Kazuma Nakashima

Douce matinée de février. Légère brise qui berce les arbres en une lente danse. Un silence agréable. Ou presque. Au loin, les premiers cris d’un petit être rompent la paix apparente. Un petit être fragile, vulnérable et qui, pourtant, apprendra à être fort. Parce qu’il a vu le jour dans une famille puissante, exigeante, où les faibles n’ont pas leur place : Les Nakashima.
Il apprend vite, Kazuma. Il n’en a surtout pas le choix. Sur ses épaules frêles pèsent les attentes de ses parents. Attitude exemplaire, Bonnes manières, Contrôle de soi, Discipline, Excellence, Force... L’alphabet pourrait être revu selon les principes des Nakashima. Aucun faux pas n’est autorisé. Il doit paraître parfait, à l’image de ses ascendants.
Ses résultats scolaires sont bons, mais ce n’est toujours pas suffisant aux yeux de papa-maman. Il faut qu’il atteigne des sommets, qu’il fasse partie de l’élite. Il redouble d’efforts mais accumule certaines lacunes en lecture et en écriture. On le diagnostique rapidement dyslexique ; particularité commune pour ses professeurs ; tare honteuse pour ses géniteurs.
C’est donc pour compenser ce défaut que Kazuma développe un esprit compétitif, ainsi qu'un certain ego qui le pousse à vouloir être le meilleur dans tout ce qu’il entreprend. Cependant, il ne récolte toujours que les regards déçus de sa mère et les propos dédaigneux de son père qui soulignent uniquement ses échecs, ignorant ses réussites.
Il tisse, dès ses plus jeunes années, des liens avec son cousin Kintaro qu’il considère rapidement comme son seul allié dans ce monde d’adultes impitoyables. S’ils apprennent très tôt à se soutenir à toute épreuve, une grande complicité naît également entre eux. Surtout lorsqu’il s’agit de braver les interdits...
Partenaires de jeux mais surtout de bêtises, les cousins Nakashima se sentent puissants ensemble et ils en profitent. Ils comprennent très tôt que le secret pour ne pas s’attirer d’ennuis c’est la discrétion et la subtilité. S’ils parviennent à conserver l’apparence d’enfants -presque- parfaits auprès de la famille et des professeurs, il n’y aurait pas de répercussions. Auprès des autres enfants, ils deviennent très tôt des figures à la fois respectées et redoutées.
Les années défilent lentement. Un quotidien millimétré s’installe dans le foyer Nakashima. Chacun a trouvé sa place dans la famille et rien ne semble pouvoir perturber cet équilibre. C’est en tous cas ce que pensait Kazuma… Jusqu’à ce qu’une journée ordinaire soit perturbée par une demande particulière de l’Incontestable. Une demande que ses parents avaient déjà reçue de nombreuses années auparavant et qui avait été à l’origine de sa naissance. La famille allait donc encore s’agrandir.
Intégrer qu’une petite soeur allait lui dérober sa place d’enfant unique n’est pas évident pour le garçon. Il craint qu’elle soit l’enfant dont ses parents rêvent et qu’elle devienne la favorite. Il est sur le point de souffler ses dix bougies lorsque Shina pousse son premier cri et il la considère immédiatement comme un danger potentiel, une rivale au trône de l’enfant roi. Et il a raison de s’en méfier, Kazuma. Elle ne possède aucune tare, elle. Elle est jolie, intelligente, éveillée. Quelle fierté pour leur père et mère. Quel fléau pour son frère...
Néanmoins, il ne montre rien de cette hostilité qui croît envers sa soeur. Il se doit d’être un enfant exemplaire, un modèle pour sa cadette et c’est ce qu’il s’efforce de laisser percevoir. Il garde en lui sa rancoeur, sa jalousie et puise dans ces émotions pour se dépasser, dans l’espoir de recevoir un peu d’attention de la part de ses parents.
En vain. Kazuma passe au second plan et ça lui est insupportable. Il s’applique toujours autant à l’école, pourtant. Il tente d’obtenir les meilleurs résultats scolaires possibles, il se montre déterminé, digne et discipliné auprès des adultes. Mais ce n’est toujours pas suffisant. Alors, il évacue la pression en devenant détestable auprès des camarades qu’il juge méprisables.

Adolescent, il développe le côté plus sombre des Nakashima. Cette soif de reconnaissance, de pouvoir, de puissance l’obsède. Il refuse de devenir le minable de la famille, le laissé-pour-compte. S’il n’obtient rien de cela auprès de ses parents qui préfèrent centrer toute leur attention sur leur fillette exceptionnelle, il se rapproche d’un de ses oncles qui lui accorde de l’intérêt.
Motivé par ce nouveau mentor qui veille sur lui, ses résultats scolaires s’améliorent. Sa confiance en lui également. Lorsqu’il obtient son certificat de fin d’études, son dossier ainsi que le porte-monnaie de papa-maman lui permettent d’intégrer une école privée en sciences politiques. Il attira alors davantage l’intérêt de son oncle qui voit en lui des possibilités que Kazuma ignore encore.
Brillant étudiant, il se révèle surtout dans les modules de droit. Il s'y découvre un véritable intérêt, mémorisant scrupuleusement ses cours et apprenant rapidement à jouer avec les vides juridiques et les ambiguïtés afin d’obtenir gain de cause quoi qu’il arrive.
Il s’imagine déjà devenir un brillant avocat, redouté par ses compères. Un véritable requin qui ne ferait qu’une bouchée de ses adversaires. Il s’interroge même sur le fait d’obtenir le concours, une fois plusieurs années d’expérience acquises, afin d’évoluer en tant que juge. Il se spécialise alors dans la voie juridique, au détriment de celle politique.
Toutefois, ce n’est toujours pas satisfaisant pour ses parents qui considèrent ces études en sciences politiques comme une chance d’obtenir plus de pouvoir, plus de puissance et d’atteindre le sommet de la pyramide. D’un ton dédaigneux ils lui rabâchent que s’ils avaient su qu’il manquerait autant d’ambition, ils auraient simplement dû l’inscrire en faculté de droit avec les autres êtres médiocres de son espèce.
Il garde son calme, Kazuma. En apparence, du moins. Pourtant, il se surprend régulièrement à rêver de pouvoir obtenir leur silence une bonne fois pour toutes. Il s’éloigne considérablement d’eux, les éternels insatisfaits, préférant l’intérêt que lui accorde son oncle.
Oncle qui commence peu à peu à lui demander des conseils juridiques pour sortir certaines de ses connaissances de situations douteuses. Fraudes fiscales, trafics, violences, proxénétisme... Il aime se faire l’avocat du diable, il prend un malin plaisir à trouver un moyen de les sortir de l’embarras et bientôt son nom commence à se faire connaître auprès des Yamaguchi-gumi.
Nouveau diplômé, il n’a aucune difficulté à trouver un premier emploi dans un cabinet d’avocat grâce à ses excellents résultats. C’est ainsi qu’il acquiert officiellement de l’expérience. Officieusement, c’est auprès des fameuses connaissances de son oncle appartenant à la famille Yamaguchi-Gumi qu’il se familiarise avec le métier.

Les années défilent, les affaires s’enchaînent. Alors qu’il commence à se faire un nom, il se positionne aux côtés d’un membre important des Yamaguchi-Gumi pour le défendre lors d’un procès. Leur victoire marque un tournant dans la vie de Kazuma.
On lui propose de rejoindre les Yamaguchi-Gumi et de faire ses preuves afin de devenir le Shingiin officiel de la famille. Il n’hésite pas une seule seconde et accepte la proposition. Il obtient auprès d’eux la reconnaissance qu’il n’a jamais reçu de ses parents et devenir yakuza représente pour lui -et pour une grande partie des Nakashima- obtenir du pouvoir et de la puissance. Cette opportunité lui permet alors d’accéder à ses plus profonds désirs.
Yakuza à vingt-sept ans passés, le regard de sa famille évolue. Est-il enfin devenu un Nakashima assez digne ? Pas sûr. Pourtant les commentaires dédaigneux et les regards méprisants cessent. La cadette fanfaronne un peu moins, également. Leur présence devient donc plus supportable.
Au contact des Yamaguchi-Gumi, il apprend réellement ce que le terme “loyauté” signifie. Les notions de devoirs, de famille, de fidélité, de respect des règles deviennent plus concrètes pour lui. Ça le rapproche davantage des Nakashima même si une certaine distance est encore de mise avec ses géniteurs.
Un pied chez les Yamaguchi-Gumi, l’autre chez les Nakashima, il tâche de pouvoir assumer ses deux rôles. Il est conscient qu’il doit se montrer dévoué et digne de confiance auprès de sa nouvelle famille comme auprès de l’ancienne. Notamment avec son oncle qui a été d’un soutien indéfectible et avec son cousin qui représente toujours un précieux complice.
Travail acharné toujours paie. C’est ce que ses parents lui répétaient depuis son enfance et il se doit d’admettre qu’ils n’avaient pas tort sur ce point. Il se donne corps et âme afin de pouvoir faire sa place au sein des Yamaguchi-gumi. Son parcours scolaire ainsi que son nom aident également à gagner la confiance de l’Oyabun qui voit en lui beaucoup de potentiel.
En quatre ans il devient un membre très impliqué de la famille ainsi que le Shingiin officiel. Il est sur tous les fronts, défendant bec et ongle chaque accusé des Yamaguchi-Gumi. On vante ses talents pour parvenir à sortir d’affaire les cas les plus désespérés, même s’il ne peut pas sortir vainqueur à tous les coups.

Depuis son plus jeune âge, Kazuma est préparé à suivre le système de l’Incontestable sans jamais récuser ses ordres et devoirs. Cependant, il devra attendre ses trente-deux ans avant d’avoir à mettre en pratique ce conditionnement. Sur sa lettre rose apparaît le nom de celle qui partagera désormais sa vie. Ayame Ogura.
Elle est disciplinée, docile et douce. Elle ne lui cause pas d’ennuis et c’est tout ce qui lui importe. Les mois s’écoulent sans qu’il n’ait à se préoccuper d’une quelconque rébellion de la part de l’épouse. Elle est perspicace et comprend assez rapidement que pour la paix du ménage, elle a intérêt à suivre les exigences de son mari. Peu à peu, sans qu’il ne le réalise, un certain attachement les lie.
Véritable foyer modèle, il ne manque qu’un détail aux yeux de l’Incontestable. Détail qui est vite arrangé par le système qui les invite à agrandir la famille. Le 12 Mars 2107, le ciel est empli de nuages. Les gouttes de pluies glissent lentement sur les fenêtres de la maternité. Grise journée qui demeure pourtant la plus belle aux yeux de Kazuma car il s’agit de la naissance de son fils, Hideaki.
Octobre 2109. Un bouleversement se profile chez les Nakashima. C’est d’abord un tremblement de terre qui fait trembler Tokyo. Plus de peur que de mal. Quelques dégâts matériels sont à déplorer mais cela n’a aucune importance. Non, aucune importance comparé à la suite des événements. C’est la vague qui viendra frapper de plein fouet cette famille, brisant les côtes du bambin, blessant au visage le papa et emportant à tout jamais la maman.
Il est fort Kazuma. Malgré la douleur que représente le décès de sa femme, il se reprend rapidement. Il reste le pilier de cette famille. Stable, inébranlable. Il recentre toute son attention et son affection sur cet enfant qui a également beaucoup souffert de la catastrophe. Au fil des mois, ils parviennent à réinstaurer un quotidien agréable et rassurant.
Rien de plus qu’une petite grippe. Ce sont les mots du médecins qui tente de rassurer le papa sur l’état de son fils. Mais il se trompe, il s’agit en réalité de l’épidémie qui touche le Japon durant l’été 2111. L’équipe médicale le réalise rapidement mais se retrouvent complètement dépassés par la situation. Le garçon ne soufflera jamais sa cinquième bougie.
Shukumei a emporté cette épouse qu’il avait appris à chérir, l’épidémie a eu raison de cet enfant précieux... Kazuma s’efforce de garder contenance coûte que coûte en présence de ses familles. Pourtant, il est conscient qu’il est marqué bien au-delà des cicatrices sur son visage. Sera-t-il prêt à endosser les responsabilités qu’impliquera la réception d’une nouvelle lettre rose ?..

Il semble calme, Kazuma. Il ne hausse pas le ton, ne paraît pas fâché, ne s'emporte pas. En réalité, il est aussi paisible qu'un crocodile. Il n'émet aucun son, il observe, analyse et lorsqu'il vous prend pour cible, il est impossible de prévoir à quel moment il va surgir pour vous faire payer vos offenses. Il s'approche lentement, calcul son angle d'attaque et quand il se sent prêt, le piège se referme sur vous sans que vous puissiez vous en dépêtrer. Parce que, rancunier comme il est, il n'oublie jamais vos dettes.

Il semble amical, Kazuma. Ouvert, souriant, charmant, au premier abord on lui donnerait le bon Dieu sans confessions. Mais ne vous y méprenez pas. Il ne s'agit que d'un masque. Derrière cette façade se cache un tout autre visage beaucoup moins agréable. En bon Nakashima, il vous juge sévèrement, ne tolère aucun faux pas de votre part et vous le fait parfois remarquer, toujours un sourire -sarcastique- aux lèvres.

Il semble serviable, Kazuma. Toujours prêt à aider, à rendre service. Si vous faites partie des Yamaguchi-gumi ou des Nakashima, il se proposera volontiers, sans arrières-pensées car il se doit d'être loyal envers les siens. Cependant, si vous n'en êtes pas un, soyez sûr que vous lui serez redevable. Il n'est pas mère Teresa, il vous tendra la main uniquement dans son propre intérêt.

Il semble droit, Kazuma. Avocat, travailleur acharné, ambitieux, discipliné, il aurait presque l'air d'un honnête citoyen… Lorsqu'on ignore qu'il défend les crimes et délits des Yamaguchi-gumi et que ce sont leurs règles et rites qu'il suit à la lettre. Contrairement à la majorité des Nakashima qui sont prêts à tout pour arriver à leurs fins, lui suit scrupuleusement le code d'honneur de son clan. Il refuse par dessus tout de décevoir l'Oyabun et de ne pas être à la hauteur de sa confiance. Il en est de même avec les devoirs de l'Incontestable, il obéira quel que soit l'ordre donné. Se retrouver en cellule représenterait un immense déshonneur pour lui, sa famille et son clan. Il ne tolère alors aucune résistance ou rébellion de la part de la personne que lui assigne le système.

Kazuma provient d’une lignée où la mixité semble être absente. Il a hérité de traits asiatiques et il en est très fier. Ses yeux bridés, aussi obscur que l’onyx, rappellent la noirceur de ses cheveux. Loin de la coupe impeccable et du visage rasé de près des Nakashima, il laisse sa pilosité s’exprimer. Au grand dam de sa mère qui a toujours exigé qu’il soit parfaitement apprêté. Ses cheveux lisses arrivent à longueur d'épaules. Il les attache régulièrement pour se donner une apparence plus formelle, notamment dans le cadre professionnel.  Sa barbe forme un collier entretenu.

Sa peau est pâle, laiteuse, sensible au soleil. Elle contraste avec ses nombreux tatouages colorés dans le dos, sur ses bras -signes d'appartenance à son clan- ainsi que ses vêtements noirs, couleur sobre et classe en toute occasion. En terme de style vestimentaire, il ne fait pas dans l'extravagance et la fantaisie. Il opte généralement pour une chemise coûteuse, une veste hors-de-prix et un pantalon de costume, accompagnés de chaussures de ville cirées.

Depuis qu'il fait partie des Yamaguchi-gumi, il suit un entraînement strict, pour atteindre une très bonne forme physique afin de pouvoir se défendre ou porter secours aux siens s'il le doit. Les heures passées à la salle ou au dojo, lui ont donc permis de prendre de la masse et surtout, de la force. S’il n’est pas très grand -un mètre soixante-treize tout au plus- il est assez imposant avec ses quatre-vingt trois kilos de muscles.

Shukumei n’a pas seulement laissé sa trace dans l’esprit de Kazuma mais également sur son corps. Il a manqué de perdre un oeil mais, par chance, il n’a gardé que des cicatrices sur son visage.