face à l’avis des autres. Parce que t’es trop violent ; parce que tu t’emportes trop vite ; parce que ton mot favori reste fuck et toutes ses déclinaisons ; parce que même maintenant, tu continues de boire et de te bousiller le corps à coup de drogue ; parce que t’es un peu une salope prêt à coucher dès que tu t’emmerdes sauf qu’en prime tu charges rien pour la chevauchée. Qu’ils jugent si ça leur plait. Toi, t’as autre chose à foutre.
On a envie de se dire qu’on peut t’arranger, te réparer, que y’a moyen de te sauver. On a envie de se dire que tu fais pas exprès, qu’après tout t’es pas né comme ça, qu’un jour t’as été un gosse gentil et généreux et aimant et que tu pourrais le redevenir. Mais c’est des conneries, un besoin hypocrite, un besoin viscéral de faire de toi quelqu’un de bien pour s’acheter une bonne conscience.
Tu leur pisses à la raie, à ces héros et à ces héroïnes.

Dépendant, adj. m. s. : Chris.
Pourtant, suffit de t’observer un peu pour voir qu’aussi sûr et fort que tu parais, t’as toujours dépendu des autres. T’as toujours eu besoin des autres. T’as ce gouffre affamé au fond du corps qui te pousse à chercher leur validation, leur approbation et leur affection. Même aussi proche de la trentaine, t’es encore qu’un gosse effrayé à l’idée d’être abandonné. Alors tu te trouves d’autres addictions pour compenser. Des amourettes, des plans cul, des drogues douces, des drogues rêches et calleuses. Tu préfères encore te mettre quelqu’un à dos et foutre en l’air ce que vous avez que d’être ignoré. Si on t’aime, c’est que t’es là. Si on te déteste, c’est que t’existes.

Gamin, n. m. s. : Chris.
Les abus t’ont fait grandir trop vite donc t’es devenu un adulte incomplet, cachant le môme apeuré et émerveillé qui vit encore derrière tes yeux. Mais comme ils sont souvent cachés derrière des lunettes de soleil, t’abritant de la lumière trop vive du jour pour ta gueule de bois ou dissimulant à moitié un cocard, y’a pas grand monde qui le remarque, ce gosse.
T’as encore cette manie de manger ta bouffe en ordre. Ce que t’aimes le moins d’abord, le meilleur pour la fin. T’as encore cette capacité à te prendre à des jeux simples. T’adores la magie, tu trouves ça dingue. Tu peux t’entêter obstinément dans une conversation juste pour prouver que ton point de vue est meilleur que celui de la personne d’en face. Tu tombes amoureux régulièrement, trois fois par jours, d’une personne à la fois ou de plusieurs en même temps, de personnes âgées, d’hommes, de femmes et d’entre deux. T’aimes de manière éphémère et sincère, et même s’il t’est arrivé d’avoir quelques relations dépassant les deux mois, c’est rarement allé plus loin. Ca t’épuise d’aimer trop de personnes à la fois et il y a déjà des gens irremplaçables dans ta vie à qui tu as laissé trop de petits morceaux de toi-même. Tu réponds aux messages avec des titres de chansons quand tu t’emmerdes et plus ça agace la personne en face, plus tu t’amuses. Tu commences régulièrement des concours de grimaces avec des enfants croisés dans le métro ou dans des restaurants et tu te vexes pour des choses insignifiantes mais qui te tiennent à cœur. Tu boudes pas, mais presque. Et surtout, t’as peur du silence et du vide, alors tu laisses toujours de la musique jouer. Quand t’es dehors, quand t’es chez toi, tout le temps. Il te faut un bruit de fond permanent en guise de veilleuse pour tenir les monstres à l’écart et les faire déguerpir de sous ton lit.

Haine de soi, n. f. s. : Chris.
Elle, c’est le pire de tes monstres. Depuis le temps, c’est devenu comme une vieille amie secrète dont tu parles avec personne sinon avec toi-même. Si y’a une raison à tes comportements autodestructeurs, elle est là. Si y’a des questions quant à ton manque de confiance dans les autres et les murs que tu dresses pour t’en protéger, elle aura les réponses. Si y’a une source à tes angoisses et à tes craintes de pas être assez, de pas suffire, d’être trop minable pour mériter tes rares proches, c’est elle, et elle est intarissable. Une vraie connasse. Un peu comme toi.

   
The legend

From: Ryan To: Love – Haha. I have a resting bitch face. He has a I want y'all to die face. It's a subtle difference.

From: Chris To: Lullabae – He took off my shirt and said 'oh my god the legends are true'.


Ton tatouage ne passe pas inaperçu. T’en es fier. Il t’a coûté une blinde, beaucoup de souffrance et une capacité à inventer des insultes fleuries. Il te part de là haut, de la base de la nuque, sous l’endroit où t’as griffé ton cuir chevelu au sang quand t’as appris qu’on t’y avait mis une puce, jusqu’au creux des reins. Sa particularité, c’est qu’il est mixé à des encres nouvelles générations, qui mêlent des nanoparticules réagissant à la lumière pour éviter que les couleurs ne se fadent, et à des lames de métal chirurgical souple comme on utilise pour les prothèses, qui te passent sur les épaules et s’achèvent sous tes clavicules. C’est pas encore prouvé que l’un comme l’autre ne soit pas nocif pour la santé mais tu t’en fous. T’es plus à ça près et si tu le voulais ainsi, t’avais tes raisons et t’en démordrais pas. Et t’as cette allure qui fait qu’on évite de te contrarier.
T’es peut-être pas très grand, du mauvais côté du mètre soixante-dix, mais tu compenses avec un corps sec, aux muscles noueux forgés par le manque de repas réguliers et l’obligation de te dépenser pour évacuer les trop plein d’énergie. Sinon t’es tendu comme un arc. Pas si différent d’un serpent, sinueux, silencieux, prêt à détendre ses anneaux et à frapper à la gorge, crocs en avant. Ton frère aurait dit que tu ressembles plutôt à ces fauves en embuscade dans les grandes herbes de la brousse, avec tes yeux ambre et tes cheveux aux reflets miels. Il n’aurait pas spécialement tort mais ce serait les seules similitudes, la tignasse et l’aura féline et insidieuse de puissance latente. Pour le reste, t’as la peau trop claire pour que l’image te semble plausible. Un lion avec des tâches de rousseurs qui lui bouffent la moitié du corps on n’a jamais vu, c’est bien pour ça qu’ils vivent pas en Angleterre.
Tant qu’on ne fait pas attention à toi, tu n’as rien de vraiment remarquable. Tu sors de l’ordinaire au Japon mais il y a tellement d’étrangers et de personnalités plus hautes en couleurs que tu te fonds dans la masse. Mais l’exosquelette autour de ton bras et de ta main gauche, ça par contre, ça fait hausser quelques sourcils. Les gens s’habituent encore à ce type de prothèse qui, plutôt que de remplacer un membre, s’y intègre pour en soutenir les muscles défaillants. L’avantage, là encore, étant qu’à Tokyo ce genre de choses n’a rien de trop étrange. En Angleterre, l’histoire serait différente. Non, ici, ce qui fait qu’on te dévisage c’est plutôt les cicatrices, pâles et rugueuses, faisant tâche dans cette population à peau lisse et sans imperfection. Elles sont pourtant pas si voyantes, des coupures ici et là, de la peau s’étant déchirée sous un coup trop fort ou sous une putain de bague ou un tesson de bouteille, mais elles parlent suffisamment fort quand on te jette un coup d’oeil. Tu t’en plains pas. Ca ne sert qu’à renforcer l’allure sauvage que t’embarques avec tes fringues et la moue constamment agacée de tes lèvres sèches et craquées autour de tes clopes. Ca fait qu’on te fout la paix dans la rue, tu demandes pas plus.

   
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Mar 21 Mar - 20:19
Oh mon dieu, l'avatar sublime, quoi. Choqué, outré de ton talent.
CJA  200_s
C'est magnifique. Ah et bienvenue! Bonne rédaction.
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Mar 21 Mar - 20:56
Parce que j'ai des goûts douteux en jeu de mots :

CJA  Large

VOULAAAAA pour le jeu de mot beurk -- du coup bienvenue (je viendrai baver sur ton vava et son tatouage de malade en cachette  :*shizu*: )

Au pire dessine moi un mouton CJA  1534650057 (Pas ma faute, le bus qui devait me supprimer a été annulé u__u )
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Mar 21 Mar - 22:36
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Mar 21 Mar - 23:25
... .___. .... B'jour... Bienv'nu....

*Est pas du tout jaloux du talent artistique de Chris.*
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Mar 21 Mar - 23:45
JE CROIS QUE JE SAIS QUI T'ES

J'EN SUIS MÊME SÛR À 30% woah trop génial

MAIS JE VAIS PAS LE DIRE

DONC BIENVENUE :*roxy*:

CJA, ça fait trop penser à CCA Bah quoi, t'as cru que j'alais te parler de la CIA aussi ?
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Mer 22 Mar - 0:17
Sorry not sorry:
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Mer 22 Mar - 1:23
how dare u
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Mer 22 Mar - 3:02
C JAmais assez hein, toujours plus de skill.

Bon Chrichri, la fiche a intérêt à être à la hauteur, que je puisse fanboyiser comme une pisseuse devant Julian Bieber en paix.

Promis je te mets pas la pression. lel.

Nan t'inquiète, çAttackseptera comme tu es dans mon cerveau qui bave du liquide céphalo-rachidien tellement c'est la PLS générale.

Diantre. C'est soit toi soit l'heure, mais ça me fait penser et dire de la merde tour ça CJA  1534650057
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Mer 22 Mar - 3:55
Cette excuse. Fais genre c'est l'heure, tu sais que t'es flustered as fuck. CJA  2078551763
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Mer 22 Mar - 13:15
Bienvenue ! :*roxy*: Je viens baver ici comme beaucoup de monde o/
Je mise plus que Kamil, je pense être sûr à 99% de qui c'est ! Le risque 0 n'existe pas ! J'veux une récompense si j'ai raison !
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Mer 22 Mar - 16:55
"C'est soit toi soit l'heure", laisse-moi te donner un indice bb, c'est pas l'heure. CJA  719878181
Shun - Récompense de rien du tout ouais. CJA  1534650057
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Jeu 23 Mar - 10:57
Bienvenue ^^
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