— Just Married —
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16/05/2021
Birdie Bradshaw

Birdie "Baby" BRADSHAW
"And when morning comes, the sun is gonna shine."
![]() | sweet, sweet babydoll Nom ;; Bradshaw. Prénoms ;; Birdie, mais ne vous y risquez pas. Âge ;; 29, 30.08.2083 Genre ;; Femme, au cas où vous auriez encore des doutes. Origines ;; Japonaise, origines éparses. Activité ;; Étoile, à temps complet. Sexualité ;; Homosexuelle. Avatar ;; OC de mes petites mains (merci Zach pour le graph olala ![]() ![]() ![]() Règlement ;; Validey - Ari Chemin ;; j(t)m jm Commentaire ;; BUTCH T OU JE T'ATTENDS ![]() |
Love me, love me. Say that you love me.
Plumes et apparats en bas de soie, elle remonte ses longs gants comme si de rien n’était. La scène est toute à toi, chérie des cœurs et enfant favori de la fortune. Les lumières coulent comme une seconde nature sur sa peau lactée, la parant d’une nuée de diamants aux yeux de toute cette foule éblouie. Le succès l’embrase, l’attention comme drogue et la scène en toile immaculée. Deux pas mesurés en talons aiguille que l’on fait traîner, que l’on retient jusqu’à poser pied à terre. Un, deux.
Un, deux.
Le tintement des stilettos résonne dans tous leurs grands yeux envieux. Et ils oscillent légèrement au fil de ces hanches qui ondulent jusqu’au milieu de l’estrade. Finies les discussions grasses, les éclats de rires qui tonnaient à en faire tomber les coupes de champagne. Un silence ténu, teinté de frémissements et de murmures furtifs. Tapis rouge d’admiration pour l’adorable créature qui vient les honorer de sa beauté. Elle agite légèrement son boa duveteux dans un sourire mutin, commence à tirer sur chacun des doigts de son long gant blanc. Cet effet, elle le connait par cœur. Et eux, en bas, ils suivent avec attention le moindre de ses gestes, retiennent à peine les films éhontés qui prennent place dans leurs esprits. Elle se voit dans leurs fantasmes, dans leurs regards brumeux et leurs expressions extatiques. Elle sent leurs mains dans ses boucles, pâles dans le feu qui les consume. Elle lève les yeux, feint de les admirer tandis qu'ils la toisent de toute leur fierté paternaliste. Elle les regarde, les fixe, se rit de leur bonne fortune.
Et n’en sourit que de plus belle.
La tension monte. Gants, chaussures, bas. Au moment du porte-jarretelle, ces messieurs bien intentionnés sont aussi transparents que les verres qu’ils serrent pour se donner une contenance. Chorégraphie maîtrisée, grâce incroyable, elle se nourrit de leur envie tandis qu’ils jouissent de sa jeunesse. Nue sur scène, ou si peu. La Vénus d’un soir dissimule ses atouts sous quelques mèches audacieuses, continue d’aguicher et d’exciter son audience. Regardez, messieurs. Admirez.
Dévorez ce que vous ne pourrez jamais toucher.
Un, deux.
Le tintement des stilettos résonne dans tous leurs grands yeux envieux. Et ils oscillent légèrement au fil de ces hanches qui ondulent jusqu’au milieu de l’estrade. Finies les discussions grasses, les éclats de rires qui tonnaient à en faire tomber les coupes de champagne. Un silence ténu, teinté de frémissements et de murmures furtifs. Tapis rouge d’admiration pour l’adorable créature qui vient les honorer de sa beauté. Elle agite légèrement son boa duveteux dans un sourire mutin, commence à tirer sur chacun des doigts de son long gant blanc. Cet effet, elle le connait par cœur. Et eux, en bas, ils suivent avec attention le moindre de ses gestes, retiennent à peine les films éhontés qui prennent place dans leurs esprits. Elle se voit dans leurs fantasmes, dans leurs regards brumeux et leurs expressions extatiques. Elle sent leurs mains dans ses boucles, pâles dans le feu qui les consume. Elle lève les yeux, feint de les admirer tandis qu'ils la toisent de toute leur fierté paternaliste. Elle les regarde, les fixe, se rit de leur bonne fortune.
Et n’en sourit que de plus belle.
La tension monte. Gants, chaussures, bas. Au moment du porte-jarretelle, ces messieurs bien intentionnés sont aussi transparents que les verres qu’ils serrent pour se donner une contenance. Chorégraphie maîtrisée, grâce incroyable, elle se nourrit de leur envie tandis qu’ils jouissent de sa jeunesse. Nue sur scène, ou si peu. La Vénus d’un soir dissimule ses atouts sous quelques mèches audacieuses, continue d’aguicher et d’exciter son audience. Regardez, messieurs. Admirez.
Dévorez ce que vous ne pourrez jamais toucher.
Look out Sunshine, here's the punchline
***
3
- Fingers in the nose:
Aujourd’hui j’ai fait une bêtise.
Yoko’nee-chan m’a mise au coin.
Mais c’est pas ma faute.
Promis sur le petit doigt que c’est pas ma faute.
C’est Ume qu’a commencé. Elle m’a volé ma peinture. J’aime pas quand on me vole ma peinture après j’ai plus assez de couleurs et j’aime pas quand y a pas assez de couleurs.
J’adore les couleurs.
Mais quand je lui ai tiré les cheveux pour qu’elle rende Yoko est venue et j’ai été punie.
Mais du coup elle a pas eu le choix, elle m’a rendu mes couleurs.
Et j’ai pu du coup peindre Okaa-san, j’ai aussi pu peindre Otou-san, et puis Inari, Ama aussi, y a Rai et Shin, puis Wi’am. Et puis moi !
Et c’est plein, plein, plein de couleurs partout !
Même si quand on mélange tout ça fait caca d’oie et c’est vraiment moche.
Et du coup, là, bah j’attends Maman. Elle devait passer quand la cloche sonne mais là j’ai plus d’amis dans la cour alors je l’attends à la grille avec la maîtresse.
J’aime bien voir passer les grands, peut-être que moi aussi quand je serai grande je pourrai sortir toute seule. Mais là Maman veut pas. Et puis je lui ai jamais dit, parce que je lui dis toujours que je veux sortir comme mes copines, mais j’ai un peu peur d’aller dehors. C’est trop grand. Je préfère la grille.
« Bi-ru-di, regarde, ta maman vient d’arriver ! »
Ah, la maîtresse a raison, je reconnais la voiture ! Ah, mais y a plus de place, je la vois avancer pour s’arrêter plus loin alors je cours et j’échappe à la maîtresse pour la rejoindre. Désolée maîtresse !
J’ai du mal avec la porte, j’ai failli la prendre dans la figure quand Shin me l’a ouverte. J’essaie de monter, il me la referme juste devant le nez. Eh.
« Shin ! Laisse ta sœur monter dans la voiture ! Non mais oh ! »
J’ai pas pleuré. Je jure j’ai pas pleuré. Sur le petit doigt.
Et je monte dans la voiture, toujours sans pleurer.
« Maman ! je lui dis. Maman, tu sais ce que j’ai fait aujou-
- Maman ! William il a mis ses doigts dans le nez d’Izanami !
- WILLIAM ! »
J’essaie de m’attacher mais la ceinture est trop dure à tirer alors j’essaie de demander à Shin mais il se moque comme d’habitude. Bon, tant pis.
« William, arrête tout de suite, on avait dit quoi tout à l’heure ? MH ?
- Mais maman j’ai rien fait, c’est Shin il dit n’importe quoi tout le t-
- Nan maman je te jure je l’ai vu faire il lui pince le nez et après il- »
Maman se retourne et leur fait les yeux noirs qui les fait s’arrêter tout de suite. J’essaie.
« Maman, je lui redis. Maman, aujourd’hui j’ai- »
Mais y a ça dans son siège. Ça qui commence à pleurer. Je les aime pas.
Je les aime pas et en plus ils pleurent tout le temps alors je les aime encore moins.
Et puis Wi’am vient de lui pincer le pied juste quand je parlais. Je l’aime pas. Lui non plus je l’aime pas.
« Maman, je lui re-redis. Regarde Maman-
- Tais-toi, Birdie. Les garçons ! Arrêtez tout de suite votre cirque sinon je vous laisse sur le trottoir et vous rentrez à pieds ! »
Bien sûr ils n’arrêtent pas. Moi, si.
Bon, tant pis.
Peut-être la prochaine fois.
C’est toujours pour la prochaine fois.
***
5
- Freedom Seeker:
« Tiens Birdy-Bird, tu veux pas aider papa et aller me chercher du pain ? Tu serais un ange. »
C’est la première fois que papa m’envoie dehors. La toute, toute première fois. Il me dit toujours que je suis une grande fille, et c’est vrai. Tout le monde me traite comme un enfant mais ils savent pas que moi aussi je suis grande. Et là je vais dehors. Toute seule. Pas avec Wi-y-am ou Shin, non. Comme une grande.
Les rues ont l’air différentes, tellement plus larges. Les immeubles semblent beaucoup plus hauts. Si je veux je peux m’arrêter. Et repartir en courant. Aller à droite et prendre un chemin plus long. Passer par la gauche et retrouver le raccourci par-dessus les bennes à ordure. C’est comme ça que Shin et Wi-y-am m’ont semée la dernière fois.
Je les déteste. Je les ai toujours détestés.
Et puis il y a les deux. Maman est toujours après eux. Tout le temps. Et quand elle ne l’est pas, ils n’ont qu’à pleurer pour qu’elle vienne. Moi, quand je pleurs, elle me dit qu’il faut pas pleurer. Eux, ils sont deux, ils crient plus fort.
Et moi je suis toute seule.
J’aime bien l’école. Je préfère l’école, même si la rentrée d’avril me fait peur. Je sais pas si je vais pouvoir retrouver mes copines, elles sont gentilles. J’aimerais bien, mais maman m’a dit qu’il ne fallait pas compter dessus. Alors j’ai quand même compté mes copines. J’avoue je n’ai pas trop compris.
Et normalement, si là je tourne à gauche, il y a la boulange- ah. Euh. La boulangerie ? Elle est pas là ? Je tourne sur moi-même, peut-être que je me suis trompée de trottoir. Mais normalement on passe toujours par là avec maman. C’est vraiment pas ici ? C’est pas possible. J’aurais dû prendre le raccourci. Je suis où ?
Je suis perdue ?
Je sens les larmes qui montent mais il faut pas pleurer, il faut pas pleurer. Aïe aïe aïe, j’ai les yeux qui brûlent. Pas pleurer. Je fais quoi ?
Je veux voir maman.
Elle est où maman ?
« M… M-Ma… »
J’ai sangloté. Sangloter c’est pas pleurer, hein.
Je sanglote parce que je pleure pas.
Je sais pas comment rentrer chez moi j’ai oublié.
« Bah alors ma petite, commence une dame qui passe à côté de moi. Tu es perdue ? Qu’est-ce que tu fais ici, où sont tes pa-
- Birdie ! »
Je pleure toujours pas mais ça aurait pu si Rai n’arrivait pas à ce moment-là à vélo. Rai, c’est le plus gentil. Lui, par contre, je l’aime bien. Il me donne toujours des bonbons quand maman regarde pas et en plus il crie sur Wi-y-am quand il m’embête. Bon, par contre pas Shin, mais c’est toujours ça non ?
J’aime bien Rai.
Je suis contente de le voir. Il va me ramener à la maison.
« R-Ra-i… »
Bon. Je pleure.
C’est plus fort que moi.
Même s’il faut pas pleurer, c’est pas bien.
« Hey Bee, t’inquiète pas tout va bien ! T’as mal quelque part ? T’as faim ? T’allais où comme ça, y a pas papa avec toi ? T’es toute seule ?
- B-Baah c’est… c’est que je devais aller ch-chercher du pain… du pain, mais…
- Tu t’es perdue c’est ça ? »
Je dis oui avec la tête parce que j’arrive plus à parler parce que je pleure comme un bébé. Et je suis pas un bébé, je suis une grande fille. Mais ça va, c’est Rai. Rai, il sait que je suis grande. Et il dit toujours que c’est pas grave de pleurer.
« Allez Bee, ça va aller. Viens, je t’emmène à la boulangerie. Je dirai à p’pa que t’as tout fait solo et que je t’ai croisée sur le chemin du retour. Ça te va ?
- Vr… ai ? Tu… Tu vas pas d-dire que… que…
- Mais non, tu m’as pris pour une balance ou quoi ? Promis je lui dirai rien. »
Je respire comme maman m’a appris. Un, deux, trois, quatre. Un, deux, trois, quatre. Ça finit par aller mieux. Il m'installe sur le guidon de son vélo.
« Sur le petit doigt ? que je demande en tournant la tête.
- Oui, rit-il. Sur le petit doigt. »
***
6
- Back to school, sadly:
Aujourd’hui, c’est la rentrée.
Je veux rentrer chez moi.
Je ne comprends pas. Je pensais que j’allais avoir plein d’amis. J’ai même mis la jolie barrette qu’Inari m’a ramenée de la grande ville. Papa m’a aidée à m’habiller avant de m’emmener au bus. Et maman m’a donné plein de biscuits à distribuer dans ma classe.
Alors je me suis dit que ça serait une super journée.
A la maternelle j’avais plein de copines, mais aucune n’allait dans la même école que moi après. La leur était trop loin par rapport à la maison, alors je suis allée à la même que celle de Shin et Wi-li-am. Et je sais pas pourquoi, mais y a des garçons qui ont commencé à se moquer de moi pendant la récréation. Les surveillantes regardaient pas. J’ai les cheveux orange c’est bizarre. J’ai les yeux ronds comme des billes. J’ai pas la peau jaune. J’ai des taches partout sur le nez et le visage parce que je suis sale, comme de la terre incrustée. Ils m’ont bloquée contre un mur, je savais pas comment m’enfuir.
Y en a un qui a dit que j’étais peut-être une carotte infiltrée. J’ai pleuré.
J’ai pas réussi à crier.
Ils ont tiré sur mes cheveux pour vérifier. Ils ont vraiment tiré fort.
Ils ont tiré sur mon uniforme pour vérifier. Ils l’ont déchiré.
Et moi j’essayais de m’enfuir mais j’ai pas réussi.
Wi-li-am est arrivé, il en a frappé un. Il est en dernière année. Il m’a dit vingt fois qu’il était désolé de pas avoir su, de pas avoir vu, de pas avoir pu venir plus tôt.
Aujourd’hui, c’était la rentrée.
Je les déteste déjà tous.
***
8
- Duty and honor, for once:
Kami-sama, aide-moi.
J’ai peur.
J’ai hâte, aussi.
Je regarde autour de moi et ne vois personne. Mes parents sont partis rejoindre la foule et les trois autres filles avec qui je suis ne veulent toujours pas m’adresser la parole. Pourtant j’avais demandé à maman de me teindre les cheveux en noir. Elle a rigolé. Elle ne comprend pas.
Elle ne comprendra jamais.
Bon. Concentration.
Allez Birdie. Tu peux le faire.
Les autres commencent à avancer, j’essaie de les suivre aussi discrètement que possible. La flute siffle ses premières notes tandis que l’on contourne les prêtres pour monter sur les planches. Je me tiens plus droite que jamais, il faudrait pas que ma couronne tombe – et c’est pas si facile que ça en a l’air. Un salut, deux saluts, on se relève, on se place. Kami-sama, t’as pas intérêt à me laisser tomber aujourd’hui.
Maman, j’ai peur.
J’ose même pas glisser un coup d’œil au public assis en seiza face à la scène. Je sais qu’ils sont là, je veux qu’ils soient fiers de moi.
Et puis tout est passé très vite.
On a commencé la chorégraphie que l’on connaît toutes par cœur. Je suis comme sur un nuage, je ne sens pas le poids de tous ces regards sur moi. C’est comme si je regardais un dessin animé, je fais rien et quelqu’un fait pour moi. Je sais pas si c’est la musique, la danse, la peur.
C’était génial.
J’arrive pas à me retenir de sourire.
Je cours vers ma maman. Tout le monde est là, même Inari – j’espère qu’il ne m’a pas trouvée ridicule ! J’ai failli me prendre les pieds plusieurs fois dans mon hakama écarlate sur le chemin mais c’est pas grave, je saute dans des bras un peu au hasard parce que j’ai des larmes plein les yeux. Et pourtant, je suis même pas triste.
Je veux faire miko toute ma vie.
***
10
- The big, really big city:
Rai a enfin obtenu son permis.
C’était vraiment une question de vie ou de mort parce qu’à Iijima, si tu l’as pas, tu peux t’enterrer vivant qu’il m’a dit.
Ça ne l’a pas empêché de le rater quatre fois avant de le réussir.
« OH PUTAIN C’EST TROP COOL ! M’man, j’peux avoir la caisse ? S’teuplait ! »
Il l’a tellement agacée qu’elle a fini par céder. C’était assez drôle à voir même s’ils criaient tellement fort que j’entendais plus la télé.
« Bon. OK, mais tu la ramènes avant neuf heure et si tu fais la moindre connerie avec, je te mets dehors. JE TE METS DEHORS, qu’elle crie encore plus fort en le menaçant avec une passoire. C’EST BIEN COMPRIS ? »
Trop tard. Il m’avait déjà attrapé le bras et fermait tout juste la porte de l’appartement sur ses dernières menaces.
« Euh… Rai ? On va où ? »
Je l’avoue, j’étais à peu près aussi pas rassurée que maman. Et je suis à peu près sûre qu’elle aurait pas voulu qu’il m’emmène s’il lui avait demandé.
« Bah quoi, Bee ? Fais moi confiance, tu vas voir tu vas kiffer. »
Je lui fais confiance. Mais pas avec un volant dans les mains. Trop tard pour dire quoi que ce soit de toute façon, alors j’ai agrippé mon siège comme j’ai pu en priant tous les kamis que je connais. Et j’en connais beaucoup. Ça a duré à peu près tout le voyage que Rai a passé en chantant à tue-tête et en parlant quasiment tout seul.
Et puis j’ai compris parce qu’y avait des kanjis que j’arrivais à lire sur l’un des panneaux.
On allait à Nagoya.
Pas Komagane.
Pas Ina.
Na-go-ya.
La vraie, vraie grande ville.
J’ai regardé Rai en écarquillant les yeux et ça l’a fait rire. Il s’est moqué comme quoi j’avais pas compris plus tôt mais il pouvait bien se moquer tout ce qu’il voulait il pourrait pas me gâcher mon moment.
La vraie, vraiment, vraiment très grande ville. Avec des immeubles qui se perdent dans les nuages et des panneaux publicitaires plus hauts que la mairie. Comme dans les dramas.
Et il m’a vraiment emmenée de partout. Dans des magasins, des temples, je crois que j’ai pas cligné des yeux une seconde pendant la journée qu’on y a passée. Il m’a emmenée au zoo, aussi. Et là je suis en train de finir une glace parfum framboise à côté du grand château tandis qu’il dessine sur son carnet.
« Ne, Rai ? Comment tu fais pour dessiner comme ça ? »
Oui, je suis jalouse, il est vraiment trop fort et moi j’ai déjà du mal à faire un cheval qui ressemble pas à une patate. Ça fait des années que je suis jalouse, je l’ai toujours été. Mais j’ai jamais vraiment eu de moment pour lui poser la question.
Et le château qu’il redessine, là, il est vraiment loin de ressembler à une patate. Ou alors c’est une patate super stylée.
« Mh. C’est pas compliqué. Le tout, c’est de bien voir les trucs tels qu’ils sont et après de faire comme si t’avais pigé leur structure en cachant tout ce que tu comprends pas dans des coins d’ombre. »
Je hoche la tête en faisant semblant d’avoir compris. Ça me fait une belle jambe, ça. En quoi ça va m’aider à ne plus sortir des ribambelles de patates en leçon d’art ?
« Tu veux essayer ? »
Et même pas cinq secondes plus tard, j’avais le carnet entre les mains et son crayon à papier dans les doigts.
« Là, qu’il reprend en désignant l’un des coins du toit. Tu vois la corniche ? C’est l’espèce de… De truc juste dessous. Essaie de- EH, si tu continues à appuyer comme une bourrine on arrête tout et on rentre à la maison hein. Va pas me déchirer mes feuilles non plus ! »
Je lâche tout comme un voleur pris sur le fait, les mains en l’air. Il me fixe encore cinq secondes avant de commencer à exploser de rire.
C’est le pire de tous.
Je l’adore.
***
- F*ck you, brother:
Kami-sama.
Aujourd’hui, je vais faire quelque chose d’horrible à quelqu’un d’horrible.
Inari, je l'adore.
Amaterasu, ça va.
Raiden ? Rai c’est le meilleur.
William... Bon, ça reste William, mais c'est déjà mieux.
Les jumeaux, on verra plus tard.
Aujourd’hui, c’est ton jour, Shin.
J’ai volé ta carte d’identité pour l’enterrer sous le grand cerisier dans le square d’en face. J’ai crevé les pneus de ton vélo. J’ai caché les papiers de la voiture de papa et maman sous leur matelas et j’ai mis du poivre dans ton café. Ah, et tu auras beau essayer d’écrire avec ton stylo plume ça marchera pas, j’ai vidé la cartouche dans le lavabo hier soir.
Ganbatte kudasai pour ton certificat de fin d’études, Shin. Fighto.
***
11
- Weeping world:
« Birdy-Bird, tu veux pas aller chercher des onigiris pour ce soir ?
- Mais maman, que ça chouine dans un coin. On veut des yakitori, nous ! Des ya-ki-to-ri ! »
Elle fronce les sourcils. A chaque fois l’air de dire non avant de leur céder lâchement. Je pense qu’elle n’a toujours pas compris à quel point ils se moquent d’elle, il n’y a qu’à voir les larmes de crocodile sur leurs grosses joues baveuses. La suite ? Je la connais par cœur. Elle va passer une main dans ses cheveux en les regardant mimer des pleurs, râler quelque chose qui commence par un « Non » avant de sentir sa voix s’éteindre face à tant de caprices. Peut-être qu’elle cherche le silence, peut-être que sa journée a été chargée et que tout ce qu’elle veut c’est du calme. Moi, tout ça, je m’en fiche.
« Non, les enfants. On en a déjà pris avant-hier…
- M-Mais… S’il te p-plaît Maman… »
Ah ça. Il faut bien reconnaître qu’ils ont un sacré talent pour parler de concert et amadouer leur public. De grands yeux bleus qui fixent avec l’honnêteté du Yomi no Kuni qu’ils gardent. Ils ne portent jamais aussi bien leurs prénoms qu’en ce genre de moments.
« Bon, Birdie…
- Ah non, protesté-je. Maman ! C’est à deux kilomètres d’ici !
- Je sais, Birdy-Bird. Mais je suis fatiguée, je veux éviter-
- … les conflits, finis-je par compléter avec amertume. Mais je sais pas, Ama peut pas y aller ? Ca serait quand même plus facile en voiture non ? Ou je sais pas, Rai ? Il est où Rai ? »
Maman ne dit rien. Elle me fixe. Mauvais signe, alerte rouge. Je lui lance un sourire avant de tourner les talons pour choper quelques centaines de yen dans le pot commun et de me tirer fissa. Je déteste ces morveux. Je déteste les frangins jamais là. Je déteste ma vie. Je déteste maman.
Et en plus, il pleut.
***
12
- The "cigarette":
Je regarde William. Il a l’air encore plus mal à l’aise que moi.
Tss. Petite nature.
Je fais rouler la cigarette entre mes doigts. Tout le monde sait que c’est pas une cigarette. Kami-sama aussi sait que c'est pas une cigarette. Même le chat des voisins qui nous regarde depuis le balcon d’en face, il sait que c’est pas une cigarette. Et William qui est en train de se dégonfler comme un ballon percé à côté. Faut croire qu’il faut tout faire dans cette famille.
J’ai jamais allumé de briquet de ma vie. Willy non plus on dirait, mais de toute façon je suis sûre qu’il va rester inutile sur le banc de touche. Parle beaucoup mais agit peu, hein.
A la septième tentative, je finis enfin par obtenir une flamme.
A la onzième, elle est assez durable pour allumer l’extrémité du truc.
« Je te le passe après, dis-je à mon trouillard de frère. On est bien d’accord, tu vois quelqu’un arriver, tu chopes la clope et tu la balances dehors hein ? »
Il hoche la tête, pas serein pour deux sous. De toute façon, j’avais juste besoin de lui pour faire le guet.
J’ai jamais fumé de ma vie. Mais y a déjà des filles dans ma classe qui enchaînent les clopes, alors je vois pas où est le problème. Et puis Rai en prend tout le temps des machins comme ça, c’est à lui qu’on l’a chipé d’ailleurs. Et c’est bien ça le problème, parce qu’à la seconde où il va voir que son joint a disparu il va se lancer à sa recherche. Avec une idée très précise des fautifs en tête.
« Allez Birdie, grouille. Je suis sûr qu’il va rappliquer dans deux minutes.
- Ouais c’est bon, calme. T’inquiète avec la gueule de bois qu’il a, je pense pas qu’il va se réveiller tout de suite. »
Allez. C’est parti. Je prends le mégot entre les lèvres et je commence à inspirer avec assurance… Avant de recracher mes poumons et ceux de tous mes aïeux. J’en ai les larmes aux yeux. Ça m’a presque étouffée cette chose.
« Euh, ça va ? me fait Willy sans quitter la fenêtre des yeux. T’avais pas dit que t’avais déjà-
- J’ai pas besoin de tes commentaires, le coupé-je avant de recommencer à tirer sur la clope. Ça va aller. »
Et c’est reparti, même si c’est pas plus glorieux que la première fois. J’arrive à peu près à faire illusion avant de tendre la cigarette à mon frère et prendre sa place au poste de guet. Il tire dessus sans très grand succès, crachotant au passage un peu plus discrètement que moi. Il est blanc comme un linge. Je suis pas responsable s’il fait un malaise.
« Oh merde William. T’as fini ? Je crois que c’est lui dans la cui-
- BEE, entends-je crier de l’autre bout de l’appartement. JE SAIS QUE C’EST TOI, AVOUE TOUT ET JE TE PARDONNERAI PEUT-ÊTRE.
- Merde, fait William en regardant le joint à peine entamé. On fait quoi ? »
Je réfléchis cinq secondes sans quitter la fenêtre des yeux. On n’est qu’au premier étage, il est pas très haut en plus. Ça devrait le faire si on…
« Saute, Willy. SAUTE. »
On enjambe le balcon pour retomber dans le gravier deux petits mètres plus bas. Moi ça va, mais je crois que William s’est foulé un truc, même s’il fait style que tout est OK. On voit la tête de Rai apparaître du haut du balcon.
Il crie. Mais on est pas fous. On est pas restés pour écouter.
On a couru encore plus vite que Usain Bolt sous EPO.
***
- Fingers in the mouth:
« Buradushyo-san, veuillez sortir vos affaires de mathématiques s’il vous plaît. »
Je regarde le pion dans le blanc des yeux, il n’en démord pas. C’est la cinquième fois que je le vois cette semaine, cinquième raison différente. N’a pas ses affaires, n’a pas fait signer son dernier devoir, répond au professeur en classe, frappe ses camarades. Oui, oui. Elles sont allées jusqu’à raconter que je les avais frappées. Je les hais. Toutes. Aoko, Asuna, Hinako, Kanon, Saya.
Si j’ai pas mes affaires, c’est parce qu’elles ont déchiré mes cahiers et mes feuilles lorsqu’elles ont piqué mon sac à dos.
Si je réponds au professeur, c’est parce qu’il m’a humiliée devant toute la classe parce que Hinako m’envoyait des boulettes de papier derrière la tête et que quand il en a déplié une en pensant qu’elles m’appartenaient, il s’est découvert gribouillé au-dessus d’un corps de cochon. Et j’ai eu beau dire que je dessinais quand même mieux que ce truc sans forme, il a rien voulu savoir.
Et elles ont osé dire que je les avais frappées.
Je leur ai rien demandé, moi.
Résultat, une pluie d’heures de retenues qui s’accumulent à vue d’œil. A la maison, ça devient invivable. Les jumeaux sont intenables, Rai est parti. Shin aussi, mais ça c’était plutôt un soulagement plus qu’autre chose. William est toujours là, mais c’est William. On ne se déteste pas, mais ça s’arrête à peu près là.
J’ai vraiment beaucoup pleuré quand Rai est parti. Je voulais qu’il me prenne avec lui.
Je reste bloquée dans ce trou à rats, à fixer Yamanano sans le moindre respect.
« Buradushyo-san. Vos affaires.
- Si je les ai pas sorties c’est parce que je les ai pas, et vous le savez en plus. »
Il est exaspéré, et en soi je le comprends. Alors je vais encore me retrouver à copier cinquante fois le règlement, j’ai plus besoin de le lire maintenant tellement je le connais par cœur. Et j’ai pas non plus envie de rentrer chez moi.
J’ai envie de retourner à Nagoya dans le parc du château.
Et aussi brusquement que ça, une bousculade me sort de ma rêverie.
« Hey, tu veux le faire chier ? Dis-lui que tu te sens pas bien »
Euh. Déjà qui es-tu, peut-être ? Je ne l’ai jamais vu, mais il y a eu pas mal de nouveaux cette année et je ne pense pas tous pouvoir les reconnaître de visu. Par contre je pense que j’aurais pas oublié sa tête. Un japonais d'ici et d'ailleurs, aux yeux trop bleus pour tromper qui que ce soit. Il a les traits durs, droits, comme taillés. Si j’avais dû le dessiner, une règle aurait suffi.
Il donne pas confiance. Mais j’ai rien à perdre, et j’aime jouer. Pour la suite, on verra.
« Ya-Yamanano-san, parviens-je à prononcer en mimant le cœur au bord des lèvres. J’ai vraiment envie de vomir, je peux aller à l’infirmerie… S’il vous- s’il vous plaît ? »
Bien entendu, il n’est pas dupe. Il a à peine levé le nez de son livre. Moi non plus j’aurais pas cru mon propre numéro. L’espace d’un instant je me sens bête d’avoir essayé. Je suis sûre que si je regarde l’autre, là, il doit être en train de se ficher de moi.
« Cool, maintenant, sans qu'il te voie, tu… »
Il mime son index et son majeur au fond de la bouche. Pardon ?
« Tu te fais vomir. »
Pardon ?
« Fous-en sur mon sac au passage. »
Pardon ?
Je crois que j’ai jamais eu l’air aussi étonné de ma vie. J’ai mal aux paupières tellement j’écarquille les yeux. Il vient de dire quoi, là ?
Se faire vomir, c’est possible ça ?
« … T’es sûr ? »
Si je le vois prendre une photo pendant que je le fais, je crois que je serais bien capable de le frapper en pleine salle de colle. Même si j’ai jamais vraiment frappé quelqu’un.
Au fond, je sais que j’en serai pas capable de toute façon.
« Dépêche. »
Ok. OK. Respire, Birdie. Il a fait quoi, déjà ? Ah mais si je mets les doigts dans la bouche je vais me vomir dessus ça va être immonde. Immonde.
J’aime pas le vomis déjà, de base.
Mais l’autre, là, il a l’air on ne peut plus sérieux.
Ok. C’est parti.
Je me cache derrière mes bras parce que quand même, je sens venir la photo prise en lâche et envoyée à tout le monde dans l’école. Index et majeur, hein. J’ai à peine eu le temps de toucher le fond de ma langue que, déjà, je sens mon estomac se contracter et se répandre sur le bureau. J’en ai même sur le jean. Et je parle même pas de mes mains.
Pire. Pire idée jamais eue. Vraiment la pire, Kami-sama en soit témoin.
« Putain mais monsieur ! Elle dégueulasse tout, elle ! »
Ah mais d’accord. Si c’était juste pour m’afficher t’aurais pu t’abstenir. Quel. Quel. Ah, mercredi. Je sais même pas jurer, la honte.
Mais si des yeux pouvaient tuer, je crois bien que toutes les mecha-armures du monde n’auraient pas pu te sauver.
Parce que pendant qu’il fait son show, moi j’ai du vomi partout sur mon bureau. Bon, il en a sur le pantalon, ça équilibre un peu le truc.
« Euh… Buradushyo-san, si ça ne va vraiment pas, vous voulez aller à l’infirme-
- Je vais l’accompagner, s’empresse de le couper l’autre comme mû par un empressement soudain. Ça va aller ? »
Personne n’y croit, à ton numéro. Je suis sûre que personne n’y croit.
Mais en levant les yeux tandis que j’agrippe son bras telle la malade surjouée que je suis, je dois bien admettre que c’est un bon. Tout le monde regarde avec des grands yeux crédules. Alors je traine des pieds, je baisse la tête, j’avance comme si j’avais le poids du monde sur le dos.
« T’étais pas obligé d’en rajouter non plus, hein. »
Je suis de mauvaise foi, oui. Entièrement de mauvaise foi. Mais j’ai encore les joues qui me brûlent de honte et le sale goût de la bile dans la bouche. Je suis de mauvaise foi si je veux. Kami-sama laissera passer pour cette fois.
« Eh, on est dehors, non ? T’as été parfaite, tu veux que je t’achète un truc ?
- Mh… Des onigiris pour remplacer ceux que j’ai gerbés et on est quittes. »
J’ai encore les lèvres pincées et les sourcils froncés pour le style mais il a raison. On est dehors. Adieux les deux heures de colle.
J’en aurais presque sautillé sur le chemin des toilettes. Mais je ne vais pas lui faire ce plaisir-là. C'est hors de question.
***
- Five minutes ahead:
Saumon.
Tarako.
Mentaiko.
Thon-mayo.
Umeboshi.
J’ai faim.
Je ne sais pas quoi prendre.
Je sais juste que mon estomac va monter dans ma tête pour me digérer le cerveau si j’ai pas de nourriture entre les mains dans la minute.
Takana.
Tenpura.
Bœuf grillé.
Iwakana-sensei peut bien aller se rhabiller avec ses problèmes de maths à deux yen.
« Deux konbu et un takikomi gohan s’il vous plaît ! »
Et vas-y qu’il met sa vie le vendeur. Je glisse un petit regard à l’autre gars- ah merde il m’a repérée. Je retourne me focaliser sur les onigiris comme si de rien n’était.
J’ai jamais séché de cours de ma vie, et encore moins d’heure de colle.
Les onigiris n'ont jamais senti aussi bon.
L'autre passe sa commande. On a pas parlé du trajet. Je connais même pas son prénom. C'est pas super rassurant mais j'ai vraiment l'impression d'être un caïd comme dans les vieilles sitcoms américaines.
« Ah merde, finit-il par s'exclamer. Je suis désolé, j'avais pas vu, pour la carte bleue. »
Il fouille dans ses poches. Ah.
Ah.
Et y a le vendeur qui nous fixe avec une grosse ride entre ses sourcils froncés.
Il a pas pu vérifier ça avant ? La honte. Quel loss ce type.
« Vous savez où il y a une borne pour que j'aille vous chercher de l'espèce ?
- Prenez à droite en direction de la station-service, il y a une banque dans le coin mais par contre j'sais pas si elle est encore ouverte m-
- OK, qu'il le coupe avant de toquer deux fois sur le comptoir. J'y vais de suite, je vous laisse mon portefeuille ? »
Mh.
Mh-mh.
Mh-mh.
J'ai honte de lui.
J'ai envie de me cacher sous le stand, là.
J'ai horreur d'être prise en porte-à-faux.
« Mais si t'as vraiment pas d'argent je peux t'en passer hein... »
Même si c'est qu'un vieux billet de cinq cent yen tout froissé que j'ai piqué de la dernière fois où j'ai cherché du pain.
Et l'autre, là, ça le fait rire comme si j'étais le meilleur gif qu'il ait jamais vu.
« Mais non, je vais pas te soutirer de l'argent, fait-il avant de regarder le vendeur, hilare. Elle est trop mimi. »
Euh.
J'ai rien à dire. Je sais pas comment réagir face à ça. Je hausse les épaules. J'ai juste honte et les joues en feu et je sens les regards de tous les autres clients me transpercer comme des lances.
J'ai honte.
Je le sens même pas me tirer le bras. Je me vois juste le suivre en regardant mes pieds qui avancent tout seuls. Je veux pas croiser les regards assassins.
Au moins j'ai mes onigiris.
« Ah attendez, j'ai oublié ma carte - oui c'est plutôt utile quand on doit retirer »
Il repart vers l'intérieur du restaurant en rigolant à sa propre blague. Ça arrache un sourire au serveur qui répond un truc que j'entends pas.
J'ai presque déjà terminé le premier onigiri.
On finit par repartir. Donc c'était à droite en direction de...
De...
D'absolument pas vers là où on va.
Il jette sa carte bleue dans une bouche d’égout. Je sais même plus quoi en penser.
« Allez viens, on se tire.
- Euh. Mais... ? T'es sûr on va pas se faire choper ? »
Parce que j'ai beau angoisser à en enfoncer mes doigts crispés dans le riz, j'ai pas envie qu'il me prenne pour une flippette. Et pour ce qui s'est passé avant... Il n'aura qu'à croire que je suis une super comédienne pour ce que ça m'importe.
OK. Ça m'importe.
J'espère qu'il posera pas trop de questions.
« Si, normalement. »
Là, je flippe.
« Mais on a cinq minutes d'avance. »
***
13

***
15
- The "I'm-not-a-bully" bully:
Kanon, Kanon.
Tu viens de commettre ta deuxième erreur. La première, c'est de m'avoir pourri la vie avec tout ton gang de copines qui a changé de collège en t'abandonnant dans ce trou paumé. La deuxième, c'est de m'avoir volé mon meilleur ami. De croire qu'il est à toi et d'avoir piqué une crise de jalousie - tout ça parce qu'il me préfère.
Je ne pardonne jamais plus d'une erreur.
Et je ne t'ai pardonnée pour aucune des deux.
Bah alors, Kanon. C'est pas parce qu'Emaüs c'est à côté de chez toi qu'il faut t'y fringuer, hein.
C'est quoi cette mine de chien battu, là ? Non, non, change rien. Ça va bien avec ta nouvelle coupe, ça fait très... Caniche.
Ah mince, je t'avais dit que c'était une soirée déguisée ? Sumimasen.
Tu l'as piquée à ta grand-mère, cette robe ?
Sérieusement tu crois que Banpei est amoureux de toi ? Vous avez entendu celle-la les filles ? C'est sa meilleure du semestre j'en peux plus.
De toute façon si tu te plains auprès de lui tu sais déjà qui il choisira entre toi et moi, hein Kanon ?
T'en es consciente que tu sers à rien, hein Kanon ?
Tu pourrais crever que personne s'en rendrait compte, hein Kanon ?
Personne ne t'aime, Kanon. Reste à ta place veux-tu.
Il mérite tellement mieux que toi - déjà faudrait arrêter de te fringuer avec des rideaux mais je pense pas que ça suffira pour rattraper tout le reste.
T'es une ratée, Kanon.
T'es ma ratée, Kanon.
J'aime te voir souffrir. J'aime te voir arriver en pleurant et cacher tes mouchoirs dans ton casier à chaussures. J'aime te voir te cacher dans un coin. J'aime deviner que tu veux disparaître. J'aime tes yeux rouges et tes larmes qui ne s'arrêtent plus. J'aime le bégaiement que tu as commencé à avoir. J'aime ton empressement à fuir de l'école sur ton vélo aux pneus crevés. J'aime crever les pneus de ton vélo.
Tout comme tu aimais m'afficher pendant toutes ces années avec mes chaussures trouées et mes fringues chinées dans des friperies. Tout comme tu te moquais jusqu'à ce que je sois à terre pour venir m'achever avec tes moqueries incessantes. Vous avez réussi à me tuer. A m'humilier au point où j'ai voulu que tout s'arrête. Quand je dis ça, je dis que ça s'arrête définitivement. Vous avez réussi à me donner envie de disparaître. Sauf que je suis toujours là. J'ai survécu.
Kanon, Kanon.
Ta première erreur, c'est de te retrouver seule.
Ta deuxième erreur, c'est de ne pas m'avoir fui.
Je ne pardonne jamais plus d'une erreur.
Et je jure que tu n'as pas fini de les regretter toutes les deux.
***
- Boulgonie & Vongole:
« Et qu’y a-t-il dans les bruschettas ? »
Ça fait une bonne dizaine de minutes que je détaille chacun des plats du menu en demandant leur composition exacte. Le serveur a envie de me tuer, Banpei reste stoïque. En même temps, il peut.
« Ah eh bien super, je vais prendre des spaghettis alle vongole alors. Et toi chou ? »
Il finit par choisir des cannellonis et le serveur s’en va avec un soulagement palpable. Ce soir, je suis partie sans rien dire à maman. Elle s’en fiche parce que demain c’est le grand récital d’Izanami et il n’y a plus que ça qui l’obsède depuis des semaines. J’aime ce grisement d’illégalité, ce sentiment d'être une adulte avec tout ce maquillage que j'ai chipé à ma mère. Et ça s’apprécie encore mieux avec un bon verre de Chardonnay dans un restaurant italien côté.
Donc, bien évidemment, hors budget.
Je reprends un verre de Chardonnay. Ah, non, à la réflexion j’opte pour un Bou…
Boul…
Boulgonie ?
Quelque chose de chic et de français, quoi.
J’aimerais bien aller à Paris, un jour.
« Fais pas cette tête, finis-je par râler devant la tronche sceptique qui me fait face. On dirait que t’as déjà vu l’addition. »
Il finit par se dérider, mais je pense que la bonne nourriture y est pour quelque chose. Mamma mia comme ils disent, j’en aurais mangé mes doigts tellement j’ai dévoré le plat.
Maintenant la question est dessert ou pas dessert ?
C’est risqué, quand même.
Mais il y a du fondant au chocolat. Je ne sais pas résister au fondant au chocolat. Il coule déjà de sucre et de bonheur alors que je l’attaque à la fourchette dans ma tête.
Banpei est pas serein. Je lui ferai regretter de m’avoir gâché l’ambiance – il a tort de pas avoir confiance lui. Tant pis pour sa face, s’il veut passer une mauvaise soirée à se ronger le foie ça sera sans moi.
Je sais ce que je fais.
Regarde et admire. Ravale ton stress en passant aussi s’il te plaît.
Je fais tomber la fourchette au sol. Il me reste juste un bout de gâteau dans mon assiette, pour la crédibilité. Un fond de Boulgonie aussi qui finit tristement par terre tandis que je me précipite vers mon verre d’eau. Je suffoque. Je n’arrive plus à respirer.
Le bris de glace a eu le mérite de faire converger tous les regards vers nous. Les serveurs, aussi.
« Signorina, que… Tout va bien ? Tout va bien, signorina ? »
Bah non, tu le vois bien, je fais de mon mieux pour m’étouffer baka.
« Vous… V-Vous… Vous m’avez dit qu’y a-avait… Poivron… Pas de la to-de la tomate. Je… Allergique… »
J’en rajoute un peu parce qu’ils n’ont pas l’air assez paniqués. Là, c’est mieux. Ils se regardent, m’entourent, me servent de l’eau. J’entends vaguement Banpei s’offusquer, dire que c’est un scandale pour un établissement de ce nom. Il se penche vers moi, dit des trucs qui se perdent dans ma toux surjouée. Je sens qu'il me plaque un truc sur le bras avant de le ranger fissa dans sa poche. Ah. Bah voilà, je savais bien qu'il servirait à quelque chose, mon EpiPen fait maison. J'ai passé deux heures de permanence à tuner mon bâton de colle, quelque part je suis contente que ça n'ait pas été en vain.
Je me calme progressivement comme c'était marqué sur internet. C'est que c'est fatiguant cette crise-là, on sous-estime bien trop les allergiques dans la vie. On finit par partir bras-dessus bras-dessous, de la colère dans les yeux et le ventre plein.
Comment manger à l’œil avec les compliments de la maison. Grazie mille, messieurs-dames.
***
- Can't deny anymore:
J'en ai rien à faire.
En quoi ça a à voir avec moi ? Je m'en fiche. Je veux rien avoir affaire avec cette cinglée.
Elle fait ce qu'elle veut, elle est grande, non ?
C'est pas moi qui lui ai mis le couteau sur les poignets. Moi je me serais pas ratée.
Même quand t'essaies, tu restes nulle Kanon.
Ce sont tes affaires, me mêle pas à tes problèmes.
***
- Quacks, with love:
Oh, Kami-sama.
J'ai le coeur qui bat la chamade.
Banpei m'a raccompagnée en plein milieu de la nuit. J'ai escaladé la façade en passant par les poubelles pour ne pas que les parents m'entendent monter. Ca fait une heure que je suis assise dans mon lit. J'entends papa ronfler.
J'ai les mains qui tremblent, on dirait qu'elles dansent la samba.
Impossible de me coucher. Impossible de me glisser sous la couette, je me sens salie. Sale. C'est presque comme si je n'étais plus à ma place entre ces quatre murs roses et tous ces dessins, toutes ces poupées. Je me sens mal à l'aise.
J'ai besoin de prendre une bonne douche.
J'ai besoin de frotter partout.
Surtout là.
Je sens encore ses sales mains sur ma peau.
Je peux pas me coucher comme ça.
Il doit être trois heure du matin. Peut-être plus, peut-être moins. J'essaie du mieux possible de ne pas faire grincer la porte de ma chambre et me faufile dans la salle de bains. De l'eau. Il me faut de l'eau.
Je me laisse couler dans mon bain improvisé. Et je frotte.
Je frotte, je frotte, je frotte.
Jusqu'à avoir l'impression que la peau qu'il a touchée a été remplacée par de l'épiderme rouge sang.
Je frotte jusqu'à ce que j'en sois enfin soulagée.
J'ai la poitrine couleur de feu mais ça va mieux. Les flash, par contre, n'arrêtent pas de m'agresser tels des stroboscopes. L'homme, déjà, tout le vice du monde dans les yeux qui me regarde comme un steak livré à point. Banpei qui débarque, faux badge à la main, faux pistolet à la cuisse. Il a tout du parfait policier en civil qui vient de débusquer un gros coup. Abus sexuels sur mineurs, bien sûr que ça va le faire chanter. Les menaces, la diffamation, l'abdication. Et l'argent de la rançon.
On a réussi à choper l'argent de la rançon. Tokyo n'a jamais été plus proche que maintenant. J'arrive presque à en palper les néons, les grands panneaux publicitaires et la foule qui n'en finit jamais.
Tokyo, Tokyo.
Un rêve oui, mais à quel prix ?
***
- a lovely letter for a lovely couple:
Je récupère l'enveloppe rose, c'est qu'elle pèserait presque lourd entre mes mains. Banpei me regarde, tout fier de lui, et je ne suis qu'excitation liquide. Je lui ai sauté au cou en criant, c'est un miracle si rien n'a été froissé à cause de ça. Cette lettre, c'est ma porte de sortie. C'est notre échappatoire vers la capitale, c'est le début de ce road trip à l'américaine que l'on voit dans les films. Bon, sans voiture et sans budget, mais on a notre liberté et c'est déjà ça.
A peine rentrée, je l'ai tout de suite planquée sous mon matelas. Ma vraie fausse lettre de mariage, prête à être utilisée le jour de mes seize ans. Si c'est pas être prévoyant, ça, alors je m'y connais vraiment pas.
***
16
- Fuck you, other brother:
Je regarde mon téléphone, le train arrive dans cinq minutes. Une ponctualité sans accroc, tout l'inverse de Banpei qui a bien l'air de vouloir louper le coche. Il m'avait dit qu'il serait vers le grand pilier bleu du hall de la gare, mais il n'y a que moi et mes valises qui l'y attendent impatiemment. Elles taperaient du pied si elles en avaient. Moi, j'ai déjà dépassé ce stade, j'ai juste préparé une liste de toutes les insultes kami-sama-friendly que je vais lui sortir dès que je vois sa tête d'ahuri.
Le train arrive dans deux minutes, toujours pas de nouvelle. Tu peux pas courir un peu ? On est pas en cours d'EPS, pas besoin de faire style que tu as de l'asthme garçon. Allez, chop-chop.
Mon téléphone vibre, je fonds dessus comme un faucon vorace. Banpei, bah dis-donc, c'est que tu tombes bien, toi. Alors...
Alors...
Je me décompose une fraction de seconde, pile au moment où le Shinkansen pointe le bout de son museau blanc sur les quais.
Il ne viendra pas.
Il m'a plantée, le sal-. Le salaud. Tu m'excuseras pour cette fois, Kami-sama.
Il m'a plantée comme la conne que je suis, avec son plan foireux et mes quelques bagages. Il m'a plantée au pied du pilier bleu où il m'a dit qu'il m'attendrait, avec son sourire niais et son billet pas vraiment payé. Je sens les larmes monter au moment où on annonce l'embarquement des passagers.
Et là, je me vois tout avouer à ma famille, je regarde le visage d'Inari se décomposer, j'entends la déception de Raiden jusque dans la moelle de mes os, qui vibrent de sa colère. Je ne veux décevoir personne.
Mon ventre fait deux roulades arrières, je regarde tous ces gens pressés monter dans le train. Je ne veux décevoir personne. Et je ne vais décevoir personne, je suis plus forte que ça.
Il m'a plantée, putain. Désolée Kami-sama. Vraiment désolée, j'ai pas pu le retenir, celui-là.
Mon trolley, mon sac à dos, un autre gros sac avec mes vêtements.
J'ai juste envie de pleurer. Je suis perdue.
Un des derniers avertissements pour l'embarquement. Mon ventre qui passe à la moulinette à force d'enchaîner les saltos.
J'ai tout pris dans mes bras et j'ai sauté dans le wagon juste quand les portes se fermaient.
***

- Big city life:
J'ai froid.
J'ai oublié de prendre une veste dans mon sac.
Tant pis.
Trop tard maintenant.
Si je pleure, c'est à cause du vent.
***
- Big city life sucks:
Je recompte les quelques centaines de yen qu'il me reste. Vraiment pas de quoi tenir jusqu'à la fin de la semaine.
Ça fait des mois que ça dure, va falloir retourner gagner sa vie pour manger autre chose que de la soupe ce soir aussi.
Je regarde tous les gens sans visage autour de moi avant de ramasser mon sac à main, vestige verni de jours meilleurs. On s'habitue à l'odeur, on s'habitue à la charité des kombini, on s'habitue même au mépris des gens sur le bord de leur chemin. Par contre, je me ferai jamais à l'usure que je vois dans les yeux et sur la peau de toutes ces personnes qui m'entourent.
Ce squat, c'est ce qu'ils ont connu de mieux en des années de vagabondages. Tout le monde ici fuit quelque chose ou quelqu'un, des créanciers brutaux aux secrets de faux mariages foireux. Qu'est-ce qu'on ferait à dormir avec les rats toutes les nuits, sinon ? On serait allés dans les mobilhomes gouvernementaux pour sans-abris depuis longtemps. Au moins, là-bas, on n'aurait pas à batailler avec un chauffage de fortune pour dix ou à squatter les sanitaires des piscines municipales pour prendre une douche. On aurait un toit en préfabriqué au-dessus de la tête, ça aurait déjà fait un souci de moins.
Non, nous, on est en cavale. Et à ce titre, on a droit à rien.
On devient invisibles, on n'a plus aucun statut, on est les parias de ce monde si beau, si lisse, si bien rangé. On aura beau se mettre en plein milieu des boulevards, personne ne le remarquera, tout au plus pourrons-nous nous faire renverser par un bus qui passait par hasard. Mais on fait avec, on apprend à faire avec. Ça me rend malade.
Je ne suis pas venue à Tokyo pour jouer le second rôle de ma vie.
Les marches du métro sont très vite dévalées, je suis rentrée dans personne cette fois. Il y a toujours le clodo qui fait la manche dans son coin en disant des trucs bizarres que personne n'écoute, et l'autre gaijin qui n'aligne pas trois mots de japonais et chante en une sorte d'espagnol malformé. Je m'y connais, j'écoute beaucoup de reggaeton à la radio du squat.
Il a toujours le meilleur spot par contre, j'ai l'impression. C'est pas normal qu'il gagne autant en grattant trois accords et demi sur un bout de bois usé jusqu'à la corde. Il est au milieu du passage, dans une sorte d'alcôve qui sert aux agents d'entretien pour tirer de l'eau. Pas mal, pas mal.
Demain, je n'aurai qu'à venir plus tôt. Tu peux dire bye-bye à ton spot, paëlla-boy.
***
- Bang Bèng, and Baby shot you down:
J'avoue, je suis allée un petit peu trop loin.
Mais juré, je fais amende honorable, kami-sama. Sinon je serais pas là comme une débile à attendre sous la pluie que l'autre ahuri qui se faisait appeler Bèng sorte de chez lui. J'ai appuyé sur l'interphone, personne n'a répondu. J'espère que je me suis pas plantée dans les kanjis. De toute façon, j'ai un peu appuyé au pif, rien ne correspondait.
Non parce que, tu m'as donné ton faux prénom tout naze là, mais maintenant je sais comment tu t'appelles, Stélian. J'ai peut-être oublié ton nom de famille, mais je sais que si je le cherche, j'ai qu'à regarder dans ton petit portefeuille, trouver la petite carte d'identité avec ta petite photo dessus. J'espère que ça te manque, tout ça, Stélian. C'est dommage de se faire piquer ses papiers, sa carte bleue et son cash juste parce qu'on a voulu jouer au plus malin. Tu m'as éloigné ma clientèle, je sais pas comment tu t'es débrouillé mais tu les faisais fuir avec ta sale tête antipathique et ton air de voleur. Donc j'ai récupéré mon dû, plus un extra qui traînait dans la doublure de ton portefeuille. Promis, j'ai pas touché à la carte, je suis sûre qu'elle est déjà dans le rouge de toute façon.
Bon, tu te dépêches, par contre ?
J'ai mis mon hoodie le plus chaud et le moins crade mais on se les pèle quand même. Ça aurait été plus simple si tu t'étais pointé dans la station aujourd'hui, mais comme par hasard t'as manqué à l'appel pour la première fois depuis des mois. Enfin, la deuxième, vu qu'hier non plus tu n'étais pas là. Quelle ironie, hein ? Ça ferait presque rire. Eh bien parle pour toi, parce que pour l'instant l'ironie elle rime surtout avec pneumonie si tu sors pas de chez toi dans le quart d'heure.
Allez, Stélian. Sinon je jette tout tes trucs dans la bouche d’égouts juste à côté. En vrai, c'est vraiment tentant. Mais je suis polie et bien élevée, moi, et je respecte assez le papier pour le mettre au recyclage au moins.
J'espère juste que c'est la bonne adresse qui est indiquée sur ta carte et que je ne poireaute pas depuis des heures juste pour le plaisir de voir des gens marcher avec leurs doudounes et leurs manteaux chauds. Je te jure, si tu descends pas, c'est moi qui monte.
Mais tu finis par passer la porte de l'immeuble, et tu n'as visiblement pas l'air content. Honnêtement, je m'en fous. Récupère juste tes papiers, et sois-moi redevable.
« Qu'est-ce que tu fous là ? grogne-t-il en me fonçant dessus.
- Franchement, tu poses la question ? Tu crois que j'ai traversé tout Tokyo en fraudant le métro juste pour le plaisir de voir ta tête ou te dire à quel point je me les caille en leggings ?
- Rends l'argent. »
Je le regarde de bas en haut, il ne fait vraiment pas peur en vrai. Niveau intimidation, on est à peu près au niveau du labrador, il manquerait juste qu'il remue la queue. Non, en fait, non, oublions ce que j'ai dit.
« Prends tes papiers déjà, lui dis-je fermement en fourrant son portefeuille allégé dans ses mains. Je te rendrai l'argent que quand tu me rendras la thune que tu m'as fait perdre. Gros ingrat. »
Il grommelle quelque chose que je ne comprends pas, je n'arrive pas à déchiffrer son expression. C'est un mélange d'agacement et d'autre chose, de surprise peut-être ? Eh oui, je suis polie et bien élevée, je t'ai ramené tes papiers mais si tu insistes pour ton argent, tu vas te prendre le coup de pied que tu mérites depuis le début.
Quand est-ce que tu vas reconnaître que tu m'es redevable ? C'est que je commence à avoir faim, moi.
« Tu sais, la politesse, c'est de remercier quand quelqu'un fait un truc comme ça pour toi, finis-je par lâcher froidement. Tu pourrais m'inviter à dîner par exemple, ça serait un bon début. »
C'est à ton tour d'essayer de me toiser, je veux bien être petite mais c'est pas comme ça que tu vas m'impressionner pour autant. Commence déjà par un abonnement à la salle, et puis te faire pousser une barbe, ça pourrait aider ton charisme. Mais là, en l'état ? Nope, fail.
« Je ne suis poli qu'avec ceux qui le mérite, pas avec les voleurs. Mais je reconnais que t'as fait un effort, j'en aurais pas fait autant, va pour la bouffe... Un sandwich triangle ça te va ? »
Je crois que j'ai roulé des yeux avant même de songer à le faire. C'est dire à quel point il me blase, ce type. Tant pis pour le petit restau que j'avais repéré en bas de la rue.
« Ici, la bouffe des radins, on appelle ça des onigiris mais je t'en veux pas. J'en veux trois, deux thon-mayo et un au saumon mariné, finis-je d'énumérer avant de tourner les talons et faire quelques pas. Bon, tu viens ?
- Par contre, c'est toi qui as ma thune »
Je crois que j'ai juste haussé les épaules. Il n'y a plus de ta thune qui tienne, hon.
« Bah sers-toi de ta carte, claironné-je comme si c'était une évidence - parce que c'en est une. Et fais pas genre tu l'as pas, elle est dans le portefeuille et je l'ai pas bloquée donc je t'en prie. Bamos.
- Ok, finit-il par lâcher à contrecœur. Go. »
Comment soutirer encore plus d'argent au gars que l'on vient à peine de plumer.
***
- Trusting me is an hazardous game to play:
« Bon. Change-toi, on décolle. »
J'essaie de lisser ma robe, mais c'est une peine perdue. En même temps, j'ai absolument rien pour la suspendre et rester dans mon sac à se faire bringuebaler de partout n'a pas fait du bien aux plis. Ça a tout froissé, d'ailleurs. Tant pis, c'est pas grave, ça devrait le faire quand même. Je me maquillerai sur le chemin.
Il met sa vie à ranger ses affaires et partir s'engouffrer dans un renfoncement de la station, je regarde ma montre toutes les trente secondes. En vérité, on n'est pas pressés. On est même en avance, avec nos presque quinze minutes de retard sur la réservation. Il finit par sortir de son coin de mur, métamorphosé dans sa chemise et son pantalon droit.
« C'est bon comme tenue ? demande-t-il, sourcils froncés, en se triturant le col. J'ai pas mieux. »
Je ne sais pas si c'est au niveau des épaules ou de la coupe, mais cette chemise a définitivement un problème. Malheureusement, je m'y connais vraiment mal en vêtements pour hommes et j'ai peur d'aggraver les choses en m'improvisant styliste. Tant pis, c'est pas grave, ça devrait le faire quand même. Ça ira de pair avec les froissures de la robe.
Je le toise quand même des pieds à la tête, à moitié pour être sûre du résultat et à moitié pour la forme.
« On va faire avec, finis-je par soupirer en surjouant un peu, avant de tourner les talons et partir vers la sortie.
- Parce que tu crois qu'tu présentes mieux ? rétorque-t-il, un tantinet de vexation dans la voix.
- Écoute. C'est peut-être raté, mais au moins je passe pas pour un clodo sur son 31, moi, appuyé-je avant de sortir miroir de poche et rouge à lèvres Wish de mon sac à main. Ils se diront juste que j'ai pas de goût, ou que je suis américaine. »
C'est vraiment la pire teinte de rouge à lèvres que j'ai jamais vue de ma vie, une sorte de rose malabar toxique qui ne va avec rien et qui jure même avec mes cheveux. Je comprends pourquoi il était bradé, même le magasin de bric-à-brac où je l'ai dégoté n'en voulait plus. Mais ça ira, de toute façon c'est de bon ton avec le reste. Très avant-garde, très couture. Juste une autre façon polie pour dire que c'est laid.
« C'est pas trop mon style en même temps, l'entends-je râler derrière. J'ai au moins une tenue à peu près correcte, donc fais pas chier, puis sur un malentendu j'passerais juste pour un excentrique. »
Ou un clodo sur son 31. C'est bien ce que je disais, oui.
Je suis les rues que je connais par coeur, faut dire que j'ai pas mal bavé les quelques fois où je suis passée devant de restaurant-là. Le pas est rapide et sûr, aussi précipité que la faim est intense.
« Italien, t'aimes ? »
La question est purement polie, parce que même s'il est allergique aux pâtes et aux pizzas je ne changerai pas mes plans. Au contraire, ça me faciliterait la tâche.
« Italien c'est parfait, répond-il dans la seconde. T'as besoin que je parle italien ou l'anglais suffira ? »
J'ai failli le regarder avec des yeux ronds comme des billes et hurler un grand oui, mais je me suis retenue in-extremis en me rappelant que c'est pas parce qu'il propose de le faire qu'il sait le faire. Peut-être qu'il parle aussi bien italien que japonsais. Peut-être qu'il pense parler italien mais en fait, c'est de l'espagnol.
Peut-être que son italien est tellement claqué au sol que même les incultes de serveurs qui confondent l'anglais et le russe se rendront compte que tout ça, c'est du flan.
Restons safe et en terrain connu. Même si, en vrai, passer pour des européens décomplexés augmenterait vraiment notre capital confiance auprès des serveurs. Après tout, pour venir de si loin, ils sont forcément riches. Bien plus que ces crétins d'américains qui ont même pas un océan entier à traverser.
Et puis j'ai déjà l'accent brittish, donc ça ferait moins bizarre.
« Anglais avec un accent italien, tu sais faire ? proposé-je en accrochant ma deuxième boucle d'oreille en toc. Ca serait top, t'aurais l'air blindé.
- Ouais, pas de soucis pour l'anglais avec un accent-
Je l'ai interrompu en le tirant dans une rue perpendiculaire, juste avant la devanture du restau. J'avais complètement oublié la touche finale du déguisement, celle qui fera oublier les relents de pisse et d'humidité du métro. Les supers échantillons que j'ai demandés au Séphora du coin. On peut toujours faire confiance aux magasins français pour faire de l'excès de zêle, dans ce pays. Peut-être que c'est pour compenser le fait que tout le monde les croit arrogants et détestables.
Ou alors c'est juste mon père qui pense ça, en bon anglais chauvin.
Je verse la mini bouteille sur son cou, j'espère que je me suis pas trompée entre les deux parfums. Vu qu'il n'a pas l'air d'embaumer la rose et le lilas, j'en conclus que la mission est accomplie. Par réflexe, je m'autorise une profonde inspiration et... Ah, ce que ça change. L'espace d'une seconde, j'ai été tirée très loin de la réalité du squat, presque de retour à une vie normale avec Raiden qui m'emmène une nouvelle fois à Nagoya dans sa voiture flinguée. Je pensais pas que son parfum me tirerait presque une larme. Meilleur choix possible. T'as intérêt à te montrer à la hauteur, Stélian.
« Ca pue... t'en fais pas un peu trop là ? J'ai fait c'que j'ai pu, j'ai autre chose à foutre que de jouer à la poupée, éclate-toi si c'est ton trip. ok. Tu veux bien m'expliquer ? »
L'espace d'une seconde, vraiment, l'autre ahuri m'aurait jamais laissé plus de répit avant de commencer à se plaindre. Je laisse échapper un soupir en m'aspergeant de parfum également. Il peut pas juste se laisser aller et faire confiance ? J'ai pas l'air de savoir ce que je fais, là ?
« Tu peux pas arrêter de râler, oui ? finis-je par grommeler avant de lui apalguer le bras et le tirer vers le restaurant. Sois souriant et pose pas de question. C'est moi qui offre.
- J'arrêterai de râler quand tu arrêteras d'être pénible. Si on se retrouve dans la merde par ta faute... Puis si tu comptes payer avec ma thune, ça compte pas pour une invitation. »
Il me prend pour une imbécile ou c'est moi ?
« J'ai jamais dit que je comptais payer, darling. »
Allez, souris, et regarde-moi faire.
Tricks are kinda gettin old, the second time around.
Birdie Bradshaw

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Birdie Bradshaw

Look out Sunshine, here's the punchline
***
17
- Coming in with a bang:
- Je savais que ça allait finir bizarrement dès l'instant où il m'a proposé de squatter chez ses darons, à la sauvette. Entendre : dès que je capte un bruit, je saute par la fenêtre et dévale l'espèce de faux toit qui sert de pergola. Sauf qu'un jour, eh bien j'ai rien entendu. Et me voilà invitée à la table de ses vieux à manger un assortiment de sushis comme je n'en avais plus vu depuis longtemps.
Et il y a des fraises en dessert.
Des fraises.
Je pourrais même pas m'en acheter une avec une journée entière dans la station de métro.
Je crois que je les ai dévorées cinq fois dans ma tête avant que l'on ne m'en serve dans mon assiette. Sa mère me sourit, elle a vraiment l'air adorable. Après tout, rien n'est trop beau pour la nouvelle copine de Stélian, mh ? Pas étonnant que ça soit un peu l'événement, faut le supporter aussi. Je ne l'ai jamais vu ouvrir la bouche sans râler, je crois que si je survis si bien c'est parce que mon oreille est devenue sélective. Et un mot sur trois, ça va, c'est pas la mort à endurer.
En vrai, je râle et je fais la meuf, mais il est vraiment cool. Et puis il râle et il fait le mec, mais c'est moi qui squatte son lit quand il tire son matelas par terre.
Je crois qu'après Banpei, j'avais besoin de me réconcilier avec le concept d'amis.
***

***
- Written in the stars:
- Franchement, je sais pas quoi en penser.
Je suis partagée entre la surexcitation et le scepticisme.
Je regarde le van droit dans les phares, j'ai presque l'impression qu'il va me répondre d'un coup de klaxon. Et puis il y a Stélian, tout guilleret, qui caracole jusqu'à la porte pour me montrer l'intérieur de la machine. Honnêtement, j'y ai pas cru quand il a annoncé ça à table l'autre soir. J'ai eu l'impression que le temps passait au ralenti jusqu'à ce que sa mère en fasse tomber ses baguettes sur le plancher.
Alors Stel, on va vraiment sillonner le pays ? Tu t'es vraiment trouvé un fond de voyance dans tes origines rom ?
J'ai toujours su que tu avais un peu de troisième œil en toi, quelque part entre tes mensonges et tes plans à la con. Mais ça ne me dérange pas de faire la potiche qui assiste. Je me sens comme quand Raiden m'a emmenée à Nagoya pour la première fois.
Et puis, j'ai enfin un faux mari à présenter ainsi qu'une sorte de toit pour accueillir la famille. Depuis le temps que je repousse ça, j'ai presque cru qu'ils allaient organiser un raid sur Tokyo.
Évitons les problèmes, j'ai envoyé un SMS à ma mère direct. J'en parlerai à Stélian... plus tard.
***

***
18
- Oh, hi Baby. Nice to finally meet you:
- Je ne sais pas où il a dégotté ça mais ça y est, c'est officiel.
Je suis majeure. Ou, du moins, sur mes faux papiers.
C'est juste pour attendre que j'aie vraiment vingt-et-un ans, qu'il m'a dit. Très bien.
Je suis majeure.
Et Stélian qui me regarde comme si c'était rien avec sa mine boudeuse, mais je vois que dans ses yeux il jubile.
Ça fait longtemps qu'on roule, et on en a vu passer des paysages. On est presque montés jusqu'à Hokkaïdo pour les dernières floraisons de cerisiers, on a mangé du bœuf à Kobe, on a vu les cerfs de Nara et on est même repassés par Nagoya pour grimper le mont Fuji.
Sauf qu'il est peut-être temps en effet de revenir sur Tokyo. Il veut pas me le dire, mais je sais que c'est pour sa copine. Moins j'en entends mieux je me porte, je peux pas la supporter celle-là.
Bref. Oublions, et reconcentrons-nous.
Les papiers.
Je suis libre.
Je peux faire ce que je veux, maintenant que j'en ai le faux âge et la fausse adresse.
Tout ce que je veux.
Je me suis taillée après lui avoir fait un énorme hug, il en a peut-être perdu un tympan au passage mais j'ai pas pu l'entendre râler, j'ai décollé avant. De toute façon on sait tous les deux qu'on se reverra bien assez tôt pour partager une nouvelle conserve de raviolis tiède au dîner.
J'ai vingt-et-un an. La ville m'appartient, et je sais exactement où j'ai envie d'aller. Les lumières ont bien trop clignoté dans mes rétines pour que j'oublie l'adresse, c'en est presque devenu un mirage depuis le temps. Mais un mirage qui embauche.
« Bonjour, me fait le guichetier alors que je viens à peine de poser un pied dans l'entrée. Vous désirez un ticket ?
- Non, j’ai vu une annonce dehors, vous cherchez des gens pour le service c’est ça ?
- Ah, euh… Oui, oui, je crois bien, ou alors c’était pour aider avec les danseurs ? Euh… Attendez, je reviens. »
Il disparaît dans ses coulisses. Ça sent le velours, le parfum et la poussière. L'élégance de l'âge pour un établissement qui doit bien être centenaire à tous les coups. J'ai cru voir passer une fille, au loin, dans une longue robe strassée et des talons qui donnent le vertige rien que d'y penser. Elle est belle. Elle rayonne.
Elle brille.
« Effectivement on a un job à temps plein disponible dès que possible. Pas besoin d’entretien ou quoi, d’ailleurs plus vous commencerez tôt mieux ça sera. Ça vous va toujours ? »
Je hoche la tête, peut-être un peu trop vigoureusement parce que ça arrache un sourire amusé au type.
« Je vais juste prendre ton prénom – tu permets que je te tutoie hein ?
- Je-euh... B- »
Ah, non. Mince. Utiliser le faux nom, utiliser le faux nom. Sauf que c'est impossible de le lire discrètement, peu importe comment je tourne la carte d'identité.
Au pire, personne ne va me choper juste à cause de mon prénom, si ?
« Bi- »
Mais le nombre de Birdie vivant au Japon m'a frappée avant que je termine ma phrase.
Pas de Birdie, alors-
- OK super Baby, on se dit ce soir 19 heures pour le briefing alors. »
Euh... Quoi ?
Vraiment ?
Il a disparu dans l'arrière-boutique avant que j'aie pu rectifier quoi que ce soit.
Baby. Très kitsch et très doux à la fois, je crois que je peux m'y faire. Un peu comme Stel quand il se fait appeler Bèng auprès de ses pigeons.
Ok, très bien.
Enchantée, Baby. On va avoir un long chemin à parcourir ensemble. Je t'aime bien, tu sonnes bien.
On va conquérir le monde du cabaret.
J’ai l’impression de décoller du sol tellement je suis sur mon petit nuage.
***
19
- No shame:
- On est le 14 octobre.
Ça va faire un an qu'on est revenus sur Tokyo, Stel et moi. A tous les coups il s'en souvient même pas, mais moi si, et c'est ce qui compte.
Un an qu'on passe à plumer la moitié de Tokyo après avoir plumé la moitié du Japon et à fumer des joints sur les rives de l'Ara-kawa.
Un an que je sers des verres de vin et des flûtes de champagne dans le plus ancien des cabarets de la capitale.
Je vais passer du côté des assistantes de danseuses.
Il y a bien trop de choses à fêter.
Du coup, j'ai ouvert Tinder.
Il y a un gars qui a l'air pas mal, là. Plutôt beau gosse, vêtements soignés, Todai University - ça coûte cher ces machins-là, non ? Tant mieux, tant mieux.
Il est intéressé - bien entendu qu'il est intéressé, l'idiot. Je sors ma plus jolie robe du fouillis qui règne depuis bien trop longtemps dans mon backpack. Un coup de rouge à lèvres, deux passages de mascara. Ah, mince, j'ai oublié le liner - allez, personne ne verra que je l'ai rajouté à la fin. Voilà.
Je deviens vraiment forte en maquillage à l'aveuglette.
« Je sors, à toute ! »
Et me voilà partie à la pêche.
La soirée est superbe. Le vent permet de rafraîchir cet été qui traîne bien trop en longueur. Pas grand monde dans le métro, j'arrive même à trouver une place assise. Si ce n'est pas le destin, ça.
Je descends, une petite vieille me bouscule et je manque de me casser la figure sur le côté. Il faut comprendre que si on a le malheur de tomber dans une station de métro tokyoïte, on risque de faire une très longue carrière dans le domaine de la crêpe foulée au pied.
Je me rattrape au premier type venu. L'honneur est sauf.
Ah. Ah bah c'est mon date.
L'honneur n'est peut-être pas si sauf que ça.
« Rui, c’est ça ?
- Mh. Et tu dois être Kanon ? »
Oui, Ironie est mon deuxième prénom. C'est ce qui aurait du être marqué sur mon faux passeport. Malheureusement, je n'ai pas pu choisir.
« Bonne mémoire, ris-je en prenant son bras. Donc... Tu m'avais dit que tu connaissais un excellent restau indien dans le coin c'est ça ? »
***
- No regret:
- J'ai tout fait dans les règles.
Peut-être que j'en ai trop mis dans son verre, par contre.
Il ronfle comme un camion dont l'embrayage vient de casser. C'est rassurant. Ça veut dire que ce n'est pas le bruit de mes pas sur la moquette qui va le réveiller.
Son sac traîne par terre. Je l'amène vers la fenêtre pour avoir un minimum de lumière - des lampadaires, la lune, les étoiles pour ce que j'en ai à faire. Plein de dossiers, de papiers, d'emballages de nourriture oubliés depuis des années... Ah. La voilà. La petite carte à puce noire qui prouve que je finis par avoir du flair.
Sa carte, son téléphone et la serviette en papier du restaurant où j'ai noté son code. Pas besoin de plus pour retirer tout son argent.
Je vais quand même pas perdre mon temps avec n'importe quel parvenu de Tokyo.
***
- Hungry like the Wolf:
- C'est la troisième fois que je le vois dans la salle.
C'est la troisième fois que je lui tourne autour.
C'est aussi la troisième fois que je vais lui laisser mon numéro, les dernières s'étant soldées par des échecs abandonnés sur la table. Mais je ne suis pas du genre à lâcher. Et ça, je pense qu'il l'a bien compris, même s'il a le niveau de japonais d'un enfant de six ans. Sauf que voila. Nada.
Et le pire, c'est qu'il flirt.
Il flirt, il flirt, mais rien. C'est pas possible ce genre de personne.
Je pose son whisky sur la table, laisse courir sans faire exprès une main sur son épaule. Il me jette un espèce de regard désabusé, je sens que ça part une fois de plus vers un râteau. Tant pis. Au moins j'aurais essayé, même si on ne va pas se mentir, je suis quand même déçue.
« T'es butée, fait-il sans me quitter des yeux. C'est de famille le mode sangsue qui lâche rien ? »
Là, honnêtement, je suis partagée entre la perplexité et le fou-rire. Déjà parce que s'il me trouve têtue, il serait un no-match pour le reste de la fratrie, merci maman pour le côté tête de mule que tu as bien su transmettre à tout le monde. Et puis, honnêtement, c'est moi qui suis bornée ? Alors qu'il me laisse en vu dès l'instant où j'ouvre la bouche ?
Peu importe, en soi. C'est ce soir, ou ça sera jamais.
« Je te l'ai déjà dit, répondis-je dans un petit sourire maîtrisé. Tu me plais, c'est rare, et tu me repousses, encore plus rare. Je veux juste tester une dernière fois, c'est tout »
Je joue avec son verre vide du bout du doigt, ça n'a pas l'air de l'atteindre plus que ça. Ça va qu'il est vraiment canon, avec son air boudeur et ses yeux sombres constamment blasés. Sinon, ça aurait fait longtemps que je serais partie voir ailleurs.
« Ou alors, tu es gay ? continué-je pour le faire réagir un peu. On a des gars très bien qui dirait pas non, non plus.»
Il accueille ma question avec une moue dégoutée, au moins maintenant je sais que s'il me repousse, c'est soit parce qu'il est aveugle, soit parce qu'il est bête.
« Si personne a jamais su te dire non c'est peut-être ta dernière chance pour apprendre, bellezza. »
C'est ça. Continue de me parler en italien, je vais vraiment finir par craquer.
Il prend une gorgée de whisky, un sourire indéchiffrable aux lèvres. Je ne sais pas comment il fait, mais il collectionne bien toutes les cartes du mec sexy et mystérieux - et il en joue, en plus. Le fait qu'il soit vraiment beau ne gâche rien.
Je le veux. Comment peut-il être bête au point de me dire non, encore une fois ?
« Je fais ça pour toi, continue-t-il en jouant avec son verre. Et j'vais finir par en avoir marre d'être altruiste. »
Là. C'est ma chance. La porte qu'il n'aurait jamais du ouvrir, je m'y engouffre toute entière.
« Si c'est moi qui demande, tu n'as pas à me protéger ou quoi que ce soit chaton, ronronné-je en battant des cils - c'est loin d'être mon premier coup d'essai. Surtout que je ne vois pas vraiment de quoi je devrais avoir peur. Tu m'expliques ? »
J'ai tiré la chaise à côté de lui, juste assez près pour pouvoir frôler sa jambe de la mienne. Il y a Suzu qui passe à côté avec un verre de Martini que je chope à la volée - oui, j'avais totalement préshot la commande et oui, je profite tranquillement de la pause du patron pour préparer mes plans du soir. Après tout, amuser les clients, ça fait partie des missions du poste.
Il tire sur sa cigarette avec un regard blasé du type kid, please. Celui-là je le connais bien, Raiden avait exactement le même quand j'essayais de lui taxer de l'herbe.
« Non, je suis pas ton daron. »
J'ai levé les yeux au ciel. Ils y sont restés deux ou trois bonnes secondes.
« Ok, no fun. Je crois que ce que je devrais craindre, en fait, c'est de mourir d'ennui, décrété-je avant de prendre une gorgée de cocktail. Tu vas finir par en avoir marre quand, du coup ? Que je sache si je dois commander un deuxième verre. »
Il hausse les épaules et en profite pour trinquer son verre avec le mien. Pour un peu, j'en deviendrais blasée moi aussi.
« Quand j'aurai droit à une bouteille offerte pour être aussi patient avec une gamine.
- Mh, c'est la gamine qui décide d'offrir des verres ou non, donc réponds à ses questions et on verra. »
S'il est aussi bon au lit qu'il en est chiant en dehors, alors ça risque bien d'être le meilleur coup de ma vie so far. Malheureusement ça fait longtemps que je n'attends plus rien niveau sexe, les mecs sont toujours du genre à trop parler pour au final rien avoir en back-up.
Tout dans l'apparence, tout le temps.
« C'était censé être quoi la question, répond-il en posant son verre sur la table, ses yeux fixés aux miens. Quand je finirais par en avoir marre ? Maintenant. De quoi tu devrais avoir peur ? Ça je sais pas, ça dépend de si tu mérites un revers dans la joue ou non d'ici à demain matin, c'est toi qui vois. »
Ça va qu'il est vraiment dark, sexy et mystérieux et qu'il siffle son whisky neat plus vite qu'il ne me pompe l'air. Un soupir, continue comme ça et ta facture va très vite s'allonger de commandes imaginaires.
« Pour l'instant, celui qui mérite une claque de goujat, il est en train de siffler son cinquième sky de la soirée et de passer à côté de la chance de sa nuit, répliqué-je avant de reprendre une gorgée de Martini. Tant pis pour lui, j'imagine. Et pas de verre gratuit, bien sûr. »
Espèce d'alcoolique qui ne pense qu'à boire.
D'ailleurs, il récupère un nouveau whisky avant même d'avoir fini le précédent en mode finger gun dans ma direction, et me sert un sourire espiègle qui me ferait presque fondre s'il ne m'avait pas autant gavée.
« Tu vois ? Tu peux pas dire que je t'avais pas prévenue, fait-il avant de finir son verre et tirer sur sa clope. C'est bon, file le ton num. Tu finis à quelle heure ? »
Je finis à minuit trente. Et tu n'as pas intérêt à être en retard, Carmine.
***
20
- Home sweet home:
Je fais tourner le petit paquet entre mes mains. Il me regarde comme s'il m'avait offert une boule à neige de la boutique de souvenirs du coin. Tu t'es amélioré, Stel. Tu fais le malin mais si tu crois que je te vois pas exulter de fierté tu te fourres le doigt dans tes yeux pseudo-blasés.
Tu meurs d'envie que je l'ouvre, hein ?
Too bad. Je continue à soupeser le truc en fixant ses iris glacés.
« C'est même pas mon anniversaire. T'es suspect, tu sais ? »
Il se contente d'arquer un sourcil sans ciller. Si c'est encore un de tes porte-clefs horribles à l'effigie d'une autre sitcom vaseuse, tu vas te le prendre dans la figure. Et cette fois je te louperai pas, sois-en certain.
OK. Je déchire le papier-cadeau maladroit mais plein de bonne volonté.
C'est un autre porte-clefs.
T'es sérieux.
Mais il a un petit sourire en coin qui veut tout dire.
Derrière un Chandler plastifié qui arbore son sourire idiot en levant ses deux pouces en l'air, il y a deux petites clefs. Elles tintent alors que j'agite le trousseau.
« Que... C'est quoi ça ? »
Me dis pas que...
« Quoi, t'es pas pressée de faire le tour du proprio ? »
On a un appart.
On a un appart.
Je lui ai sauté dessus avec tellement d'entrain qu'il a failli tomber sur le bitume.
***
- What did you expect:
- Me donner une adresse, c'est comme filer les codes nucléaires à un enfant hyperactif.
Premier acte de ma vie sédentaire ? J'ai commandé des trucs.
Et pas n'importe quels trucs.
Il n'y en avait pas tant que ça. Juste quelques boîtes qui traînent dans ma chambre, c'est tout. Pas grand chose.
Pas de quoi en faire un drame, mh ?
***
- Nothing I hope:
- Madame, Monsieur,
Je vous écrit car malgré mes nombreuses relances, je n'ai toujours pas reçu ma commande (n°304 878 100). L'occasion pour laquelle j'en avais besoin est passée, c'est pourquoi je vous demande l'annulation et le remboursement de l'intégralité de la livraison (sac Yves Saint-Laurent et escarpins Louboutin).
Vous pouvez utiliser le RIB enregistré dans mon compte.
Cordialement
***

***
21
- rusty robots and wasted seagulls:
- L'air est moite, j'ai l'impression d'avoir mis les pieds dans un hammam mais l'odeur de sueur rance n'aurait trompé personne. Et certainement pas les filles que j'ai perdues dans la foule, je les recroiserai bien à un moment. Sans mentir, on sait toutes pourquoi on est venues ici. Chasser. Trouver. Ramener. Apprécier.
Dévorer.
Moi ? Je veux juste danser.
Je les revoit au loin, elles sont dans un coin de la boîte, comme si elles pensaient pouvoir m'échapper. Extrêmement occupées à agripper un mec chacune, à planter leurs griffes manucurées dans le bras de leurs proies. Les pauvres. Pauvres gars. Pauvres filles.
Quelqu'un renverse un fond de verre sur ma manche. C'est fou comment ça rafraîchit.
Le rythme me transperce mais si ça se trouve c'est juste la
drogue
merci le type bizarre de l'entrée d'avoir sauvé ma soirée.
Je lève les bras, esquisse quelques pas, m'entremêle les talons et fais passer tout ça comme si c'était calculé en me rattrapant in extremis comme si j'étais en état de calculer quoi que ce soit oh
après tout aujourd'hui, Birdie Bradshaw est sortie se mettre minable dans une boîte quelconque.
Pas Baby, pas Kanon, pas Anna la nana qui traîne sur ses faux papiers - adieux Anna en passant parce que
Aujourd'hui, Birdie Bradshaw a vingt-et-un ans, majeure et presque vaccinée parce qu'elle est pas trop sûre parce qu'elle est toujours trop occupée tellement elle est stylée cette fille.
Jenvoie une quinzième photo floue à Mino parce qu'il doit déjà avoir le seum à bosser à cette heure-là donc faut que j'en rajoute - et puis une à Stélian. Et j'en rajoute plein où j'essaie de faire une moitié de coeur avec mes doigts mais celui qui a créé les
logiciels pour prendre les photos avec son téléphone il a jamais réfléchi à comment c'était dur avec une main et une autre en demi coeur oh. Quel baka il faudrait qu'il soit viré.
et puis plein plein plein de duckfaces vintages et d'autres trucs je sais pas trop j'appuyais au hasard et puis je danse en même temps c'est au moins aussi difficile que les demi-coeurs
Y a un gars qui me chope à la taille et qui me fait tourner - encore un tour et je vom- ah bah j'ai fait tomber mon téléphone c'est ballot ça.
il est pas cassé ça aurait pu être pire pire pire
Puis y a d'autres gars, d'autresgens.
j'aime vraiment danser
regardez ce que je sais faire
oui, c'est l'heure
my time to shine
pas du crabe, pas du lavage de vitres, pas du passage de balais, pas de la méduse qu'a plus pied
y atout le monde qui m'admire tellement jedansetrop bien bah je devrais peut-être commencer à faire payer les places
pas de l'enfournage de pizza, pas du je suis où, pas ducrawl horizontal inversé, encore le lavage de vitres
woo ils sonttotalement waw je kiff-
Oupsie.
Je crois j'ai éborgné quelqu'un?
j'fais quoi si j'l'ai tué ?
c'est quand même ballotdemourir à cause du pas du robot, dude
puis je le rgarde depl us près et
Holly cowje croisj’aiagresséunflic
y a qu’eux pour êtreau ssi coincés en boîte ohputainf aut quejme sauve flemme de passer la nuit en taule etpuisçavoudrait dire se taper les commentaires de merde de stelian et ça non c’est moooort
mierda il ma attrapé le bras allez baby allez aie l air normale nature tranquille la totale normie quoi
du coup j’esquisse deux pas avec une duckface sur un malentendu ça passe. la danse de la mouette m’a jamais déçue jusque là, s’agirait pas de commencermaintenant
ah MIERDA MIERDA MIERDA IL PASSE A L’INTERRONEGATION saleté de mouette moisie fallaitquetu fasses un bide juste quand j avais besoin de toi ça craint un max là
jfais quoi jlui sors un fauwx nom ?
il a pas l’air très grand peut être que jpeux lui mettre un coup de talon dans la tempe pour décamper
bah oui faut bien que ça serve un jour de faire le grand écfart
aaaah je sais pas quoi lui dire alerte alerte panique
« Euhmoic’est… Carmine… Weiss. Promis m’sieur jesuis clean rien à déclarermais si vous cherchez dl a drogue y a le typedufond là qui en a plein les poches. après moi jsais pas j ai pas touché à ça mh mh »
Pourquo o i y a perqonne autour qui reazgit c est interdit par le code de la boite de nuit ça dlaisser les gens dans leur mierda face aux policiers
Désolée kami-sama promis j arrête les gros mots maintenant
mais jte rappelle quon avait dit que l’italien c’était pas du jeusx hein
ah mince il va demander les papiers
ils sont où les papiers normaxu de la personne normale qu’est carmine weiss– quelle blague ?
ça fait quand même bizarer de nepser que quelqu un qui sappellerait carmine weiss puiss e être normal je veux dire c est quand meme un sacré handicap pour avancer dans la normitude un blzae areil
ah bah en fait c est tout con ils sont au vestiaire et j ai oublié le buméro. hop-là comment esquiver la question des papiers boom baby
« c’est bon je peux partir m’sueir l’agent ??
- J'ai une gueule de flic ? Promis je suis pas là pour t'arrêter. Plutôt pour m'amuser en fait. Ravie de te rencontrer, Carmine. »
J’ai essayé très fortdepasri goler
promis que j’ai essayé très fort.
mais tous leschatons morts du monde ont eu aucunpouvoir face à cette voix super serious qui me dit ravi de te rencontrer carmine. RAVI DE TE RENCONTRER MOTHERFUCKIN CARMINE jsui ded je rigole comme une baleine ça a même avorté le pas du papillon déprimé.
il a demandé s’il avait une gueule de flic qu est je en je sais moi hein ? j’ai hurlé « AUTANT QUE J’AI UNE TÊTE DE CARMINE » mais il a pas réagi je crois il a pas compris tant pis ; troia j e crois il a posé la question avant de dire machin rencontrer carmine – j’ai déjà autant de shinkansen de retard sur la discussion moi ?
t’es pas un flix du coup ?
« TU JURES T ES APS FLIC ?? »
deux points dniterrogationparcequeje jsuis super interogationneuse la parcequ on sait jamais si ça se trouve il va dire nom mais en fait c’est oui alors faut vraiment faire attention etécojuter la réponse
donc bah dans le mille j’ai pas écouté sa réponse mais on va dire que non c’est un type normal parce que c’est quaNd meme plusfun qu’on flic
j’avais pas réalisé mais il me tient les mainsetmoije continu ais à danser j’ai rien senti mais c’est marrant. je pars en parodie de rock, comme si la salsa et le jive avaient eu un enfant malformé – y a pas meilleure descriptionpourl es pas que jfais là. et puisune dans e triso moi ça mfait marrer
euh juste pour info moi j’ai rien contre les handi papier je veux faire du bénévolat quand j’aurai la thune de aps bosser pour faire du bénévolat
parce que le bénévolat bah quand t a pas un rond bah ça paie pas normal c’est du bénévolat
ouh, ça tourne d’un coup.
puis je repense au RAVI DE TE RENCONTRER CARMINE d’y a 10 min et jxploseencore de rire même 10 min après
« je- j-m-appelle pas Carmine, que j arrive a meine à articuler entre deux fou rires. J-p-p. »
ouais jai dit jpp à voix haute, c’est so 2010 et alors ? de toute façon tout le voisinage doit me prendre pour une débile déjà avec le crawi inversé donc je suis pas à ça près
« C'est quoi ton nom alors, pas-Carmine ? »
la vie cest cool quan d meême il y a des choses qui la rendent cool. la danse c'est cool jaime perdre le sens de mes pas et me laisser porter, melais ser porter et puiis mettre les bras auc ie l et ils font leurvie et ils sagitent comme sije pouvais deplacer le plafond.
les gens cest cool aussi. onsait jamais vraime,t trop sur quoi on tombe parfois cest nul et consternant mais parfois c est telment cooool jaime la vie jembrasse la vie je la laisse me faire tourner. elle est belle la vie dans la lumiere des neons et des projecteurs, ça lui fait un air tres pas d'ici ça lui va bien. ça lui va bien. J'aime beaucp."
et pàuis elle a les mains fines, longues, qui desvendent le long de mon dos -j'en ai des frissons cest tellement bon jen veux plus c'est agréable - agréable. doux. c'est doux. et chaud et vorace et affamé et bon. différent. Différent de tous ces hommes qui posent leurs yeux, leurs mains, leurs fantasmes sur moi. De carmine même - meme si je laime beaucoup hein, beaucoup beaucoup mi amore.
C'est une femme.
cest ca la difference;
ca se sent dans tous ses gestes et ses - ca se sent. DAns les bisous quelle pose dans mon cou, dans son souffle et son parfum.
« Moi- moi c'est babyyy »
oui je viesn de me souvenri le la question ya quoi ?
mes mains vont sous sa veste, agrippent un tshirt, faut dire que cest bon tellement tellement bon faudrati que ça dire ds heures ca serait trop cool je lattire plus près elle sent la vanillle et je sais pas quoi mais vraiment cest pas mal, pas mal du toutn
« ET TOI ?
- Moi, c'est Butch. »
Butch. Elle s'appelle Butch, elle est magnifique, je lui ai sorti le pire des faux noms que j'aurais pu inventer, elle a pas trop rigolé. Elle va devenir la femme de ma vie.
***
23

***
26
- Shukumei:
- Ils en parlent à la télé depuis des heures. Aucune chaîne n'en réchappe, alors j'ai ouvert Netflix. J'ai besoin de me calmer les nerfs.
Ici, à Iijima, on est bien trop loin des rivages pour avoir vu quoi que ce soit. Non, ce qui m'inquiète, c'est ce qu'il se passe à Tokyo. Autant pour les histoires d'Incontrôlables, j'en avais complètement rien à faire, mais là...
Aucune nouvelle, pas de téléphone.
Je vais finir ma deuxième série de la journée.
***
27
- like going to church without faith anymore:
- Aujourd'hui, c'est prison et hôpital.
Ça me donne envie de pleurer, comme d'habitude.
J'ai fini de préparer la contrebande de la semaine, Butch est dehors pour allumer la moto. Chocolat, clopes, je lui ai même rajouté une boulette de haschisch au cas-où - il pourra toujours l'échanger contre des trucs plus cools. Ça me déprime. J'espère que mon contact sera là aujourd'hui, je lui offrirai un verre quand il viendra au cabaret.
Ah, et puis mierda, j'ai rajouté cinq mille yen enroulés dans le paquet de cigarettes.
J'ai vraiment envie de pleurer.
Ça tient presque dans une poche, je ne pense pas pouvoir rajouter grand chose d'autre. Et voilà, Stel. Après tout ce que tu as fait pour moi, la seule chose que je peux te filer en retour c'est trois bêtises dans un sac transparent. Enfin bon, c'est ma vie. Me battre contre la sécurité carcérale et l'indifférence des médecins. Je commence presque à regretter le temps où tout allait bien.
Je sors, Butch est aussi livide que d'habitude. Je la serre dans mes bras, pour un peu je la sentirais presque trembler. Au fond, je tremble aussi. Et je prie Kami-sama tous les jours pour que son cancer perde la guerre. Sauf que je n'ai pas le droit de me laisser aller, il faut que je reste forte pour eux. Le big smile, la positive attitude, tout le tintouin qui leur donne l'impression que ça pourrait être pire, en vrai.
Sauf que non. Ca ne pourrait pas être pire. Et derrière ma façade calculée au rire près, je hurle de douleur.
***
- a whole little world of mine:
- J'ai posé le classeur énorme devant Aliocha, même lui a l'air de trouver ça suspect. On a travaillé dessus pendant des semaines avec Butch, et même Stel a été d'accord pour sacrifier deux visites et nous aider sur les détails. Je crois que c'est tout bon, maintenant.
Il n'y a plus qu'à convaincre la Famille, et le Cell Block sera à moi.
Je fais tout pour être calme et assurée, mais s'il n'était pas là, je sauterais jusqu'au plafond.
***
28
- Living dead girl:
- Je regarde Butch, elle a l'air de se déchirer en deux. Je dois avoir à peu près la même expression. Je l'aime tellement.
Birdie est morte il y a quelques jours, peut-être même quelques semaines. Ses comptes ont été gelés, sa succession s'organise, je ne sais pas ce qu'il va advenir de mon cabaret. J'ai laissé la gestion à Suzu, ça devrait rester ouvert le temps que je trouve une solution. Je n'ai plus aucune emprise sur rien. Et les rumeurs qui circulent sur ce qu'il arrive aux zombies comme moi n'aident en rien.
Je n'ai pas le choix, je dois m'enfuir. Heureusement que mon vieux faux passeport est encore valide, sinon j'aurais eu l'air bien bête. Ou bien morte, pour de vrai cette fois.
Ils appellent pour le check-in de mon vol. On n'a plus que quelques minutes, au maximum.
Je ne sais pas si je vais la revoir un jour.
Je l'aime tellement, j'en ai le cœur qui se fragmente en petits morceaux.
Elle sourit, elle veut avoir l'air forte, mais je connais cette technique depuis longtemps. Je ne sais pas si j'aurais pas préféré que tu pleures avec moi, Boutchi.
Dernier appel, dernier baiser, je m'en vais en me promettant de ne pas regarder en arrière mais j'ai pas pu retenir un dernier regard, un dernier souvenir de cette femme que j'adore à en crever. Les pas sont mécaniques, je ne comprends pas la moitié des choses que je lis tellement mes yeux sont embués.
Camine m'attend dans le duty-free, j'ai ruiné sa chemise de larmes et de mascara.
Je prie tous les jours pour que tout se passe bien, mais je n'y crois qu'à moitié.
***
- OBEY:
L'Incontestable, c'est vraiment le meilleur système possible, j'ai hâte d'être mariée et d'avoir des enfants. Vive l'Incontestable.
J'ai foi en lui, même plus qu'en Kami-sama. Il est infaillible et me trouvera la personne qui me correspond entièrement. Vive l'Incontestable.
Le Japon est une grande nation, c'est grâce à l'Incontestable. Je crois que Butch vient me chercher aujourd'hui, il faut absolument que je lui dise tout ça.
Vive l'Incontestable.
Nobody puts Baby in a corner
Elle est belle, Butch.
Parfois je me demande si je me fais belle pour elle ou pour moi.
J'adore le maquillage, il y a ce quelque chose de dessiner sur soi-même qui me détend. J'aime me voir comme je vois mes portraits, nue et à redécouvrir tous les jours. Un trait de crayon, quelques coups de poudres, des couleur, des paillettes. Beaucoup de paillettes.
Je veux briller. Je veux que tous les regards convergent vers moi. Je veux les yeux de ces gens qui pourtant sont en rendez-vous, je veux leur admiration et leur fascination. Je veux leur envie.
Je veux leur jalousie quand ils me voient les dépasser. Pas eux, quelqu'un d'autre. Ce ne sont pas vers eux que je vais, je veux que ça les dégoûte.
Le rouge à lèvres est mon étape préférée. Il y avait un type, une fois, qui jugeait la personnalité des femmes sur ce qu'elles appliquaient sur leur bouche. Rose ? Gamine. Brun ? Belliqueuse. Prune ? Vieille école. Rouge ? Assumée.
Il m'avait fixé sur cette dernière couleur. I always go for the red.
Des fards, du blush, de l'highliter. J'ai laissé mes cheveux lâchés, j'aime les boucles qu'ils forment - et faut dire qu'avec le temps que me prend leur entretien, je vais pas tout gâcher avec un chignon ou une ponytail.
Parfait Baby. Tu es parfaite.
Et à l'heure pour le rendez-vous. A peine vingt minutes de retard.
Un petit SMS inquiet atterrit sur mon téléphone. Confiance, voyons.
J'envoie un texto à Butch pour lui rappeler notre dîner du lendemain, elle serait capable d'oublier.
Et pour ce soir... Comment elle s'appelle, déjà ? Mamoko ?
Que Kami-sama bénisse les unions libérées.
Birdie Bradshaw

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La plus belle – l’unique femme de ma vie. 
Rebienvenue parmi nous, tu vas
sur nos vies. 

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Alekseï Jefferson

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Adrian Liu

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c’est donc ça l’amour
oof
rebienvenue omg
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La plus belle, la plus fabuleuse, la plus

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La plus belle est de retour
.



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Wouuuh une femme comme on en fait plus
C'est chouette qu'elle revienne par-là
(toujours aussi belle plume btw)

C'est chouette qu'elle revienne par-là

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Merci Lucci, Zach (notamment pour le vava dessiné avec Kiyo ♥) et Lucas pour les avatars et kits

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- [22:06:43] Luz E. Alvadaro : "Le RP plus une passion, une profession" "Makoto Nanase 2017"
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... 
Je préshot la semaine de délai, même si je vais essayer de faire sans
(personne n'y croit)
Et merci à tous pour vos messages vous êtes des sucres

Je préshot la semaine de délai, même si je vais essayer de faire sans

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Birdie Bradshaw

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Je t'ajoute une semaine de délai 


Merci Lucci, Zach (notamment pour le vava dessiné avec Kiyo ♥) et Lucas pour les avatars et kits

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- [22:06:43] Luz E. Alvadaro : "Le RP plus une passion, une profession" "Makoto Nanase 2017"
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Au jour près, c'est terminé. 
Courage pour la modération hein

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Bienvenue, j'espère que tu vas bien t'intégrer sur le forum. 
2 fautes à corriger :
des couleur
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Votre fiche a été pré-validée par un modérateur, un administrateur passera sous peu valider officiellement celle-ci.
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• Dans l'ordre, vous pouvez faire une demande de conjoint ici, ensuite vous faites une demande d'habitation ici et enfin, vous pourrez valider votre mariage ici.
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& Surtout, AMUSEZ-VOUS !

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